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Réflexion faite - Page 97

  • Témoignage

     

    LE CARÊME DE NICOLAS

    23 ans, étudiant en droit aux Facultés de Namur

     

    108_a96246e959a1ec60530444e3aa69ed08.jpgPour moi, le Carême est l'occasion de me défaire des choses inutiles qui encombrent ma vie de tous les jours. Le Carême, c'est choisir quelques comportements qui m'éloignent quotidiennement de Dieu, mais que je fais sans vraiment m'en rendre comtpe, et tenter de les erradiquer. Pour ce faire, l'Eglise propose trois voies pour choisir nos petits 'sacrifices'.  

     Premièrement, il y a le partage. Cette voie consiste simplement à mettre une place pour les autres dans ma vie. Personnellement, j'ai choisi de m'ouvrir un peu plus aux autres, de les écouter vraiment et de retenir ma langue lorsqu'il est question de les critiquer ou d'être médisant. Concrètement, j'ai choisi de voir en priorité ce qu'il y a de bon dans toutes les personnes que je croise et que je côtoie et non plus de me méfier des autres en les jaugeant du premier regard.

    Deuxièmement, il y a le jeûne. Personnellement, je n'approche pas le jeûne cetteimagesCAHX87FX.jpg année via sa facette alimentaire. En tous cas, pas dans un premier temps. Pour des raisons de santé, je ne peux pratiquer un jeûne à l'état pur. Mais j'ai fait le voeu de m'abstenir de viande les mercredis et les vendredis afin de me rappeler le sacrifice du Christ ainsi que de jeûner de manière progressive afin de faire une petite place bien physique en moi pour Dieu. C'est-à-dire que, progressivement, je vais éviter de boire du café, ensuite de manger du chocolat, toutes ces choses qui ne sont pas nécessaires et qui nous procurent du plaisir. Certains diront que c'est du masochisme, j'aurais envie de leur répondre que ce n'est que de l'ascèse. En effet, lorsque l'on s'abstient de manger du chocolat pendant trois semaines, par exemple, on se rend compte du réel plaisir qu'il nous procure lorsqu'on en mange enfin. Je veux pointer là un gros problème dans notre société: la surconsommation. On a plus le goût de rien. On a toujours trop. En gros, ce ''jeûne alimentaire'' comme je l'appelle, me permet de me ''désintoxiquer'' de cette surabondance. Mais le plus important, c'est qu'il m'aide à partager la condition de ces personnes qui n'ont pas la chance d'avoir accès à cette surabondance.

    imagesCAT7PJ3S.jpgTroisièmement, et pour finir, il y a la prière. J'ai choisi de tout simplement consacrer un peu plus de temps à la prière quotidienne et de donner quelques minutes supplémentaires à l'adoration au moins une fois par semaine lorsque mon planning me le permet.

    Finalement, le Carême, pour moi, c'est ''simplement'' exacerber les qualités que Dieu nous demande de revêtir toujours et en tout lieu et pour lesquelles Jésus est l'exemple par exellence qu'Il nous demande de suivre. Mais au-delà de cet aspect, il y a également cette ouverture vers l'altérité, vers cette universalité qu'est l'Eglise.

    En effet, Dieu nous donne une Eglise faite de tant d'affinités, et j'ai tendance à n'approfondir qu'une seule d'entre elles. Alors, ma grande résolution finale, cette cerise sur le gâteau qu'est le Carême, c'est tout simplement d'être présent PARTOUT où le Seigneur me demande d'être, même et surtout (puisque le Carême c'est cette exacerbation dont je parlais) dans ces endroits de l'Eglise que je ne connais pas assez bien et vers lesquelles je ne vais pas spécialement spontanément.

     

     Lu sur le blog de notre confrère BELGICATHO

     

     RECONCILIATION, PRIERE ET SILENCE

     A L'EGLISE DU SAINT-SACREMENT

    (Boulevard d'Avroy, 132 à Liège)

     

     

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    Tous les mardis de 17h00 à 19h00

    Confessions

    un prêtre à votre disposition de 17h00 à 18h45

    Adoration

    17h00 vêpres  grégoriennes, suivie de la méditation de l'évangile du jour

    18h00 chapelet suivi des litanies du Sacré-Coeur

    18h45, bénédiction du Saint-Sacrement suivie de l'angélus.

     

     

  • "sacerdos, alter Christus"

     

     

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    POUR EN FINIR AVEC L’ORDINATION

     DES HOMMES MARIÉS ET DES FEMMES

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    La question du célibat sacerdotal, c’est comme le boléro de Ravel : on croit que c’est fini et cela recommence encore obstinément. Sans remonter au conciles d’Elvire (IVe siècle) ou du Latran (le premier, au XIIe siècle), voici peu  le thème a refait surface, une fois de plus, à la faveur de la révélation de l’épidémie pédophile des années postconciliaires. Dans les pays catholiques les plus éprouvés par le « sécularisme » doctrinal et moral -comme l’Autriche ou la Belgique- des évêques ont épanché publiquement leurs doutes et leur trouble. Lorsqu’à la mi-mai 2010, un  évêque autrichien, Paul Iby, d’Eisenstadt, déclare que « les prêtres devraient être libres de décider s’ils veulent se marier ou non » et que « le Saint-Siège est trop timide à ce sujet », le cardinal-archevêque de Vienne, Christophe Schönborn, commente : « les préoccupations qui ont été exprimées par l’évêque Iby, nous les ressentons tous ».Un peu plus tard, dans un contexte similaire, trois évêques flamands, dont deux récemment nommés par Benoît XVI lui-même, NN.SS. De Kesel (Bruges), Bonny (Anvers) et Hoogmartens (Hasselt) ont, à leur tour, saisi au bond la balle des scandales pédophiles, pour pousser l’amalgame encore un peu plus loin. Dans une interview à la radio flamande VRT, Mgr De Kesel a déclaré (18 septembre 2010): « Je pense que l'Eglise doit se poser la question de savoir s'il convient de conserver le caractère obligatoire du célibat » et, poursuivant sur sa lancée: « on pourrait dire qu'il y a des prêtres célibataires mais que des personnes pour lesquelles le célibat est humainement impossible à respecter devraient aussi avoir la chance de devenir prêtre » pour conclure: « la discussion sur le célibat [des prêtres] pourrait avoir une suite bien plus rapide que celle sur l'accès des femmes à la prêtrise" ».  

    Et à nouveau tout récemment,  après que cent cinquante théologiens germanophones eussent lancé (7 février 2011) un bruyant manifeste « pour mettre fin à la crise sans précédent  que traverse l'Eglise catholique depuis les scandales des prêtres pédophiles »,  le site de l’agence de presse « Cathobel » publia un éditorial  « Célibat des hommes et ordination des femmes » du P. Charles Delhez s.j., paru dans le Dimanche Express n°8 du 27 février 2011. Dans cet article, le directeur du journal des paroisses francophones de Belgique reprend, « more jesuitico », l’antienne qu’il avait déjà publiée dans la « Libre Belgique ». Voici un extrait de sa prose :

    « (…) Dans l’Église latine, on n’ordonne prêtres que ceux qui font la promesse de rester célibataires. Ne pourrait-on cependant pas imaginer, dans l’Église latine, la même diversité qu’à l’intérieur de l’Église catholique dans son ensemble ? C’est que les Églises locales évoluent bien différemment aujourd’hui. Des réponses adaptées à la situation de chaque pays ou de chaque région du monde serait sans doute  heureuses.                                                                                  

    « Tout autre est la question posée par l’ordination des femmes. Elle est théologique. L’Église est-elle tenue par le fait que Jésus n’a choisi comme apôtres – les Douze – que des hommes, alors qu’il était entouré également de femmes ? Elles ont d’ailleurs joué un rôle très important, comme premiers témoins de sa résurrection, par exemple. S’agirait-il d’une donnée culturelle ou d’une volonté divine ? (…) ».

    Dans un commentaire « posté » sous le texte de son confrère, le Père Thierry Dejond s.j. apporte au lecteur un excellent antidote à la culture du doute pratiquée par le Père Delhez. Une mise au point concise, claire et précise : « (…) Il est évident que l’ordination des Douze Apôtres, et non de Marie, Mère de Dieu, ni de Marie-Madeleine, Suzanne et autres Femmes ayant suivi Jésus, n’est pas une « donnée culturelle », mais bien une « volonté divine », au sujet de laquelle toutes les Eglises ont maintenu un accord unanime, jusqu’à la fin du XXème siècle.  C’est donc une idée de la « post-modernité », lancée par le Mouvement féministe, dont la philosophie est la « gender philosophy », dont la thèse, validée par l’ONU, est qu’on choisit librement d’être homme ou femme, car il ne s’agirait pas d’un donné « naturel », mais purement « culturel ».

    Si les Eglises orientales ‘revenues au catholicisme’ ont accepté d’ordonner des hommes mariés (vu leur passé orthodoxe datant de 690) [ndlr : concile « in trullo »], c’est par miséricorde de l’Eglise catholique, qui ne voulait pas briser une tradition de cinq siècles.

    Le « célibat des prêtres » dans l’Eglise latine n’est autre qu’une manière d’être fidèle à la « Tradition remontant aux Apôtres », et acceptée tant chez les Grecs que chez les Latins jusqu’en 690, et exigeant des Evêques, Prêtres et Diacres mariés, de renoncer, le jour de leur Ordination, à l’usage du mariage. Cette tradition apostolique s’est maintenue en Occident, tandis que l’Orient grec cédait aux décisions de l’Empereur de Byzance.

    Pourtant, même en Orient, subsistent des traces évidentes de l’ancienne discipline commune: les Evêques n’ont pas le droit de vivre en mariage, jamais; les prêtres et les diacres, après le décès de leur épouse, n’ont pas le droit de se  remarier,  puisque ils ont été ordonnés. Ce qui prouve bien qu’il s’agissait d’une  tolérance, Idem, pour les  diacres mariés  en Occident, depuis le Concile Vatican II: ils ne peuvent pas se  remarier.

    Cette discipline remonte aux Apôtres, dont un seul, Simon-Pierre, était certainement marié avant l’appel du Christ, mais qui répond à Jésus: « Nous qui avons tout quitté pour te suivre… », Jésus répond: « Amen, je vous le dis: personne n’aura quitté maison, femme, frères, parents ou enfants, à cause du Royaume de Dieu, qu’il ne reçoive beaucoup plus en ce temps-ci et, dans le monde à venir, la vie éternelle. » (Luc 18, 28-30). Bien d’autres textes de L’Ecriture Sainte, et de la Tradition des Pères de l’Eglise, confirment cette exigence de Jésus. Exigence rappelée au 1er Concile Oecuménique de Nicée en 325, canon 3; et déjà avant, dans des Conciles régionaux: Elvire (Espagne) en 304 et Ancyre (=Ankara, Turquie) en 314. Il est clair que ces canons disciplinaires de l’Eglise ne faisaient que « rappeler » la Tradition remontant aux  Apôtres etattestée par de nombreux  Pères de l’Eglise  auparavant ».

    Le Père Dejond est professeur de théologie dogmatique et directeur spirituel du Séminaire de Namur depuis 1994.

     

     

  • Avons nous tous le même Dieu ?

     

    QUAND DIEU SE MANIFESTE

    epiphanie 2011 à l'église du saint sacrement à liège 

     

    epiphanie 2011 à l'église du saint sacrement à liège

    epiphanie 2011 à l'église du saint sacrement à liège

     Le 8 janvier dernier, plus de deux cents fidèles se sont réunis à l’église du Saint-Sacrement à Liège pour la Solennité de l’Épiphanie célébrée selon le missel de 1962 par M. l’abbé Jean-Pierre Herman, chapelain aux sanctuaires de Beauraing. Celui ci était assisté par M. l’abbé Claude Germeau (officiant comme diacre) et le Frère Jérémie-Marie de l’Eucharistie (comme sous-diacre).

    Tant la procession à la crèche que la messe ont bénéficié du concours remarquable de la Capella Verviensis (dir. et orgue : Jean-Michel Allepaerts) qui a interprété la messe à quatre voix mixtes « O Magnum Mysterium » de Tomas-Luis da Vittoria (1518-1611) et six chorals ou motets anciens pour le temps de Noël. Le propre grégorien de la messe était assuré par la Schola du Saint-Sacrement.

     Dans sa prédication, l’abbé Herman a rappelé les origines de cette fête et plaidé vigoureusement pour une nouvelle prise de conscience de sa signification. Voici la transcription de cette homélie :

      Mes bien chers frères, mes bien chères sœurs,

    Le dessein de Dieu n’a pas été seulement de descendre sur terre mais d’y être connu. Non seulement de naître mais de se faire connaître. De fait, c’est en vue de cette connaissance que nous avons cette célébration de l’Épiphanie, ce grand jour de la « manifestation ». Ainsi s’exprime saint Bernard dans l’incipit de son premier sermon sur l’Épiphanie. « Manifestation » : telle est la signification de l’Épiphanie, ce mot à la racine grecque : πιφάνεια (Epiphaneia). Le Seigneur se manifeste à tous les peuples.

    epiphanie 2011 à l'église du saint sacrement à liège

     Les origines de la fête

     Si nous considérons ce mot de « manifestation », nous devons reconnaître qu’il est bien plus général voire même bien plus vague que la seule visite des mages à la crèche. Recourant à l’histoire de la liturgie, nous verrons que ce terme d’ « Épiphanie », lequel cède parfois aussi le pas à celui de « Théophanie », c'est-à-dire manifestation de Dieu, a recouvert diverses réalités.

     Les trois premiers siècles de l’Église, plus particulièrement le deuxième et le troisième -car le premier n’a vu que la célébration pascale- avaient une seule et même fête pour célébrer la « manifestation du Seigneur » et, à l’intérieur de cette manifestation se célébraient à la fois l’Incarnation (la naissance du Seigneur), sa visite par les mages, le baptême par Jean dans le Jourdain et le premier miracle à Cana en Galilée.

     Avec les hérésies qui niaient la maternité divine de la Vierge Marie et le concile d’Éphèse (325) qui a voulu définir celle-ci, ou du moins condamner ceux qui la niaient, on a accordé une plus grande importance à l’Incarnation du Christ Fils de Dieu et, petit à petit, ce jour du 25 décembre, qui jusque là était simplement celui de la commémoration du martyre de sainte Anastasie, a commencé à devenir un jour important dans l’année liturgique : le jour de la célébration de la Nativité. Et c’est douze jours plus tard qu’on célèbre alors la fête des « saintes théophanies » qui contenaient toujours en elles la visite des mages, le baptême par Jean dans l’eau du Jourdain et la première manifestation du Seigneur comme Messie, à Cana en Galilée.

     L’Occident est généralement pédagogue dans son enseignement et dans sa liturgie. L’Orient est davantage mystique. C’est pourquoi, même si la fête de la Nativité s’est aussi imposée en Orient, on y a gardé, douze jours plus tard, cette fête des saintes théophanies, de ces « manifestations du Seigneur », en un seul jour. L’Occident, par contre, a voulu  morceler, une fois encore par souci pédagogique, en trois célébrations distinctes la visite par les mages, le baptême dans le Jourdain et les Noces de Cana. Mais deux traces de l’unité primitive de la célébration sont restées jusqu’en 1962 : la première est tout simplement que les offices du baptême du Seigneur et de l’Épiphanie sont, à quelques différences près, exactement les mêmes et la seconde trace c’est que les antiennes de laudes et de vêpres de ces offices font mention des trois théophanies. « Aujourd’hui, nous dit l’antienne du Benedictus à Laudes, l’Église est rejointe par son Époux céleste. Dans le Jourdain le Christ a lavé les péchés, les Mages se hâtent vers le royal Époux avec leurs présents et les convives se réjouissent grâce à l’eau qui est changée en vin. Ce jour saint est illuminé par trois mystères. Aujourd’hui, l’Étoile a conduit les mages à la crèche, à la mangeoire. Aujourd’hui l’eau des noces a été changée en vin. Aujourd’hui, le Christ est baptisé par Jean dans le Jourdain pour nous sauver. Alleluia. ».

      Sa signification

     Bien sûr, dans notre Occident, nous avons cette fête de la visite des mages, ces hommes qui, tout joyeux de voir l’Étoile qui se pose -comme nous dit l’Évangile- au dessus de la maison où se trouve l’Enfant, le regardent, l’admirent, l’adorent et lui remettent les présents d’or, de myrrhe et d’encens. Mais, au-delà d’une évocation historique, au-delà d’une explication fut-elle théologique de cette fête de la Manifestation, que peut signifier pour le monde en général, le monde dans toute son histoire et en particulier pour le monde d’aujourd’hui, cette manifestation du Seigneur ? Autrement dit, par rapport à la commémoration de la Nativité du Seigneur, de sa venue dans la chair, que peut bien signifier son Épiphanie, sa Manifestation à tous les peuples ? Il est important de le comprendre. Très souvent nous préparons Noël avec beaucoup de frénésie et, une fois la fête passée, alors nous n’avons plus envie de célébrer encore ces fêtes qui suivent la Nativité et elles passent un petit peu inaperçues comme des suppléments au calendrier, que l’Église célèbre mais sans grand concours de fidèles. Et pourtant, Incarnation et Manifestation nous montrent ensemble la véritable nature du Dieu qu’adorent les chrétiens.

     Pour une nouvelle prise de conscience

    epiphanie 2011 à l'église du saint sacrement à liège

    C’est peut-être une nouvelle prise de conscience que nous avons à faire aujourd’hui : celle de la spécificité du Dieu des chrétiens par rapport à toutes les idoles que nous présente la société. Car n’y a-t-il pas, très souvent aujourd’hui, une tendance à dire que toutes les religions se valent, que chacune adore son dieu mais que de toute manière c’est toujours le même Dieu qui est adoré ?  Je ne dis pas qu’il ne faut pas respecter les autres ou ne pas leur permettre de croire à leur manière, mais nous devons toujours tenir à la spécificité de notre propre Foi et souhaiter que les autres, un jour, viennent à la vraie Foi, qui est dans le Christ.

     Le professeur Rémi Brague, voici deux ans, a publié un essai intéressant, dont voici le titre : « Du Dieu des chrétiens et d’un ou deux autres ». Dans le premier chapitre de ce livre, il développe trois idées reçues couramment dans la société d’aujourd’hui, pour les décortiquer et les infirmer.

     On nous parle en effet aujourd’hui de l’islam, du judaïsme et de la foi chrétienne comme des trois religions d’Abraham, des trois religions du Livre et des trois monothéismes.

     Rémi Brague, dans une excellente réflexion, nous montre que l’association de ce qu’on appelle les trois monothéismes n’est finalement qu’une vue superficielle, que le Dieu des chrétiens, le Dieu des juifs et le Dieu des musulmans sont extrêmement différents l’un de l’autre, que la perception de Dieu est extrêmement différente, que le concept même placé derrière le mot « Dieu » dans les trois religions diffère grandement.

     Il en va de même lorsqu’on parle des trois religions d’Abraham. Si Abraham est le fondateur de la race pour le judaïsme, il est aussi celui qui est à l’origine de la race pour les musulmans, mais dans une moindre fonction puisqu’à leur sens la révélation y vient bien plus tard, tandis que dans la foi chrétienne avec l’incarnation du Fils de Dieu nous inaugurons la plénitude de la révélation, une ère nouvelle : Israël  ne peut plus être limité dans le temps et dans l’espace mais il sera l’humanité toute entière sauvée par le Christ.

     Et puis, il y a cette qualification de religions du Livre. En réalité, le rapport au Livre dans les trois religions est lui aussi extrêmement différent. Le judaïsme, religion du peuple avant la destruction du Temple et sa dispersion, est devenu la religion d’un écrit  permettant à tous les juifs du monde de se retrouver sur un point commun alors que pour les chrétiens, le Livre -la bible et l’évangile, l’ancienne et la nouvelle alliance- est simplement un moyen de connaître la Révélation, un moyen d’y accéder mais une fois que nous l’avons découvert, nous devons aller plus loin, tandis que pour l’islam le Livre est tout, le Livre est presque en adéquation avec Dieu qui lui parle à travers le Livre et c’est pourquoi, dit Rémi Brague, il n’y a qu’une seule religion du Livre : c’est l’islam. Car, le judaïsme est une religion du peuple et la foi chrétienne qu’est-ce qu’elle est ? Eh bien, alors nous venons à l’essentiel de ce que nous célébrons aujourd’hui : elle est la religion de la Personne.

     Le Dieu des Chrétiens

     Le Dieu que nous adorons n’est pas un Dieu lointain, un Dieu qui se déconnecte de notre nature humaine. Il n’est pas quelqu’un dont la révélation est toute entière contenue à l’intérieur d’un livre, un livre dont nous ne pourrions plus sortir. Il n’est pas non plus uniquement celui qui a appelé Abraham car sa révélation s’est poursuivie. Notre Dieu est personnel, notre Dieu se préoccupe de chacun d’entre nous et, mieux, notre Dieu est venu parmi nous pour que nous puissions le connaître, pour que nous puissions aller à Lui et pour que le chemin de la Vie Éternelle, bloqué, fermé par le péché de nos premiers parents puisse enfin être rouvert et qu’un jour nous venions vivre avec Lui. Saint Athanase nous dit ceci : « Dieu s’est fait homme pour que l’homme puisse devenir Dieu ». Et cela, aucune des grandes ou des petites religions de l’humanité n’a été capable de le dire. Le Dieu que nous adorons est un Dieu personnel, le Dieu que nous adorons a envoyé son Fils pour nous sauver.

     À partir de là, nous découvrons les deux caractéristiques principales de la Révélation en Jésus-Christ :

     La Révélation, c’est tout d’abord l’Incarnation. Il était de coutume à l’Épiphanie, autrefois, de chanter après l’évangile (c’était le diacre qui le faisait) ce que l’on appelait le « Noveritis ». C’était une espèce de litanie qui commençait par ces mots : « Désormais, vous saurez que… » et l’on annonçait alors les fêtes mobiles de l’année, le mercredi des cendres, le vendredi saint, pâques, l’ascension, la pentecôte, pour bien montrer que ces fêtes de l’Incarnation n’allaient pas simplement être des commémorations mais qu’elles allaient inaugurer une nouvelle histoire de Dieu avec son peuple. Dieu s’est fait homme en Jésus-Christ et, par là, il a vécu notre condition humaine, dans ses moindres recoins, dans ses joies et dans ses peines et aussi dans la plus grande des douleurs et des ignominies, la mort de la croix, pour en triompher dans la résurrection.

     Et puis, il y a cette Révélation aux mages. L’évangile nous parle de mages venus d’Orient. On ne nous dit pas combien ils étaient. Des représentations médiévales ont voulu, justement, qu’on montre trois mages à la crèche : un de chacune des races qui étaient connues à l’époque, et, par là, signifier que le salut apporté par le Christ n’est pas seulement pour un peuple réduit dans le temps ou dans l’espace, qu’il n’est pas pour quelques personnes choisies, mais qu’il est un salut qui s’adresse à l’humanité toute entière.  « La gloire du Seigneur notre Dieu s’est révélée aujourd’hui pour le salut de tous les hommes » nous a dit l’une des lectures des messes de Noël. Et dès lors -le Saint-Père ne cesse de nous le répéter- le christianisme a une vocation universelle, il s’adresse à tout l’homme, à l’homme tout entier.

     Nous ne sommes pas comme les Romains ou les Grecs païens, qui adoraient des statues, sans que cela comporte un impact particulier sur leur vie personnelle. Nous ne sommes pas non plus des gens de sectes qui pensons que seul un tout petit nombre peut être sauvé parce qu’il est choisi par Dieu et que le reste sera damné. Nous voulons que le salut apporté par le Christ s’étende à l’humanité toute entière, mais, pour cela, nous ne devons pas être naïfs et penser que ceux qui ne se préoccupent pas du Fils de Dieu incarné, que ceux qui négligent l’évangile ou le rejettent, doivent avoir part automatiquement au salut. Nous le souhaitons, nous prions pour eux, nous prions surtout pour qu’un jour ils viennent, eux aussi, au Christ et que, à travers son Église, ils puissent Le reconnaître pour vivre un jour avec Lui.

     Lorsque nous avons compris tout cela, mes frères, nous pouvons seulement faire une chose : comme les mages, nous incliner devant la crèche, nous réjouir de voir l’Étoile qui se pose au dessus de la maison où se trouve l’Enfant, dont la Révélation qui nous est faite à travers l’évangile et le commentaire qu’en fait l’Église. Nous regardons cet Enfant et sa Mère et, à ce moment-là, nous nous prosternons pour l’adorer. Nous ne lui offrirons pas l’or, l’encens et la myrrhe mais nous lui offrirons nos personnes, nos personnes dans cette Église qui est son Corps sur la terre et qui veut, avec des hauts et des bas, l’incarner aujourd’hui. Et les présents que nous allons lui offrir dans peu de temps, ce seront, tout simplement le pain et le vin de l’offertoire pour qu’Il nous les rende dans le mystère de son Sacrifice et que nous puissions en vivre.

     Pour conclure

     Écoutons, si vous le voulez bien pour terminer, cette conclusion du sermon pour l’Épiphanie du pape saint Léon le Grand (Ve siècle), où celui-ci, finalement, résume tout ce que nous venons de dire : « reconnaissons donc, frères bien aimés, dans les mages adorateurs du Christ, les prémices de notre vocation et de notre foi. Célébrons, l’âme débordante de joie, les débuts de notre bienheureuse Espérance. Car, dès ce moment, nous commençons à entrer dans l’héritage éternel. Dès ce moment, les secrets des Écritures qui nous parlent du Christ se sont ouverts pour nous. La Vérité, que les Juifs dans leur aveuglement, n’ont pas acceptée, a étendu sa Lumière à toutes les nations. Honorons donc ce jour très saint où est apparu l’Auteur de notre salut. Celui que les mages ont vénéré enfant dans son berceau, nous, adorons-le tout-puissant dans le Ciel. Et tout comme ils ont offert au Seigneur, de leurs trésors, des dons à valeur symbolique, tirons, nous aussi, de nos cœurs, des présents dignes de Dieu » Ainsi soit-il.