Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Eglise du Saint-Sacrement à Liège - Page 39

  • La Lettre des pauvres de Poitiers (Vérité et Espérance-Pâque Nouvelle, n° 99, été 2016)

    PN  163.jpg

    pauvres au XVIIe s.jpg

    LA LETTRE DES PAUVRES DE POITIERS

    On oublie trop que, tout autour des saints portés sur les autels, il est ― suscitée le plus souvent par eux, mais non moins bien personnelle ― une sainteté diffuse, parmi des chrétiens de toutes conditions, parmi ces petites gens surtout, dont personne ne fait cas... sinon les saints, bien entendu !

    Le document ici proposé à l’attention du lecteur en est un éloquent témoignage, particulièrement émouvant. Il remonte au début du XVIIIe siècle, et émane d’un groupe de pauvres de l’Hôpital Général de Poitiers.

    On ignore qui a tenu la plume. Le style, assez régulier, semble s’appliquer à coudre ensemble les idées simples, sans en trahir la teneur ; partout se décèle la naïveté du ton dans lequel elles ont dû s’exprimer : on pense à quelque bonne personne qui aura gracieusement prêté son concours à la demande du groupe. 

    Monsieur Grignion

    Pauvres Poitiers 2 imagerie d'époque St Louis Grignion de Montfort XVIIe s.jpg

    En écrivant cette lettre, les pauvres de l’hôpital avaient pour but d’obtenir le retour de leur aumônier, saint Louis-Marie Grignion de Montfort (1673-1716), qui avait dû quitter Poitiers un an plus tôt.

    Un seul trait suffira à faire entrevoir la limpidité de cet homme, qui sut vivre en vrai les promesses de son baptême. A l’âge de vingt ans, Louis-Marie est admis au séminaire à Paris. Il habite Rennes : quelque 350 kilomètres séparent les deux villes. A l’heure de son départ pour la capitale, on lui a préparé un cheval « pour faire au moins la moitié du chemin » ; il décline l’offre, mais, afin de ne pas contrister ses parents, il accepte en revanche l’habit neuf qu’on lui propose, un baluchon et dix écus. A peine sorti de la ville, il trouve un pauvre de sa taille, avec qui il échange son vêtement ; baluchon et écus passent aussi en d’autres mains : ils ne l’encombreront pas davantage pour la suite du voyage. Plus d’obstacle désormais entre la Providence et lui ! 

    L’Hôpital général de Poitiers 

    Pauvres de Poitiers- statue Montfort.jpg

    Le terme hôpital désignait anciennement tout établissement charitable où l’on recevait les démunis pour assurer leur subsistance : la fonction médicale n’y était exercée que parmi bien d’autres. Furetière définit ainsi l’hôpital général « celui où l’on reçoit tous les mendiants. »

    On ne doit donc pas établir de comparaison avec nos cliniques actuelles, richement subventionnées, et payantes de surcroît. Le tout-venant entrait là les mains vides, heureux si la charité y était bien présente et agissante, pour malheur quand elle y faisait défaut. Du reste, nombre de ceux qui y entraient ne portaient pas eux-mêmes la « robe des noces », tant s’en faut...

    Un « établissement charitable » ne l’est que dans la mesure où la charité y préside vraiment. Le cœur du pauvre ne s’y trompe pas : il rayonne bientôt de cette même charité, quand elle lui sourit. Le pauvre est au contraire exposé à s’avilir dans la misère aussi sûrement ― mais avec plus d’excuses sans doute ―, que le riche dans son opulence, qui viendrait à ne plus exercer envers ce Christ souffrant l’office de bon Samaritain qui lui incombe. Un même toit peut ainsi tour à tour héberger le paradis ou l’enfer.

    Privé de Monsieur Grignion, l’Hôpital Général de Poitiers, où ce dernier avait trouvé à son arrivée une « pauvre Babylone » qu’il n’avait pas tardé à métamorphoser en paradis, reprenait le chemin de l’enfer.

    La réaction des pauvres pensionnaires mérite d’être considérée sous un angle inattendu peut-être. Leur lettre témoigne certes, et à juste titre, de la sainteté de leur aumônier ; c’est en ce sens que les biographes l’ont citée jusqu’à présent. Il nous est avis qu’une double lecture s’impose : il est encore une autre sainteté que cet écrit nous dévoile, sans y prendre garde : celle des pauvres eux-mêmes qui en ont eu l’initiative.

    La lettre des pauvres de Poitiers

    Pauvres de Poitiers.jpg

    « De l’Hôpital Général, ce 9 mars 1704.

                Monsieur,

    « Par la mort et la passion du bon Jésus, nous, quatre cents pauvres, nous vous supplions très humblement, par le plus grand amour et la gloire de Dieu, nous faire venir notre vénérable pasteur, celui qui aime tant les pauvres, Monsieur Grignion.

    « Hélas ! Monsieur, nous ressentons plus que jamais la perte que nous avons faite pour le salut de nos âmes ; car pour les biens de ce monde, ce n’est pas ce qui nous inquiète : la Providence fournit à nos besoins, et nous croyons que, par ses prières, il nous a obtenu de Dieu une nouvelle Supérieure, qui a toutes les conditions qu’on peut souhaiter, pour les choses temporelles. Elle est de grande qualité, très riche veuve, qui a pourvu ses enfants richement. Le démon n’en veut qu’à nos âmes, et pour cela, il a remué toutes sortes de machines et de tentations pour faire déchoir l’œuvre de Dieu et faire en aller celui qui faisait tant de conquêtes au bon Jésus. La moisson est très grande, il y a peu d’ouvriers : il prévoyait bien cela, et même ceux qui nous le devaient conserver ont été les premiers à se laisser séduire par la tentation. Quel détriment de la gloire de Dieu ! Nous, nous voyons tous le jours, visiblement, que l’édifice qu’il avait commencé, pour n’être pas assez affermi, se va détruisant petit à petit ; et comme dans cette maison c’est un flux et reflux de monde qui entre et qui sort, il y a toujours à convertir plusieurs âmes.

    « Mon très cher Monsieur, nos besoins pressants ne toucheront-ils pas votre cœur qui aime Dieu et sa gloire et le salut des âmes ? Quel grand bien vous nous feriez de nous envoyer notre ange ! Vous en auriez une grande gloire dans le ciel. Les pauvres sont toujours méprisés, et on n’écoute pas leurs humbles demandes. Nous le demandons bien à notre illustre et révérendissime Evêque, qui nous a dit qu’il l’avait demandé deux fois ; les grands ne veulent point être refusés, et pour cela il faut que l’intérêt de Dieu soit mis en oubli. Nous, nous croyons que votre charité et zèle des âmes nous accordera cette grande grâce, que nous vous demandons par les amabilités du bon Jésus et de la sainte Vierge Mère de Dieu.

    « Seigneur ! s’il était avec cette nouvelle Supérieure, quels règlements et quelle justice ne ferait-il pas observer dans cette maison ! Pardon, mon bon Monsieur, de la hardiesse que nous prenons ; c’est notre indigence de toute manière qui nous fait vous importuner, et les grandes peines que nous avons.

    « Il y a quelques-uns de nos bons pauvres qui disent avoir vu le démon se moquer et rire de nous d’avoir été victorieux. Mais vous savez mieux que nous que l’œuvre du Seigneur est toujours combattue par ce malheureux, qui tâche de nous perdre par ses grandes tentations.

    « Enfin, mon Dieu, consolez-nous et nous pardonnez nos péchés qui nous attirent pareille disgrâce ; si nous pouvons une fois le revoir, nous serons plus obéissants et plus fidèles à nous donner à notre bon Dieu, et le prierons, Monsieur, de vous conserver et augmenter les bénédictions et la persévérance finale.

    Les pauvres de Poitiers »

    [Le texte de la lettre a été publiée pour la première fois par PAUVERT, p. 140 (1875)].

     En parcourant la Lettre

    Pèlerins Poitiers- tricentenaire de dt Louis grinion de Montfort.jpg

    « Ce 9 mars... » ― La date de l’envoi n’est pas anodine. En cette année 1704, le 9 mars était le premier dimanche de la Passion, et les mots qui ouvrent la lettre confirment que le choix de ce jour est bien intentionnel. On peut en déduire que la liturgie était une réalité vivante au cœur de ces pauvres, et qu’elle innervait leurs démarches au quotidien. Cet épanchement de la liturgie dans la vie de tous les jours y entretient, active, la présence du Seigneur, avec ses impulsions bienfaisantes. Et l’on sait que, par l’Eucharistie principalement, on devient ce que l’on a reçu. Le calendrier liturgique règle donc naturellement les pas d’un cœur aimant sur ceux du bon Berger qui le mène.

    « Monsieur » ― La lettre est adressée à Monsieur Leschassier, le directeur spirituel de Grignion de Montfort ; nos auteurs n’ignoraient pas, en effet, que le Saint ferait dépendre de lui, en parfaite obéissance, toute sa conduite.

    « Du bon Jésus » ― Cette expression à elle seule témoigne, par sa charge tendre et affectueuse, que le Christ n’est pas une froide vue de l’esprit pour ces pauvres, mais qu’il occupe réellement dans leur cœur une place qu’on réserve à un hôte familier et aimé.

    « Celui qui aime tant les pauvres » ― Voilà donc comment on désigne saint Louis-Marie, avant même que de citer son nom : avant d’être lui-même, il est « celui qui aime tant les pauvres ». Sans doute les pauvres de Poitiers n’ont-ils pas lu saint Paul, mais son esprit est en eux, plus peut-être qu’il ne sera jamais dans beaucoup de ses savants exégètes : ils auraient en effet pu dire « celui qui distribue aux pauvres habits, baluchon, écus » ; mais non, ils disent « celui qui aime tant les pauvres ». A la manière de saint Paul : « Quand je distribuerais tous mes biens pour nourrir les pauvres, ... s’il me manque l’amour, cela ne me sert à rien » (1 Cor 13, 3). Or si la sainteté consiste en la souveraineté de l’amour, ce n’est pas seulement à le donner qu’elle est appelée, mais aussi à le recevoir.

    « Pour les biens de ce monde, ce n’est pas ce qui nous inquiète » ― Ce sont des pauvres qui parlent ! Certes, ils sont indigents et nécessiteux, mais « ce n’est pas ce qui nous inquiète : la Providence fournit à nos besoins » Ces pauvres-là vivent l’Evangile : « C’est pourquoi je vous dis : Ne vous souciez pas, pour votre vie, de ce que vous mangerez, ni, pour votre corps, de quoi vous le vêtirez. ... Regardez les oiseaux du ciel ..., observez les lis des champs » (Mt. 6, 25-34). S’il est indispensable et même préalable de veiller au partage des biens matériels, n’oublions-nous pas un peu dans nos opérations de solidarité ce que les pauvres de Poitiers nous rappellent ici, que « l’homme ne vit pas seulement de pain, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu » (Mt 4, 4 < Dt 8, 3) et que « la vie vaut plus que la nourriture, et le corps plus que les vêtements » (Mt 6, 25) ? « Il faut faire ceci sans omettre cela » (Mt 23, 23). Notre monde étouffe. Le Christ total n’y est plus partagé. « En dehors de moi, vous ne pouvez rien faire » (Jn 15, 5). Le prenons-nous au sérieux ?

    « Une nouvelle Supérieure » ― Il s’agit de Mme Bodet de la Fenêtre, née Marie de Villeneuve, bienfaitrice de l’hôpital.

    « Le démon... a remué » ― Tout comme notre pape François, et à la suite de tout ce que l’Eglise compte de saints, les pauvres sont conscients de l’action du démon qui « remue toutes sortes de machines et de tentations pour faire déchoir l’œuvre de Dieu. » On croit entendre ici de nouveau textuellement saint Paul : « Revêtez l’équipement de combat donné par Dieu, afin de pouvoir tenir contre les manæuvres du diable » (Ep 6, 11). Et de préciser que nos vrais adversaires, ce ne sont pas les hommes qui entravent nos desseins (cf. Ibid. 12).

    « Il y a toujours à convertir » ― Convertir ! Que de crimes n’a-t-on pas commis pour avoir pris conseil du diable plutôt que du Seigneur quant à la manière ! Sa « manœuvre » atteint aujourd’hui son résultat, d’oblitérer complètement les ultimes paroles de Jésus à ses disciples, sa pressante recommandation au moment de retourner vers le Père. « Tout pouvoir m’a été donné au ciel et sur la terre. Allez ! De toutes les nations faites des disciples : baptisez-les au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit, apprenez-leur à observer tout ce que je vous ai commandé. Et moi, je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde » (Mt 28, 18-20). L’Eglise a reçu du Seigneur cette mission de convertir ; quand elle y manque, elle « se va détruisant petit à petit », comme infidèle à l’Esprit. Cela doit se faire librement dans le respect des consciences, ... mais cela doit se faire. Sous la plume des pauvres, cette remarque sonne juste. Conscients du besoin qu’ils ont d’être convertis d’abord eux-mêmes pour répondre à l’amour du « bon Jésus », ils perçoivent mieux aussi ce besoin chez les autres. Sachant ce qu’est la pauvreté, c’est en connaissance de cause qu’ils mettent le doigt sur la pauvreté seule définitive : être sans Jésus. Toute la lettre est un appel au secours qui va à l’essentiel : ils font la différence, eux, entre la voie et l’impasse, entre la vérité et l’errement, entre la vie et la mort (cf. Jn 14, 6).

    « Les pauvres sont toujours méprisés » ― Ils le sont en effet. Et c’est le Christ que l’on méprise en eux, comme le dit explicitement l’Evangile : « Amen, je vous le dis : chaque fois que vous ne l’avez pas fait à l’un de ces plus petits, c’est à moi que vous ne l’avez pas fait » (Mt 25, 45).

    Voilà pourquoi les saints aiment les pauvres. Voilà pourquoi ils ne se contentent pas de les aimer, mais veulent aussi en être : car désirant en tout point être assimilés au Christ, ils chérissent pauvreté et mépris, qui furent l’ordinaire de celui qui est leur tout.

    Ce choix héroïque (s’il est vécu « pour de vrai », comme disent les enfants) ne doit pas occulter la sainteté sans relief, mais plus dense, de la pauvreté courante : la pauvreté choisie des saints, comme le fut celle de saint Louis-Marie, est fort méritoire ; mais la pauvreté de naissance et de condition, qui est celle des pauvres de l’hôpital, la pauvreté qui s’impose sans avoir été invitée, l’est plus encore, pour peu bien sûr qu’elle soit reçue de grand cœur comme le trésor qu’elle est, de la main du Seigneur. Comme la livrée que le Seigneur lui-même a portée.

    On objectera qu’il faut éradiquer la pauvreté. Qu’elle est un mal. La misère, oui ; non pas la pauvreté. La misère, et la richesse, oui. Leur couple hideux est fomenté par le diable. La pauvreté, elle, est notre identité devant Dieu. Il ne faut pas l’éradiquer, mais l’étendre. A nous-mêmes. Nous devons l’incarner dans notre train de vie, en découvrir la dignité. Le problème à résoudre dans notre monde n’est pas celui de la pauvreté, mais celui de la richesse. La pauvreté n’est pas un problème, c’est une solution. A condition de la vivre franchement soi-même, et d’y conformer petit à petit les structures de la société.

    « Mon Dieu, consolez-nous et nous pardonnez nos péchés qui nous attirent pareille disgrâce » Grande richesse enfin dans ce bout de phrase, toujours nourri de l’Ecriture. Quelle confiance filiale dans cet appel à Dieu, où nos pauvres n’hésitent pas à lui demander sa consolation avant même le pardon de leurs péchés ! Mais ils n’omettent pas non plus d’implorer ce pardon, ajoutant une considération que plusieurs regimberont à entendre, et pourtant bien présente chez saint Paul : nos péchés nous attirent la réprimande de Dieu, qui se traduit tout bonnement par des épreuves. Première au Corinthiens : « Celui qui mange et qui boit [l’Eucharistie] mange et boit son propre jugement s’il ne discerne le corps du Seigneur. C’est pour cela qu’il y a chez vous beaucoup de malades et d’infirmes, et qu’un certain nombre sont endormis dans la mort. Si nous avions du discernement envers nous-mêmes, nous ne serions pas jugés. Mais lorsque nous sommes jugés par le Seigneur, c’est une correction que nous recevons, afin de ne pas être condamnés avec le monde » (1 Cor 11, 29-32).

    Ces « disgrâces » sont donc médicinales, fruit de l’amour que le Seigneur nous porte, et il convient tout d’abord que nous le reconnaissions, pour pouvoir ensuite en tirer le profit que Dieu nous y réserve. C’est ce que font ici les Pauvres avec ce discernement recommandé par l’Apôtre, dans un grand élan de tendresse pour la main paternelle qui les a aimablement mis en disgrâce, sans que leur confiance en soit le moins du monde ébranlée. Ils réagissent en fils de famille.

    Conclusion

    Nous avons là une modeste lettre de circonstance, qui nous apprend beaucoup cependant, si nous savons la lire.

    D’abord sur une sainteté commune et cachée, répandue beaucoup plus généralement qu’on ne le pense parfois, chez les gens simples. Ce type de sainteté fleurit principalement quand les pasteurs du troupeau exercent consciencieusement dans cette même simplicité leur ministère, sans réduire au goût des modes ou de leur sentiment personnel la Bonne Nouvelle du Seigneur, dont l’Eglise a reçu de l’Esprit la juste et lumineuse interprétation, avec la grâce d’y rester fidèle dans son magistère autorisé. On admire de telles abondantes floraisons autour des saints François de Sales, Louis-Marie de Montfort, Jean-Baptiste-Marie curé d’Ars, et de bien d’autres dont, pour majorité, l’histoire ne retient jamais les noms. Si donc nous n’avons pas l’étoffe de laisser là cheval, baluchon et écus, à l’image des tout grands, plus admirables souvent qu’imitables, ne pourrons-nous au moins nous inspirer de ces humbles sur lesquels le regard du Seigneur se pose immanquablement (cf. le Magnificat) ?

    Ensuite elle nous découvre le « sens de la foi » (sensus fidei) de ces gens simples : on se rappelle ce mot de — ou attribué à — saint Thomas d’Aquin : « Une pauvre vieille en sait plus avec son Credo qu’un théologien avec son orgueil... » Ce qui ne veut pas dire, bien entendu et heureusement, qu’il ne se rencontre pas aussi des théologiens qui conservent et cultivent en eux-mêmes avec grand soin cette simplicité de disciple du Christ, qui a pour seul dessein de « penser avec l’Eglise » (sentire cum Ecclesia).

    Enfin elle en dit long sur l’ancrage au cœur et la vitalité scripturaire de la pratique religieuse de cette société d’autrefois, qu’on se plaît naïvement à taxer, fort arbitrairement, il faut bien le reconnaître, de superficielle, formaliste, et ignorante aussi de l’Ecriture Sainte. Comme toute autre, elle a certes connu ses Tartuffes et ses Jourdains : gardons-nous d’en brosser un tableau idéalisé ; mais l’échantillon ici produit, prélevé dans son tissu le plus commun, suffit à rendre bien suspectes les généralisations hâtives qui servent d’obscures visées idéologiques davantage que l’honnête vérité.

    L’historien ne peut se contenter de lire les fictions de Molière : il gagne à prêter aussi son attention aux bafouilles du petit peuple.

     

    Jean-Baptiste Thibaux.

    augversfr@yahoo.fr

  • "Amoris laetitia": une exhortation post-synodale discutée (Vérité et Espérance-Pâque Nouvelle, n° 99-été 2016)

     

    contrat Delta ingenieur stabilité340.jpg

    ROME ET LE MONDE

     

    « Amoris laetitia » : une exhortation post-synodale discutée

    Amoris laetitia pape François.jpg

    L’exhortation apostolique “Amoris laetitia” (“La joie de l’amour”) du pape François sur l’amour dans la famille, (19 mars 2016, en la Solennité de Saint-Joseph) est consécutive aux deux synodes agités sur la famille, qui ont eu lieu en 2014 et 2015. Dans l’hebdomadaire « famille chrétienne », Mgr Minnerath, archevêque de Dijon et docteur en théologie, fait part de son point de vue sur ce document. Il est interrogé par Samuel Pruvot :

     « En quoi l’enseignement de l’Église sur l’amour et la famille peut-il toucher notre monde occidental sans repères ?

    Les longs chapitres de l’exhortation sur la beauté du mariage selon le plan de Dieu sont clairement en décalage par rapport à la culture contemporaine. Et c’est tant mieux, sinon y manquerait le sel de l’Évangile, capable de redonner espérance à ceux qui doutent, qui se découragent ou qui sont désabusés. Le texte s’adresse cependant aux seuls membres de l’Église. La société, si on en croit les médias, veut savoir si l’Église se rapproche d’elle. Alors que la mission de l’Église est d’attirer les personnes au Christ qui est la perfection de l’amour.

    Certains s’interrogent sur le degré d’autorité de ce document. Quel est-il ?

     Bonne question. Quelle que soit la nature des documents pontificaux – constitution apostolique, encyclique, lettre ou exhortation apostolique –, ils revêtent l’autorité normative du Magistère. Il y a toujours unité entre l’autorité de l’Écriture qui est la source de tout l’enseignement ecclésial, la Tradition qui commente la parole de Dieu au cours des siècles et le Magistère qui interprète authentiquement l’un et l’autre en fonction des défis du temps présent. D’où la nécessaire continuité dans l’enseignement de l’Église. Car si le Magistère prenait le contre-pied de ce qui a toujours été enseigné, il perdrait du coup l’autorité qui le fonde.

    La nouveauté du document présent est qu’il ne veut pas « trancher par une nouvelle intervention magistérielle » des questions ouvertes concernant le mariage (n°3). Il ne veut pas édicter de nouvelles normes valables pour tous les cas. Il appelle donc au respect des normes existantes tout en invitant à les interpréter et à les appliquer avec discernement et miséricorde au cas par cas. Il est évident que les repères sont moins clairs qu’auparavant.

    Il y a toujours unité entre l’autorité de l’Écriture qui est la source de tout l’enseignement ecclésial, la Tradition qui commente la parole de Dieu au cours des siècles et le Magistère qui interprète authentiquement l’un et l’autre en fonction des défis du temps présent.

    L’exhortation se veut le texte d’un pasteur, mais peut-il faire l’économie des débats doctrinaux qui ont agité les synodes précédents à Rome ?

     Le pape cite constamment les propositions votées au cours des deux derniers synodes. Il s’appuie sur elles, en tenant compte des clivages qui se sont manifestés. Comme dans des documents précédents, le pape se situe sur le plan des réalités vécues par les familles contemporaines. Il ne part pas de l’exposé de la doctrine, mais cherche à élever les personnes, chacune avec son histoire propre, à la hauteur du projet que Dieu nous offre dans le mariage humain. Les points les plus attendus, comme l’admission des divorcés remariés au sacrement de la réconciliation et à l’eucharistie, sont esquivés, avec des renvois en note où on ne sait pas si c’est oui ou si c’est non. On attendait des clarifications plus précises sur ces points. Le fait de laisser tout à l’appréciation des pasteurs va créer des traitements très différents d’un pasteur à l’autre.

    Le pape répugne à donner des lois générales qui régenteraient tout depuis Rome. Pourquoi ? L’option prise par le pape dans cette exhortation est de dire que le droit ou la norme valable pour tous n’existe pas. « Dans les débats doctrinaux, moraux ou pastoraux… ont toujours subsisté différentes interprétations… et des solutions plus inculturées… » (n°3). La situation des personnes vivant dans des situations matrimoniales irrégulières ne peut pas être appréciée à partir des catégories rigides « d’une morale bureaucratique froide » (n°312). Du coup, nous passons d’une approche objectivante des situations à une approche plus subjective, où le ressenti des personnes, leur degré de dépendance par rapport à leurs conditionnements et à leur environnement, sont davantage pris en compte.

    L’Église a toujours considéré que les sacrements opérés par le Christ créent une réalité spirituelle objective en nous. L’efficacité d’un sacrement ne dépend pas des dispositions subjectives de qui le reçoit. Dire qu’une personne divorcée remariée conserve la grâce sanctifiante (n°301), parce qu’elle a des circonstances atténuantes et qu’elle ne pouvait pas faire autrement, n’était pas le discours tenu jusqu’ici. Maintenant, on veut faire prévaloir le ressenti psychologique sur la réalité objective créée par le sacrement. Il faudra sans doute beaucoup travailler ce point.

    Quels sont les outils à la disposition des évêques et des prêtres pour effectuer ce discernement pastoral auquel fait allusion le pape (ch. 8) ?

    Le chapitre 8 était le plus attendu. Il aborde les points sur lesquels un approfondissement et une clarification étaient nécessaires. Or, il n’apporte pas de réponses directes. En effet, il tourne autour de deux notions : discerner et intégrer. Personne, quelle que soit l’irrégularité de sa situation matrimoniale, n’est exclu de l’Église. Le risque est de dévaloriser ce qui n’est plus qu’un idéal difficile à atteindre : le mariage chrétien sacramentel. Pour discerner – pratique qui est au cœur de la spiritualité  ignatienne –, il faut descendre avec la personne dans les profondeurs de son vécu, de ses doutes et de ses angoisses, pour déceler comment elle évalue moralement sa propre situation.

    Mais Jésus ne nous a-t-il pas libérés de nos enfermements en nous appelant à vivre selon les Béatitudes, en radicalisant les lois de Moïse pour en découvrir l’esprit ? Jésus a appelé adultère une nouvelle union après un divorce. Le discernement, en fait, doit aider à se rapprocher du Christ.

    Comment peut-on discerner entre la réalité objective du péché et la conscience du péché ? Que faut-il entendre par imputabilité ? Est-ce que le mal diminue en fonction de la conscience du mal 

    L’imputabilité concerne le degré d’engagement personnel de la volonté et de la liberté dans un acte. Sous diverses contraintes, on peut poser un acte dont on n’est pas vraiment responsable. On peut avoir une conscience subjective réduite du mal objectif qu’on a commis. Tout ceci est admis depuis toujours. Mais face aux sacrements, on était dans une perspective objective : quelle nouvelle réalité spirituelle le sacrement a-t-il opéré en nous ?

    Il n’est pas dit clairement si le discernement doit conduire à une meilleure intégration des divorcés remariés dans la vie paroissiale ou s’il peut conduire aux sacrements. C’est certainement en ce deuxième sens que l’exhortation sera interprétée. Selon Familiaris consortio (1982), la condition était que les nouveaux époux vivent comme frère et sœur. Cette condition est considérée comme irréaliste. Mais elle avait un caractère d’objectivité. Maintenant, l’accès aux sacrements va être laissé à l’appréciation subjective des intéressés et des pasteurs.

    Plusieurs cardinaux ont fait part au pape de leur réticence à voir changer les règles de la théologie morale. Pourquoi ?

     Il faut distinguer la théologie et la doctrine. Ce qui est clairement défini en doctrine ne peut être modifié, mais seulement approfondi et développé. La théologie, c’est-à-dire la réflexion systématique sur le donné révélé, dans la continuité de la Tradition, permet d’explorer de nouveaux domaines, puisqu’elle relève les défis de chaque culture pour lui apporter l’éclairage de la foi. La doctrine est « doctrine de la foi », tandis que la théologie travaille en amont pour confronter la foi aux nouvelles données de la vie : nouvelles connaissances scientifiques, changements des comportements et aussi meilleur accueil de toutes les exigences de la parole de Dieu. Nous lisons au n° 311 que la théologie morale doit intégrer la miséricorde comme concept clé de la vie morale et se référer constamment aux « valeurs plus hautes et centrales de l’Évangile ».

    Le texte du pape conforte-t-il ces catholiques qui – malgré une séparation – ont voulu rester fidèles à leur union sacramentelle ?

    Certainement, les époux chrétiens qui vivent dans la fidélité l’amour qu’ils se sont promis devant Dieu trouveront-ils, surtout dans les chapitres 4 et 5 sur « L’amour dans le mariage » et « L’amour qui devient fécond », un réconfort et une aide pour approfondir joyeusement et généreusement la grâce sacramentelle qu’ils ont reçue. On peut y ajouter le chapitre 7 sur l’éducation des enfants. Ces développements devraient être considérés comme le cœur de l’exhortation. Les fidèles qui ont subi une séparation et qui ne se sont pas remariés trouveront dans les n° 242 et 245-246 des références pour persévérer avec l’aide la communauté chrétienne. Un test du renouveau de notre pastorale du mariage sera l’accompagnement des personnes séparées restées fidèles à leur engagement matrimonial. »

    (Ref.  Mgr Minnerath : « Tout laisser à l’appréciation des pasteurs va créer des traitements très différents », Famille chrétienne,13 avril 2016 )

  • Les racines de l'Europe (Vérité et Espérance, n° 99-été 2016)

    contrat Delta ingenieur stabilité340.jpg

    ROME ET LE MONDE

     

    Les racines de l’Europe

    racines de l' europe europe en panne.jpg

    Voici peu,  le commissaire européen Pierre Moscovici , le  pape François -et bien d’autres à la suite de leurs déclarations, ont relancé dans la presse le vieux débat sur les racines chrétiennes de l’Europe. Sur ce sujet, le pape régnant a répondu en ces termes à une question du journal « La Croix », dans une interview parue le  16 mai dernier :

    « La Croix: Dans vos discours sur l’Europe, vous évoquez les « racines » du continent, sans jamais pour autant les qualifier de chrétiennes. Vous définissez plutôt « l’identité européenne » comme « dynamique et multiculturelle ». Selon vous, l’expression de « racines chrétiennes » est inappropriée pour l’Europe?

    Pape François: Il faut parler de racines au pluriel car il y en a tant. En ce sens, quand j’entends parler des racines chrétiennes de l’Europe, j’en redoute parfois la tonalité, qui peut être triomphaliste ou vengeresse. Cela devient alors du colonialisme. Jean-Paul II en parlait avec une tonalité tranquille. L’Europe, oui, a des racines chrétiennes. Le christianisme a pour devoir de les arroser, mais dans un esprit de service comme pour le lavement des pieds. Le devoir du christianisme pour l’Europe, c’est le service. Erich Przywara, grand maître de Romano Guardini et de Hans Urs von Balthasar, nous l’enseigne: lapport du christianisme à une culture est celui du Christ avec le lavement des pieds, c’est-à-dire le service et le don de la vie. Ce ne doit pas être un apport colonialiste. »

    La référence appuyée du pape régnant à la « multiculturalité » est tributaire de l’esprit du temps. Il n’en a pas toujours été ainsi. A propos des racines de l’Europe, Paul-Henri Spaak, l’un des « pères » fondateurs des Communautés européennes, peu suspect de cléricalisme, déclarait en 1957 :      

    « Cette civilisation - et pour tous ceux qui connaissent mes tendances philosophiques ce que je vais déclarer paraîtra peut-être surprenant - cette civilisation est, que nous le voulions ou non, la civilisation chrétienne. Je l'ai dit un jour à Strasbourg : quand les temps seront révolus, lorsque nous aurons tous disparu depuis de longues et de longues années et quand on voudra raconter l'aventure humaine que nous avons vécue, on ne pourra pas, quelles que soient nos convictions religieuses ou philosophiques, dire autre chose que ceci : les gens de ce temps-là, les gens de ce siècle-là ont vécu ensemble l'aventure, l'immense aventure de la civilisation chrétienne. Et, étant donné que je ne suis pas un philosophe cherchant à résumer en peu de phrases ce qui paraît l'essentiel de cette civilisation, je crois pouvoir dire que la civilisation chrétienne a apporté au monde une conception particulière de l'homme, fondée sur le respect qu'il faut avoir pour la personnalité humaine, et que c'est de cela que découle tout le reste ». (extrait de «  Une révolution européenne ? »,  discours de Paul-Henri Spaak à la Banco di Roma sur les traités de Rome, 26 mars 1957).

    Et plus près de nous dans le temps, Benoît XVI  réaffirmait ainsi l’universalité des valeurs constitutives de l’identité propre de l’Europe que le christianisme a contribué à forger :

    « L’on ne peut pas penser édifier une authentique "maison commune" européenne en négligeant l’identité propre des peuples de notre continent. Il s’agit en effet d’une identité historique, culturelle et morale, avant même d’être géographique, économique ou politique ; une identité constituée par un ensemble de valeurs universelles, que le christianisme a contribué à forger, acquérant ainsi un rôle non seulement historique, mais fondateur à l’égard de l’Europe. Ces valeurs, qui constituent l’âme du continent, doivent demeurer dans l’Europe du troisième millénaire comme un "ferment" de civilisation. Si elles devaient disparaître, comment le "vieux" continent pourrait-il continuer de jouer le rôle de "levain" pour le monde entier ? »

    «  N’est-il pas surprenant que l’Europe d’aujourd’hui, tandis qu’elle vise à se présenter comme une communauté de valeurs, semble toujours plus souvent contester le fait qu’il existe des valeurs universelles et absolues ? Cette forme singulière d’"apostasie" d’elle-même, avant même que de Dieu, ne la pousse-t-elle pas à douter de sa propre identité ? De cette façon, on finit par répandre la conviction selon laquelle la "pondération des biens" est l’unique voie pour le discernement moral et que le bien commun est synonyme de compromis. En réalité, si le compromis peut constituer un équilibre légitime d’intérêts particuliers différents, il se transforme en mal commun chaque fois qu’il comporte des accords qui nuisent à la nature de l’homme » (Benoît XVI, Audience au Congrès promu par la Commission des épiscopats de la Communauté européenne (COMECE), 24 mars 2007).

  • Du sexe des anges à celui des diacres (Vérité et Espérance-Pâque Nouvelle, n° 99-été 2016)

    contrat Delta ingenieur stabilité340.jpg

    ROME ET LE MONDE

    Du sexe des anges à celui des diacres

    diacres - femmes diacres.jpg

    Des femmes diacres ? Tel est l’objet de la question exhumée publiquement le 12 mai dernier, lors de l’audience des religieuses de l’Union internationale des supérieures générales (UISG), durant laquelle le pape a exprimé son souhait de constituer une commission pour se pencher à nouveau sur le rôle exact des diaconesses d’autrefois.

    Sur la nature même du diaconat « permanent » dont le nom, mais peut-être pas la chose, fut tiré des oubliettes de l’histoire par le concile Vatican II, l’abbé Alphonse Borras , vicaire général du diocèse de Liège, théologien et canoniste réputé publia, voici quelque temps déjà, un ouvrage intitulé  « Le diaconat au risque de sa nouveauté » (Bruxelles, Lessius , collection « La Part Dieu », octobre 2007, 239 pages) que Michel Deneken a recensé dans la Revue des sciences religieuses. Il éclaire l’enjeu du débat. Extraits : 

    «  Considérant le bilan du rétablissement du diaconat permanent depuis quarante ans et prenant en compte les travaux que la Commission Théologique Internationale sur l’évolution et les perspectives du diaconat de 2003, Alphonse Borras pose la question de la nouveauté de ce ministère : il montre  que celui que rétablit Paul VI n’est pas le même que celui qui eut cours dans l’Église ancienne. Il convient donc de parler non d’un nouveau diaconat -car la référence est bien l’Église ancienne-  mais de diaconat nouveau, se distinguant du diaconat ancien. […]

     La sacramentalité du diaconat ne devrait plus faire l’objet de débats : « dans l’unité du sacrement de l’ordre, le diaconat trouve son enracinement dans le Christ, soit qu’on le relie à la mission des apôtres, soit qu’on le rattache au lavement des pieds » (p. 103). Puisque le diaconat est bien un sacrement, il faut donc, dans l’optique catholique, définir la nature du caractère spécifique qu’il imprime (chapitre V). Si l’ensemble du sacrement de l’Ordre procède de la configuration du ministre au Christ lui-même, le diaconat le fait « à sa manière […] »

    Cette référence au Christ conduit à se demander s’il est pertinent d’affirmer que le diacre agit « in persona Christi » (chapitre VI). Replacée dans le binôme in persona Christiin persona Ecclesiae, le diaconat est référé au second membre, le premier désignant davantage le ministère sacerdotal. Dans ce sens, le directoire de 1998 a raison d’user de l’expression « in nomine Christi » ; c’est cette formule qu’il convient de privilégier (p. 143). Dans les problèmes rencontrés aujourd’hui dans l’exercice du diaconat, celui de la fonction elle-même est souvent posé. Le diaconat revêt le ministre d’une potestas sacra, et cette ordination est « productrice de droit (p. 167) […] ».

    Si le diaconat permanent procède bien du sacrement de l’ordre, c’est-à-dire d’une configuration ministérielle spécifique au Christ, la question n’est pas mince, me semble-t-il, de savoir si la nature de ce sacrement permet d’y inclure l’ordination de femmes diacres, en tirant argument du distinguo formulé par M. Borras entre l’agir « in persona Christi » (comme re-présentant la personne même du Christ), fonction réservée au presbytérat, et l’agir au nom du Christ  « in persona Ecclesiae » (pour la fonction diaconale).

    Si, au contraire, l’instauration d’un diaconat féminin devait être exclue a priori de la sphère sacramentelle, alors mieux vaudrait renoncer à référer cette (re)création éventuelle d’une mission caritative féminine spécifique au concept de diaconat, sous peine d’induire une équivoque de plus dans une matière sensible pour les  mentalités contemporaines.

    JPS

  • : la capitale belge, miroir d’une Europe cosmopolite ? (Vérité et Espérance-Oâque Nouvelle, n° 99-été 2016)

    contrat Delta ingenieur stabilité340.jpg

    Belgique

    Pleins feux sur Bruxelles

    22 mars : la capitale belge, miroir d’une Europe cosmopolite ?

    Bruxelles hommage cosmopolite.jpg 

    Les attentats islamistes perpétrés à Bruxelles le 22 mars dernier (34 morts, plus de 200 blessés) inspirent à Gérard Leclerc cette réflexion sur le site web de France-Catholique (Extraits) :

    « […] Bruxelles prise pour cible, ce n’est pas seulement la capitale de la Belgique qui est visée, c’est aussi le siège des institutions européennes. L’Europe, donc. Mais que signifie l’Europe dans la tête des djihadistes ? Sans doute, pour reprendre un vocabulaire déjà employé, « le lieu des abominations et de la perversion ». C’étaient les mots utilisés pour qualifier Paris à propos des massacres du 13 novembre dernier. Il est vrai que le texte de revendication ajoutait : « celle qui porte la bannière de la croix en Europe ». Ce type de rhétorique a de quoi nous surprendre et même nous confondre. S’en prendre d’un même élan à la perversion et au christianisme, c’est désigner l’ennemi sans trop de raffinement. L’Europe perverse demeure celle des Croisés. Et qu’importe qu’elle ne se reconnaisse nullement dans cette appréciation ! L’essentiel est de fourbir les armes du verbe, qui soient les mieux accordées aux armes des massacreurs.

    Mais, l’Europe elle-même, comment se comprend-elle, face à l’ennemi ? Comment s’identifie-t-elle ? L’éditorialiste du Monde parlait de Bruxelles comme d’une ville cosmopolite, pour mieux la louer. Cosmopolite, cela veut tout dire, tout et son contraire. Dans le cas précis le cosmopolitisme pourrait ne pas apparaître comme une vraie réussite, lorsqu’on pense à un quartier comme Molenbeek, vivier du djihadisme terroriste, avec ses trafics de drogue faisant bon ménage avec le salafisme. Et si Bruxelles est visée comme capitale de l’Europe, quel idéal représente-t-elle ? Le cosmopolitisme encore, admettons qu’il y a quelque chose d’intéressant dans la vision d’un monde réconcilié ou globalisé…

    L’Europe ainsi évoquée n’échappe pas au malaise de l’à peu près et du n’importe quoi. Pure construction juridique, elle manque singulièrement de substance et d’âme vivante. À force de n’avoir aucun contenu discernable, elle apparaît comme un projet non politique, hors histoire, hors héritage, hors culture. Mais l’ennemi se charge de nous rappeler à la réalité. Non, nous n’avons pas quitté l’histoire et son tragique. Par ailleurs, il ne faudrait pas confondre l’universalisme et l’indistinction. Sinon, pourquoi nous défendre ?" (Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 24 mars 2016).

  • Ne fermez pas nos églises ! (Vérité et Espérance-Pâque Nouvelle, n° 99-été 2016)

    contrat Delta ingenieur stabilité340.jpg

    Belgique

    Pleins feux sur Bruxelles

    10 juin : ne fermez pas nos églises !

    Bruxelles paroisse ste catherine.jpg

    Dans « La Libre » du vendredi 10 juin, cet appel d'un collectif de paroissiens bruxellois (*) aux responsables ecclésiastiques de la capitale belge :

     « La plupart des 108 églises paroissiales de Bruxelles sont menacées de fermeture à court ou moyen terme suivant un nouveau projet pastoral. Des chrétiens de diverses paroisses veulent exprimer leurs inquiétudes aux évêques de Belgique, et leur lancent un véritable appel.

    À Bruxelles, on nous dit que nous avons trop d’églises. À l’heure où des milliers de chrétiens d’Orient meurent chaque jour pour que leurs églises survivent, c’est presque indécent… Sur le terrain, nous constatons effectivement que de plus en plus d’églises sont fermées au culte du dimanche, à l’insu et à la grande surprise de leurs paroissiens qui le découvrent parfois d’un jour à l’autre. La raison ? Un projet pastoral diocésain encore peu connu mais de grande ampleur, dont l’objectif est de fusionner les paroisses et concentrer les messes du dimanche dans des églises centrales afin d’accroître leur attractivité et leur dynamisme. Une église ou deux seraient gardées par unité pastorale, les églises périphériques étant menacées de fermeture pour la pastorale de quartier.

    La fin annoncée de la vie des quartiers

    Créer des entités paroissiales de plus en plus grandes et impersonnelles, une ou deux par commune, ne serait-ce pas la fin de la vie paroissiale, fermement ancrée dans les quartiers ? Une disparition pourtant programmée qui aura les conséquences inverses de celles espérées : éloigner les églises des gens, diminuer le nombre de fidèles, affaiblir le tissu ecclésial et pénaliser davantage les moins mobiles et les plus pauvres. Dans un contexte où la priorité de tous les responsables politiques et sociaux est de renforcer les services de proximité et la vie des quartiers, cette politique pastorale n’apparaît-elle pas en total décalage avec la volonté de témoigner d’une Église et d’un Dieu qui veulent se faire proche de l’homme et du plus pauvre, au cœur de sa vie quotidienne et ordinaire ?

    Une pratique religieuse en hausse

    Pourtant, des études récentes révèlent que la pratique religieuse des catholiques a augmenté durant ces dernières années, tout comme le nombre de séminaristes et de baptêmes d’adultes. La formidable mobilisation qui a permis de sauver la chaîne catholique KTO en Belgique n’est-elle pas un signe fort de la soif de spiritualité de notre pays dit sécularisé ? 250 prêtres actifs, 30 diacres, une centaine d’assistants pastoraux et des milliers de bénévoles. L’Église de Bruxelles est riche de ressources humaines pour faire vivre ses 108 églises. Des églises vivantes, qui accueillent non seulement environ 144 000 catholiques pratiquants (12% de la population bruxelloise d’après le sondage Orela-le Soir-Ipsos-RTL- février 2016), mais aussi les milliers de passants, heureux de pouvoir les visiter, y flâner, s’y arrêter ou prier.

    Bruxelles capitale Européenne

    Dans Bruxelles Capitale Européenne, où la communauté catholique se vit en plusieurs langues et traditions,  l’Eglise de Bruxelles est appelée à vivre au rythme de l’Eglise universelle : aussi demandons-nous avec insistance à nos évêques que nos églises restent des églises paroissiales ouvertes au quartier et à la dimension internationale de Bruxelles. Nombreuses en effet sont les communautés catholiques étrangères qui cherchent encore à partager des lieux de célébration dans tous les quartiers de la capitale. L’accueil par nos paroisses de ces communautés est l’occasion d’un partage de cultures et traditions différentes et une garantie de respect de leurs droits de citoyens. En outre, des communautés nouvelles frappent encore à nos portes pour partager leur charisme propre  et cherchent, elles aussi, à rayonner à partir des églises qui les accueilleraient.

    4 € par habitant et par an

    Perplexes, nous nous interrogeons profondément sur les causes qui pourraient être à l’origine d’un tel repli et de cet abandon. Est-ce une volonté des pouvoirs publics ? Ouvertes à tous, nos églises pèsent pourtant bien peu dans les budgets régionaux ou communaux. Le coût annuel de nos 108 clochers ? Moins de 1 pour 1000. Soit 4 euros par habitant et par an, partagés entre la Région et les communes.

    Cela provient-il de raisons propres à l’Église elle-même ? Y aurait-il un manque de relève ? Avec 55 séminaristes pour le diocèse de Malines-Bruxelles ainsi que les nombreux prêtres étrangers qui animent les communautés catholiques étrangères, on peut en douter. D’autant que les budgets alloués par l’État fédéral à la rémunération des prêtres attachés au culte paroissial sont loin d’être épuisés, puisque moins de 50% du cadre actuel prévu par la loi est occupé. Est-ce encore lié à des raisons financières propres à l’évêché ? Si c’est le cas, les catholiques de Bruxelles seraient heureux que leurs évêques leur partagent leurs soucis, comme leurs homologues le font en France…A l’image de nos différents Papes, n’ayez donc pas peur !

    Nous sommes prêts, nous laïcs, à aider nos évêques, dans la gestion de nos églises, formidables outils de transmission des valeurs évangéliques, mais aussi dans les négociations avec les pouvoirs publics concernant le respect de ses obligations en matière de financement. Nous mobiliser tous ensemble pourrait être un moteur magnifique capable de revitaliser le tissu ecclésial, ainsi qu’un formidable vecteur pour annoncer ensemble la Bonne Nouvelle du Christ « jusqu’aux périphéries ». Nous pouvons ensemble, transformer les difficultés rencontrées en un formidable moyen de renouveau. 

    Renoncer au plan des églises phares et du déclin des autres

    Aussi nous demandons à l’archevêque Mgr De Kesel et à son auxiliaire, Mgr Kockerols, de renoncer à leur plan de fusion des paroisses réduites à quelques « églises phares ». Du nord au sud du canal, les communautés catholiques belges et étrangères sont solidaires dans un échange de collaboration et d’entraide fraternelle. Toutes nos églises doivent rester paroissiales et garder leur droit à une Fabrique d’église, y compris par ailleurs, pour les communautés chrétiennes qui y seraient accueillies. Nous encourageons dès lors nos évêques à mobiliser toutes les compétences et bonnes volontés inexploitées pour que vivent toujours davantage l’Église et nos églises ».

     ____

    (*) Pour le collectif interparoissial : Perpetue Nomba (Anderlecht), Marc Moreau (Berchem-St-Agathe), François Fierens- Godelieve Faut (Bruxelles Ville), Bernadette de Visscher - Pilar et Philippe Etienne - Jean-Pierre Lentz (Etterbeek), Marie-Anne Noppe - Marie-Thérèse François (Forest), Philippe Pepermans - Alexander Stolberg (Ixelles), Paul Forget (Jette), Arber Stani - Anne Strevele- Liliane Toussaint (Laeken), Vesna Hanon - Bonaventure Mbarushimana (Molenbeek), Martine et Emile Belsack (Neder-Over-Heembeek), Anna Maria Fumo (St- Gilles), Charles et Florence Gros- Marie-Thérèse Goossens- Stéphane et Isabelle de Lovinfosse (Schaerbeek), Alexandra et Arnaud Ronssin- Ignace et Laurence Moreau (Uccle), Philippe Gosseries- Monique Goossens- Marie Sybille de la Faille (Watermael-Boitsfort), Magda et Gérard Cuchet (Woluwé-St-Lambert), André et Marie-Antoinette Franck- Jacques Franchomme- Frédéric de Limburg Stirum (Woluwé-Saint-Pierre).

  • l’archidiocèse de Malines-Bruxelles congédie la Fraternité des Saints Apôtres (Vérité et Espérance-Pâque Nouvelle, n° 99-été 2016)

    contrat Delta ingenieur stabilité340.jpg

    Belgique

    Pleins feux sur Bruxelles

    15 juin 2016 : l’archidiocèse de Malines-Bruxelles congédie

      la Fraternité des Saints Apôtres

    Bruxelles fraternité des saints apôtres.jpg

    La décision a été rendue publique par l’archevêché  le 15 juin, le délai d’exécution expire le 30 juin. Explication par Bertille Perrin sur le site web de l’hebdomadaire « Famille Chrétienne » :  

    « Confirmant les rumeurs qui circulaient depuis quelques semaines, l’archidiocèse de Malines-Bruxelles a annoncé le 15 juin qu’il ne souhaitait plus accueillir en son sein la Fraternité des Saints Apôtres. Fondée par Monseigneur Léonard sous l'inspiration du Père Michel-Marie Zanotti-Sorkine et érigée en ‘association publique de fidèles cléricale’ en 2013, elle relevait depuis lors de l’autorité de l’archevêque bruxellois. Ayant à cœur de ‘sensibiliser des jeunes gens à la beauté de la vocation et du ministère de prêtre diocésain’, elle leur proposait de vivre en petite communauté.

    L’initiative d’une telle Fraternité ‘pose problème, lorsqu’on constate que la plupart des séminaristes de la Fraternité des Saints Apôtres viennent pour l’instant de France où de nombreuses régions connaissent un manque cruel de prêtres’ explique le communiqué. Evoquant la possibilité d’une augmentation du nombre de séminaristes belges au fil du temps, l’archidiocèse affirme que ‘cette perspective n’est pas à promouvoir dans les circonstances actuelles car elle manifeste un grave manquement à la solidarité entre évêques, tant avec ceux de notre pays qu’avec nos voisins français’.

    A partir de fin juin, la Fraternité ne sera plus accueillie par l'archidiocèse. Que deviendra-t-elle ? La question reste sans réponse pour l'heure. Les prêtres et diacres ordonnés pour l’archidiocèse de Malines-Bruxelles continueront à y officier, tandis que les séminaristes pourront s’ils le souhaitent -et s’ils répondent aux conditions fixées pour la formation des prêtres dans l’archidiocèse-  poursuivre leur formation au Séminaire diocésain’.

    Concernant la paroisse Sainte Catherine de Bruxelles, confiée jusqu’à présent à cinq prêtres de la Fraternité, le communiqué reste vague : ‘c’est le souhait de l’Archevêque que l’expérience à Ste Catherine puisse se poursuivre’ indique-t-il seulement.

    Ces décisions devraient faire des remous parmi les fidèles bruxellois, qui se mobilisaient depuis plusieurs semaines contre la possible fermeture de la paroisse Sainte Catherine et la dissolution de la Fraternité des Saints Apôtres. Celle-ci comptait jusqu’à présent 27 membres, dont 6 prêtres, un diacre et 20 séminaristes. » (Famille Chrétienne, 15 juin 2016)

    Les premières réactions ne se sont pas fait attendre. Dans un communiqué que reproduit notamment le blog « Belgicatho », un groupe de laïcs chrétiens écrit entre autres ceci : « le principe de solidarité invoqué est on ne peut plus curieux. En effet, sur 80 séminaristes en formation à Namur aujourd’hui seulement 25 sont belges. Va-t-on tous les renvoyer dans leur pays ? Va-t-on renvoyer tous les prêtres africains, polonais qui viennent nous aider à porter le message du Christ en Belgique ? L’Eglise catholique n’est-t-elle plus universelle ? L’argument invoqué ne tient évidemment pas la route et nous espérons qu’il n’y a pas derrière des raisons en réalité purement idéologiques »…

    La facticité de l’argumentation utilisée par l’archidiocèse (une concurrence soi-disant  préjudiciable au recrutement de séminaristes par les autres diocèses belges et français ), l’absence de véritable dialogue (même si les membres de la Fraternité ont été entendus par une commission spéciale chargée d’instruire le dossier, après la révélation de son existence), la brièveté des délais d’exécution de la sentence (publiée le 15 juin, elle est exécutoire dans un délai de quinze jours) : autant de (mauvais) points donnant à penser  que l’affaire n’en restera pas là et laissera des traces cruelles dans la communauté catholique bruxelloise. 

    Ndlr: le 30 juin, le porte-parole de Mgr De Kesel, Tommy Scholtès, a fait savoir qu'en réalité le décret annoncé le 15 juin... n'avait pas encore été signé par l'archevêque de Malines-Bruxelles, ce qui paralyse présentement les procédures canoniques de recours contre lui. Vers une solution à l'amiable ? La suite au prochain numéro.

  • Un appel urgent de Mère Madeleine Boland, abbesse des Bénédictines de Liège

    Peut-être l’avez-vous déjà entendu, dimanche dernier, de la bouche des abbés Jean Schoonbroodt (10h00) ou Claude Germeau (11h15), si vous assistez aux messes dominicales à l’église du Saint-Sacrement (Boulevard d’Avroy, 132) ; c'est l’appel lancé par notre communauté chrétienne voisine, celle des Bénédictines de Liège (Bd d’Avroy, 54) pour une Sœur médecin congolaise : 

    Kabondo-Dianda.JPG« En 1993, notre communauté a accueilli pour la durée de ses études de médecine, Sœur Ida NKULU-MBUYU, religieuse congolaise de la Congrégation Diocésaine des Sœurs de la Mère du Sauveur, fondée en 1976 par l’Evêque de Kamina, Monseigneur MALUNGA. 

    Rentrée au pays en 1998, Sœur Ida travaille depuis lors à Kabondo-Dianda (photo), au Katanga,  dans un hôpital que leur ont laissé des Sœurs Espagnoles.  Aujourd’hui, elle est Médecin Directeur de cet Hôpital Général de Référence qui compte 100 lits. En 2006, en plus de sa charge de Médecin Directeur, Sœur Ida a été nommée Supérieure Générale de sa Congrégation.  Trente-trois religieuses réparties en six communautés mettent leur vie au service de la santé ou de l’enseignement. 

    En septembre 2015 et en février 2016, Sœur Ida a subi à Lubumbashi, deux interventions chirurgicales pour une tumeur, bénigne à l’origine, mais qui s’est rapidement dégradée…Venue à Rome au mois de mai pour la rencontre de l’Union Internationale des Supérieures Générales, elle repasse par la Belgique avant de rentrer au pays en juillet prochain.  Hélas ! Une nouvelle tumeur maligne s’est brusquement déclarée…  Grâce au médecin du C.P.A.S., elle a pu être hospitalisée d’urgence à l’hôpital de la Citadelle à Liège.  Elle a été opérée le 6 juin et doit recevoir une chimio assez lourde avec des produits introuvables au Congo. Elle n’a aucun recours possible à une mutuelle, ou à une assurance quelconque… et nous n’avons pas les moyens de prendre en charge, tous les frais liés à son hospitalisation et à son traitement. 

    Alors, je viens tout simplement vous demander de l’aide. 

    A Kabondo-Dianda, Sœur Ida se trouve bien souvent acculée à soigner gratuitement  ceux qui se présentent  Aujourd’hui, c’est elle qui est dans la nécessité. «La Citadelle» ne peut nous donner une estimation financière, même approximative mais nous avertit qu’une chimio revient au minimum,  pour commencer, à 25.000 €. (*)

    Pourriez-vous partager quelque peu avec nous les frais de traitement et d’hospitalisation de Sœur Ida et éventuellement y intéresser l’une ou l’autre personne parmi vos relations ?  J’ai ouvert à cet effet, un compte bancaire à mon nom dont voici le numéro :

    Compte n°:  BE46 7506 7481 6836 IC/SWIFT  :  AXABBE22

    de Madeleine BOLAND - Boulevard d'Avroy, 54 - 4000  Liège

     Nous sommes tous confrontés, il est vrai, à la crise économique qui frappe notre pays et bien d’autres dans le monde mais tant d’hommes et de femmes aspirent à plus de solidarité que je crois possible, l’impossible…

    Je vous remercie de tout cœur pour votre générosité et vous promets notre prière, celle de Sœur Ida et de sa Congrégation et celle de toutes mes Sœurs.

    Sœur Madeleine »

    ______

    (*) Selon l'article paru dans la Gazette de Liège du 29 mai: ""Le coût d'une première chimio est au minimum de 7.500 € "et on n'envisage qu'un traitement d'une année", qui en comporte évidemment plusieurs.

     JPS    

  • 29 juin 2016 : Jubilé sacerdotal pour Benoît XVI

    Réflexion faite :

    Sacerdoce et tentation protestante 

    ratzinger.jpgOn célèbre aujourd’hui à Rome, en présence du jubilaire et de son successeur le pape François, le soixante-cinquième anniversaire de l’ordination sacerdotale (29 juin 1951) de Joseph Ratzinger, futur pape Benoît XVI.

    À cette occasion, le pape émérite se voit offrir un volume dans lequel sont réunies 43 de ses homélies, avec une préface du pape François lui-même. Cet ouvrage est publié de manière simultanée en six langues : en Italie par Cantagalli, aux États-Unis par Ignatius Press, en Allemagne par Herder, en France par Parole et Silence, en Espagne par Biblioteca de Autores Cristianos, et en Pologne par l'Université Catholique de Lublin.

    L’extrait qui suit est tiré de l'introduction du livre, écrite par le cardinal Gerhard L. Müller, préfet de la congrégation pour la doctrine de la foi, qui supervise l’édition des œuvres complètes de Joseph Ratzinger : il raconte l’indomptable résistance opposée par celui-ci à l'offensive doctrinale des disciples de Luther.

    Ce rappel vient à point nommé alors que le monde de la Réforme s’apprête à fêter en grandes pompes un autre anniversaire : le cinquième centenaire de l’affichage (1517) des 95 thèses qui donnèrent naissance au Luthéranisme et à toutes les hérésies protestantes qui découlent de ce geste historique. La dénaturation du sacerdoce ministériel en est une. Pourquoi le taire ? L’œcuménisme, qui est l’une des formes de la charité, n’exclut pas, en effet, la proclamation de la vérité : caritas in veritate.

    Sacerdoce catholique et tentation protestante

    Gérard Muller.jpg

    par Gerhard L. Müller

     

    « Le concile Vatican II a cherché à ouvrir une nouvelle voie vers la véritable compréhension de ce qu’est le sacerdoce. Alors comment se fait-il que, au lendemain du concile, l’Église se soit trouvée confrontée à une crise à propos de cette identité du sacerdoce qui, du point de vue historique, ne peut être comparée qu’aux conséquences de la Réforme protestante du XVIe siècle ?

    Je pense à la crise concernant la doctrine du sacerdoce qui a eu lieu pendant la Réforme protestante, une crise au niveau dogmatique, dont le résultat a été que le prêtre été réduit à n’être qu’un simple représentant de la communauté, par élimination de la différence essentielle entre le sacerdoce ordonné et celui qui est commun à tous les fidèles. Et puis je pense à la crise existentielle et spirituelle qui a eu lieu au cours de la seconde moitié du XXe siècle et qui a éclaté, au point de vue chronologique, après le concile Vatican II – mais certainement pas à cause de ce concile – et dont nous subissons encore aujourd’hui les conséquences.

    Joseph Ratzinger montre avec beaucoup de finesse que lorsque le fondement dogmatique du sacerdoce catholique disparaît, non seulement la source à laquelle on peut efficacement abreuver une vie à la suite du Christ se tarit, mais que l’on voit également disparaître la motivation qui permet d’accéder à une compréhension raisonnable non seulement de la renonciation au mariage en vue du royaume des cieux (cf. Mt 19, 12), mais aussi du célibat en tant que signe eschatologique du monde de Dieu qui adviendra, un signe à vivre avec la force du Saint-Esprit, dans la joie et la certitude. 

    Si la relation symbolique qui appartient à la nature du sacrement est occultée, le célibat sacerdotal devient le résidu d’un passé hostile à l’essence physique de l’homme et il est critiqué et combattu comme étant la cause unique de la pénurie de prêtres. Sans oublier que disparaît également ce fait évident, pour le magistère et pour la pratique de l’Église, que le sacrement de l’Ordre doit être administré uniquement à des hommes. Un ministère conçu en termes fonctionnels, au sein de l’Église, risque d’être soupçonné de légitimer une domination, alors que, au contraire, il devrait être fondé et limité dans un sens démocratique.

    La crise du sacerdoce dans le monde occidental, au cours des dernières décennies, est également le résultat d’une confusion radicale de l’identité chrétienne face à une philosophie qui transfère à l’intérieur du monde le sens le plus profond et le terme ultime de l’Histoire et de toute existence humaine, les privant ainsi de l’horizon transcendant et de la perspective eschatologique. 

    Tout attendre de Dieu et fonder toute notre vie sur Dieu, qui en Jésus-Christ nous a tout donné : voilà la logique - la seule possible - d’un choix de vie qui, dans le don total de soi-même, se met en chemin sur les traces de Jésus-Christ, en participant à sa mission de Sauveur du monde, mission qu’il accomplit dans la souffrance et sur la croix, et qu’il a révélée de manière incontestable à travers sa Résurrection des morts.

    Toutefois il faut également noter la présence, à la racine de cette crise du sacerdoce, des facteurs intra-ecclésiaux. Comme il le montre dans ses premières interventions, Joseph Ratzinger possède dès le début une vive sensibilité lui permettant de percevoir tout de suite ces secousses annonciatrices du tremblement de terre : et cela surtout dans l’ouverture, de la part de très nombreux milieux catholiques, à l’exégèse protestante qui était en vogue dans les années Cinquante et Soixante du siècle dernier. 

    Bien souvent, du côté catholique, on n’a pas pris conscience des conceptions pleines de préjugés qui étaient sous-jacentes à l’exégèse issue de la Réforme. Et c’est ainsi que s’est abattue sur l’Église catholique (et sur l’Église orthodoxe) la fureur de la critique qui s’en prenait au sacerdoce ministériel en présumant que celui-ci était dépourvu de fondement biblique.

    Le sacerdoce sacramentel, complètement orienté vers le sacrifice eucharistique – comme cela avait été affirmé au concile de Trente –ne paraissait pas, à première vue, reposer sur des fondements bibliques, que ce soit au point de vue de la terminologie ou en ce qui concerne les prérogatives particulières du prêtre par rapport aux laïcs, spécialement pour ce qui touche au pouvoir de consacrer. La critique radicale dont le culte faisait l’objet – et avec elle le dépassement, vers lequel on tendait, d’un sacerdoce limitant la prétendue fonction de médiation  – a semblé faire perdre du terrain à une médiation sacerdotale au sein de l’Église.

    La Réforme a attaqué le sacerdoce sacramentel parce que, prétendait-elle, celui-ci rendait discutable l’unicité du sacerdoce suprême de Jésus-Christ (sur la base de la Lettre aux Hébreux) et qu’il marginalisait le sacerdoce universel de tous les fidèles (d’après 1 P 2, 5). À cette critique est venue s’ajouter, en dernier lieu, l’idée moderne d’autonomie du sujet, avec la pratique individualiste qui en découle, celle-ci portant un regard soupçonneux sur n’importe quelle manifestation d’autorité.

    Quelle conception théologique en est née ?

    D’une part on faisait remarquer que Jésus, d’un point de vue sociologico-religieux, n’était pas un prêtre ayant des fonctions cultuelles  et que, par conséquent – pour utiliser une formulation anachronique – c’était un laïc.

    D’autre part, étant donné que, dans le Nouveau Testament, en ce qui concerne les services et les ministères, ce n’est pas du tout une terminologie sacrée qui est employée, mais bien des dénominations considérées comme profanes, il a semblé que l’on pouvait considérer comme inadéquate la transformation – dans l’Église des origines, à partir du IIIe siècle – de ceux qui exerçaient de simples “fonctions” au sein des communautés, en détenteurs abusifs d’un nouveau sacerdoce cultuel.

    À son tour, Joseph Ratzinger soumet la critique historique empreinte de théologie protestante à un examen critique détaillé et il le fait en distinguant les préjugés philosophiques et théologiques de l’utilisation de la méthode historique. En agissant ainsi, il parvient à montrer que, grâce aux acquis de l’exégèse biblique moderne et à une analyse précise du développement historico-dogmatique, on peut parvenir de manière assez fondée aux affirmations dogmatiques émises surtout aux conciles de Florence, de Trente et Vatican II.

    Ce que Jésus signifie pour la relation entre Dieu et tous les hommes et toute la création– et donc la reconnaissance du Christ comme Rédempteur et Médiateur universel de salut, qui est développée dans la Lettre aux Hébreux à travers la catégorie de “Grand Prêtre” (Archiereus) – n’a jamais dépendu, comme condition, de son appartenance au sacerdoce lévitique.

    Le fondement de l’être et de la mission de Jésus réside plutôt dans le fait qu’il provient du Père, de cette maison et de ce temple où il demeure et où il doit rester (cf. Lc 2, 49). C’est la divinité du Verbe qui fait de Jésus, dans la nature humaine qu’il a prise, le seul et le vrai Maître, Pasteur, Prêtre, Médiateur et Rédempteur.

    C’est au moyen de l’appel qu’il lance aux Douze qu’il les fait participer à sa consécration et à sa mission. Ils sont le point de départ de ce groupe d’apôtres qui inscrivent la mission de l’Église dans l’Histoire en tant que dimension essentielle de la nature ecclésiale. Ceux-ci transmettent leur pouvoir aux chefs et aux pasteurs de l’Église universelle et particulière, et ceux-ci agissent aux niveaux local et supra-local. »

    __________

    Extrait du blog « Chiesa » : Joseph Ratzinger 65 ans après

    Traduction française par Antoine de Guitaut, Paris, France.

    Dimanche prochain, 3 juillet 2016, nous célébrerons comme à l’accoutumée la Solennité de la fête des Saints Pierre et Paul à la messe grégorienne de 10h en église du Saint-Sacrement, Bd d’Avroy, 132, Liège. Nous aurons aussi une pensée pour le pape Benoît XVI,  qui fut le digne 265e successeur de ce Pierre sur lequel l’Eglise est fondée.

    L'hommage rendu le 28 juin dans la Salle Clémentine, au Palais apostolique: 

  • A l’église de l'abbaye des Bénédictines de Liège (Bd d’Avroy, 54), le dimanche 3 juillet 2016 à 16 h 00 : un concert à ne pas manquer !

    Concert à ne pas manquer.jpg