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Réflexion faite - Page 30

  • "sacerdos, alter Christus"

     

     

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    POUR EN FINIR AVEC L’ORDINATION

     DES HOMMES MARIÉS ET DES FEMMES

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    La question du célibat sacerdotal, c’est comme le boléro de Ravel : on croit que c’est fini et cela recommence encore obstinément. Sans remonter au conciles d’Elvire (IVe siècle) ou du Latran (le premier, au XIIe siècle), voici peu  le thème a refait surface, une fois de plus, à la faveur de la révélation de l’épidémie pédophile des années postconciliaires. Dans les pays catholiques les plus éprouvés par le « sécularisme » doctrinal et moral -comme l’Autriche ou la Belgique- des évêques ont épanché publiquement leurs doutes et leur trouble. Lorsqu’à la mi-mai 2010, un  évêque autrichien, Paul Iby, d’Eisenstadt, déclare que « les prêtres devraient être libres de décider s’ils veulent se marier ou non » et que « le Saint-Siège est trop timide à ce sujet », le cardinal-archevêque de Vienne, Christophe Schönborn, commente : « les préoccupations qui ont été exprimées par l’évêque Iby, nous les ressentons tous ».Un peu plus tard, dans un contexte similaire, trois évêques flamands, dont deux récemment nommés par Benoît XVI lui-même, NN.SS. De Kesel (Bruges), Bonny (Anvers) et Hoogmartens (Hasselt) ont, à leur tour, saisi au bond la balle des scandales pédophiles, pour pousser l’amalgame encore un peu plus loin. Dans une interview à la radio flamande VRT, Mgr De Kesel a déclaré (18 septembre 2010): « Je pense que l'Eglise doit se poser la question de savoir s'il convient de conserver le caractère obligatoire du célibat » et, poursuivant sur sa lancée: « on pourrait dire qu'il y a des prêtres célibataires mais que des personnes pour lesquelles le célibat est humainement impossible à respecter devraient aussi avoir la chance de devenir prêtre » pour conclure: « la discussion sur le célibat [des prêtres] pourrait avoir une suite bien plus rapide que celle sur l'accès des femmes à la prêtrise" ».  

    Et à nouveau tout récemment,  après que cent cinquante théologiens germanophones eussent lancé (7 février 2011) un bruyant manifeste « pour mettre fin à la crise sans précédent  que traverse l'Eglise catholique depuis les scandales des prêtres pédophiles »,  le site de l’agence de presse « Cathobel » publia un éditorial  « Célibat des hommes et ordination des femmes » du P. Charles Delhez s.j., paru dans le Dimanche Express n°8 du 27 février 2011. Dans cet article, le directeur du journal des paroisses francophones de Belgique reprend, « more jesuitico », l’antienne qu’il avait déjà publiée dans la « Libre Belgique ». Voici un extrait de sa prose :

    « (…) Dans l’Église latine, on n’ordonne prêtres que ceux qui font la promesse de rester célibataires. Ne pourrait-on cependant pas imaginer, dans l’Église latine, la même diversité qu’à l’intérieur de l’Église catholique dans son ensemble ? C’est que les Églises locales évoluent bien différemment aujourd’hui. Des réponses adaptées à la situation de chaque pays ou de chaque région du monde serait sans doute  heureuses.                                                                                  

    « Tout autre est la question posée par l’ordination des femmes. Elle est théologique. L’Église est-elle tenue par le fait que Jésus n’a choisi comme apôtres – les Douze – que des hommes, alors qu’il était entouré également de femmes ? Elles ont d’ailleurs joué un rôle très important, comme premiers témoins de sa résurrection, par exemple. S’agirait-il d’une donnée culturelle ou d’une volonté divine ? (…) ».

    Dans un commentaire « posté » sous le texte de son confrère, le Père Thierry Dejond s.j. apporte au lecteur un excellent antidote à la culture du doute pratiquée par le Père Delhez. Une mise au point concise, claire et précise : « (…) Il est évident que l’ordination des Douze Apôtres, et non de Marie, Mère de Dieu, ni de Marie-Madeleine, Suzanne et autres Femmes ayant suivi Jésus, n’est pas une « donnée culturelle », mais bien une « volonté divine », au sujet de laquelle toutes les Eglises ont maintenu un accord unanime, jusqu’à la fin du XXème siècle.  C’est donc une idée de la « post-modernité », lancée par le Mouvement féministe, dont la philosophie est la « gender philosophy », dont la thèse, validée par l’ONU, est qu’on choisit librement d’être homme ou femme, car il ne s’agirait pas d’un donné « naturel », mais purement « culturel ».

    Si les Eglises orientales ‘revenues au catholicisme’ ont accepté d’ordonner des hommes mariés (vu leur passé orthodoxe datant de 690) [ndlr : concile « in trullo »], c’est par miséricorde de l’Eglise catholique, qui ne voulait pas briser une tradition de cinq siècles.

    Le « célibat des prêtres » dans l’Eglise latine n’est autre qu’une manière d’être fidèle à la « Tradition remontant aux Apôtres », et acceptée tant chez les Grecs que chez les Latins jusqu’en 690, et exigeant des Evêques, Prêtres et Diacres mariés, de renoncer, le jour de leur Ordination, à l’usage du mariage. Cette tradition apostolique s’est maintenue en Occident, tandis que l’Orient grec cédait aux décisions de l’Empereur de Byzance.

    Pourtant, même en Orient, subsistent des traces évidentes de l’ancienne discipline commune: les Evêques n’ont pas le droit de vivre en mariage, jamais; les prêtres et les diacres, après le décès de leur épouse, n’ont pas le droit de se  remarier,  puisque ils ont été ordonnés. Ce qui prouve bien qu’il s’agissait d’une  tolérance, Idem, pour les  diacres mariés  en Occident, depuis le Concile Vatican II: ils ne peuvent pas se  remarier.

    Cette discipline remonte aux Apôtres, dont un seul, Simon-Pierre, était certainement marié avant l’appel du Christ, mais qui répond à Jésus: « Nous qui avons tout quitté pour te suivre… », Jésus répond: « Amen, je vous le dis: personne n’aura quitté maison, femme, frères, parents ou enfants, à cause du Royaume de Dieu, qu’il ne reçoive beaucoup plus en ce temps-ci et, dans le monde à venir, la vie éternelle. » (Luc 18, 28-30). Bien d’autres textes de L’Ecriture Sainte, et de la Tradition des Pères de l’Eglise, confirment cette exigence de Jésus. Exigence rappelée au 1er Concile Oecuménique de Nicée en 325, canon 3; et déjà avant, dans des Conciles régionaux: Elvire (Espagne) en 304 et Ancyre (=Ankara, Turquie) en 314. Il est clair que ces canons disciplinaires de l’Eglise ne faisaient que « rappeler » la Tradition remontant aux  Apôtres etattestée par de nombreux  Pères de l’Eglise  auparavant ».

    Le Père Dejond est professeur de théologie dogmatique et directeur spirituel du Séminaire de Namur depuis 1994.

     

     

  • Avons nous tous le même Dieu ?

     

    QUAND DIEU SE MANIFESTE

    epiphanie 2011 à l'église du saint sacrement à liège 

     

    epiphanie 2011 à l'église du saint sacrement à liège

    epiphanie 2011 à l'église du saint sacrement à liège

     Le 8 janvier dernier, plus de deux cents fidèles se sont réunis à l’église du Saint-Sacrement à Liège pour la Solennité de l’Épiphanie célébrée selon le missel de 1962 par M. l’abbé Jean-Pierre Herman, chapelain aux sanctuaires de Beauraing. Celui ci était assisté par M. l’abbé Claude Germeau (officiant comme diacre) et le Frère Jérémie-Marie de l’Eucharistie (comme sous-diacre).

    Tant la procession à la crèche que la messe ont bénéficié du concours remarquable de la Capella Verviensis (dir. et orgue : Jean-Michel Allepaerts) qui a interprété la messe à quatre voix mixtes « O Magnum Mysterium » de Tomas-Luis da Vittoria (1518-1611) et six chorals ou motets anciens pour le temps de Noël. Le propre grégorien de la messe était assuré par la Schola du Saint-Sacrement.

     Dans sa prédication, l’abbé Herman a rappelé les origines de cette fête et plaidé vigoureusement pour une nouvelle prise de conscience de sa signification. Voici la transcription de cette homélie :

      Mes bien chers frères, mes bien chères sœurs,

    Le dessein de Dieu n’a pas été seulement de descendre sur terre mais d’y être connu. Non seulement de naître mais de se faire connaître. De fait, c’est en vue de cette connaissance que nous avons cette célébration de l’Épiphanie, ce grand jour de la « manifestation ». Ainsi s’exprime saint Bernard dans l’incipit de son premier sermon sur l’Épiphanie. « Manifestation » : telle est la signification de l’Épiphanie, ce mot à la racine grecque : πιφάνεια (Epiphaneia). Le Seigneur se manifeste à tous les peuples.

    epiphanie 2011 à l'église du saint sacrement à liège

     Les origines de la fête

     Si nous considérons ce mot de « manifestation », nous devons reconnaître qu’il est bien plus général voire même bien plus vague que la seule visite des mages à la crèche. Recourant à l’histoire de la liturgie, nous verrons que ce terme d’ « Épiphanie », lequel cède parfois aussi le pas à celui de « Théophanie », c'est-à-dire manifestation de Dieu, a recouvert diverses réalités.

     Les trois premiers siècles de l’Église, plus particulièrement le deuxième et le troisième -car le premier n’a vu que la célébration pascale- avaient une seule et même fête pour célébrer la « manifestation du Seigneur » et, à l’intérieur de cette manifestation se célébraient à la fois l’Incarnation (la naissance du Seigneur), sa visite par les mages, le baptême par Jean dans le Jourdain et le premier miracle à Cana en Galilée.

     Avec les hérésies qui niaient la maternité divine de la Vierge Marie et le concile d’Éphèse (325) qui a voulu définir celle-ci, ou du moins condamner ceux qui la niaient, on a accordé une plus grande importance à l’Incarnation du Christ Fils de Dieu et, petit à petit, ce jour du 25 décembre, qui jusque là était simplement celui de la commémoration du martyre de sainte Anastasie, a commencé à devenir un jour important dans l’année liturgique : le jour de la célébration de la Nativité. Et c’est douze jours plus tard qu’on célèbre alors la fête des « saintes théophanies » qui contenaient toujours en elles la visite des mages, le baptême par Jean dans l’eau du Jourdain et la première manifestation du Seigneur comme Messie, à Cana en Galilée.

     L’Occident est généralement pédagogue dans son enseignement et dans sa liturgie. L’Orient est davantage mystique. C’est pourquoi, même si la fête de la Nativité s’est aussi imposée en Orient, on y a gardé, douze jours plus tard, cette fête des saintes théophanies, de ces « manifestations du Seigneur », en un seul jour. L’Occident, par contre, a voulu  morceler, une fois encore par souci pédagogique, en trois célébrations distinctes la visite par les mages, le baptême dans le Jourdain et les Noces de Cana. Mais deux traces de l’unité primitive de la célébration sont restées jusqu’en 1962 : la première est tout simplement que les offices du baptême du Seigneur et de l’Épiphanie sont, à quelques différences près, exactement les mêmes et la seconde trace c’est que les antiennes de laudes et de vêpres de ces offices font mention des trois théophanies. « Aujourd’hui, nous dit l’antienne du Benedictus à Laudes, l’Église est rejointe par son Époux céleste. Dans le Jourdain le Christ a lavé les péchés, les Mages se hâtent vers le royal Époux avec leurs présents et les convives se réjouissent grâce à l’eau qui est changée en vin. Ce jour saint est illuminé par trois mystères. Aujourd’hui, l’Étoile a conduit les mages à la crèche, à la mangeoire. Aujourd’hui l’eau des noces a été changée en vin. Aujourd’hui, le Christ est baptisé par Jean dans le Jourdain pour nous sauver. Alleluia. ».

      Sa signification

     Bien sûr, dans notre Occident, nous avons cette fête de la visite des mages, ces hommes qui, tout joyeux de voir l’Étoile qui se pose -comme nous dit l’Évangile- au dessus de la maison où se trouve l’Enfant, le regardent, l’admirent, l’adorent et lui remettent les présents d’or, de myrrhe et d’encens. Mais, au-delà d’une évocation historique, au-delà d’une explication fut-elle théologique de cette fête de la Manifestation, que peut signifier pour le monde en général, le monde dans toute son histoire et en particulier pour le monde d’aujourd’hui, cette manifestation du Seigneur ? Autrement dit, par rapport à la commémoration de la Nativité du Seigneur, de sa venue dans la chair, que peut bien signifier son Épiphanie, sa Manifestation à tous les peuples ? Il est important de le comprendre. Très souvent nous préparons Noël avec beaucoup de frénésie et, une fois la fête passée, alors nous n’avons plus envie de célébrer encore ces fêtes qui suivent la Nativité et elles passent un petit peu inaperçues comme des suppléments au calendrier, que l’Église célèbre mais sans grand concours de fidèles. Et pourtant, Incarnation et Manifestation nous montrent ensemble la véritable nature du Dieu qu’adorent les chrétiens.

     Pour une nouvelle prise de conscience

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    C’est peut-être une nouvelle prise de conscience que nous avons à faire aujourd’hui : celle de la spécificité du Dieu des chrétiens par rapport à toutes les idoles que nous présente la société. Car n’y a-t-il pas, très souvent aujourd’hui, une tendance à dire que toutes les religions se valent, que chacune adore son dieu mais que de toute manière c’est toujours le même Dieu qui est adoré ?  Je ne dis pas qu’il ne faut pas respecter les autres ou ne pas leur permettre de croire à leur manière, mais nous devons toujours tenir à la spécificité de notre propre Foi et souhaiter que les autres, un jour, viennent à la vraie Foi, qui est dans le Christ.

     Le professeur Rémi Brague, voici deux ans, a publié un essai intéressant, dont voici le titre : « Du Dieu des chrétiens et d’un ou deux autres ». Dans le premier chapitre de ce livre, il développe trois idées reçues couramment dans la société d’aujourd’hui, pour les décortiquer et les infirmer.

     On nous parle en effet aujourd’hui de l’islam, du judaïsme et de la foi chrétienne comme des trois religions d’Abraham, des trois religions du Livre et des trois monothéismes.

     Rémi Brague, dans une excellente réflexion, nous montre que l’association de ce qu’on appelle les trois monothéismes n’est finalement qu’une vue superficielle, que le Dieu des chrétiens, le Dieu des juifs et le Dieu des musulmans sont extrêmement différents l’un de l’autre, que la perception de Dieu est extrêmement différente, que le concept même placé derrière le mot « Dieu » dans les trois religions diffère grandement.

     Il en va de même lorsqu’on parle des trois religions d’Abraham. Si Abraham est le fondateur de la race pour le judaïsme, il est aussi celui qui est à l’origine de la race pour les musulmans, mais dans une moindre fonction puisqu’à leur sens la révélation y vient bien plus tard, tandis que dans la foi chrétienne avec l’incarnation du Fils de Dieu nous inaugurons la plénitude de la révélation, une ère nouvelle : Israël  ne peut plus être limité dans le temps et dans l’espace mais il sera l’humanité toute entière sauvée par le Christ.

     Et puis, il y a cette qualification de religions du Livre. En réalité, le rapport au Livre dans les trois religions est lui aussi extrêmement différent. Le judaïsme, religion du peuple avant la destruction du Temple et sa dispersion, est devenu la religion d’un écrit  permettant à tous les juifs du monde de se retrouver sur un point commun alors que pour les chrétiens, le Livre -la bible et l’évangile, l’ancienne et la nouvelle alliance- est simplement un moyen de connaître la Révélation, un moyen d’y accéder mais une fois que nous l’avons découvert, nous devons aller plus loin, tandis que pour l’islam le Livre est tout, le Livre est presque en adéquation avec Dieu qui lui parle à travers le Livre et c’est pourquoi, dit Rémi Brague, il n’y a qu’une seule religion du Livre : c’est l’islam. Car, le judaïsme est une religion du peuple et la foi chrétienne qu’est-ce qu’elle est ? Eh bien, alors nous venons à l’essentiel de ce que nous célébrons aujourd’hui : elle est la religion de la Personne.

     Le Dieu des Chrétiens

     Le Dieu que nous adorons n’est pas un Dieu lointain, un Dieu qui se déconnecte de notre nature humaine. Il n’est pas quelqu’un dont la révélation est toute entière contenue à l’intérieur d’un livre, un livre dont nous ne pourrions plus sortir. Il n’est pas non plus uniquement celui qui a appelé Abraham car sa révélation s’est poursuivie. Notre Dieu est personnel, notre Dieu se préoccupe de chacun d’entre nous et, mieux, notre Dieu est venu parmi nous pour que nous puissions le connaître, pour que nous puissions aller à Lui et pour que le chemin de la Vie Éternelle, bloqué, fermé par le péché de nos premiers parents puisse enfin être rouvert et qu’un jour nous venions vivre avec Lui. Saint Athanase nous dit ceci : « Dieu s’est fait homme pour que l’homme puisse devenir Dieu ». Et cela, aucune des grandes ou des petites religions de l’humanité n’a été capable de le dire. Le Dieu que nous adorons est un Dieu personnel, le Dieu que nous adorons a envoyé son Fils pour nous sauver.

     À partir de là, nous découvrons les deux caractéristiques principales de la Révélation en Jésus-Christ :

     La Révélation, c’est tout d’abord l’Incarnation. Il était de coutume à l’Épiphanie, autrefois, de chanter après l’évangile (c’était le diacre qui le faisait) ce que l’on appelait le « Noveritis ». C’était une espèce de litanie qui commençait par ces mots : « Désormais, vous saurez que… » et l’on annonçait alors les fêtes mobiles de l’année, le mercredi des cendres, le vendredi saint, pâques, l’ascension, la pentecôte, pour bien montrer que ces fêtes de l’Incarnation n’allaient pas simplement être des commémorations mais qu’elles allaient inaugurer une nouvelle histoire de Dieu avec son peuple. Dieu s’est fait homme en Jésus-Christ et, par là, il a vécu notre condition humaine, dans ses moindres recoins, dans ses joies et dans ses peines et aussi dans la plus grande des douleurs et des ignominies, la mort de la croix, pour en triompher dans la résurrection.

     Et puis, il y a cette Révélation aux mages. L’évangile nous parle de mages venus d’Orient. On ne nous dit pas combien ils étaient. Des représentations médiévales ont voulu, justement, qu’on montre trois mages à la crèche : un de chacune des races qui étaient connues à l’époque, et, par là, signifier que le salut apporté par le Christ n’est pas seulement pour un peuple réduit dans le temps ou dans l’espace, qu’il n’est pas pour quelques personnes choisies, mais qu’il est un salut qui s’adresse à l’humanité toute entière.  « La gloire du Seigneur notre Dieu s’est révélée aujourd’hui pour le salut de tous les hommes » nous a dit l’une des lectures des messes de Noël. Et dès lors -le Saint-Père ne cesse de nous le répéter- le christianisme a une vocation universelle, il s’adresse à tout l’homme, à l’homme tout entier.

     Nous ne sommes pas comme les Romains ou les Grecs païens, qui adoraient des statues, sans que cela comporte un impact particulier sur leur vie personnelle. Nous ne sommes pas non plus des gens de sectes qui pensons que seul un tout petit nombre peut être sauvé parce qu’il est choisi par Dieu et que le reste sera damné. Nous voulons que le salut apporté par le Christ s’étende à l’humanité toute entière, mais, pour cela, nous ne devons pas être naïfs et penser que ceux qui ne se préoccupent pas du Fils de Dieu incarné, que ceux qui négligent l’évangile ou le rejettent, doivent avoir part automatiquement au salut. Nous le souhaitons, nous prions pour eux, nous prions surtout pour qu’un jour ils viennent, eux aussi, au Christ et que, à travers son Église, ils puissent Le reconnaître pour vivre un jour avec Lui.

     Lorsque nous avons compris tout cela, mes frères, nous pouvons seulement faire une chose : comme les mages, nous incliner devant la crèche, nous réjouir de voir l’Étoile qui se pose au dessus de la maison où se trouve l’Enfant, dont la Révélation qui nous est faite à travers l’évangile et le commentaire qu’en fait l’Église. Nous regardons cet Enfant et sa Mère et, à ce moment-là, nous nous prosternons pour l’adorer. Nous ne lui offrirons pas l’or, l’encens et la myrrhe mais nous lui offrirons nos personnes, nos personnes dans cette Église qui est son Corps sur la terre et qui veut, avec des hauts et des bas, l’incarner aujourd’hui. Et les présents que nous allons lui offrir dans peu de temps, ce seront, tout simplement le pain et le vin de l’offertoire pour qu’Il nous les rende dans le mystère de son Sacrifice et que nous puissions en vivre.

     Pour conclure

     Écoutons, si vous le voulez bien pour terminer, cette conclusion du sermon pour l’Épiphanie du pape saint Léon le Grand (Ve siècle), où celui-ci, finalement, résume tout ce que nous venons de dire : « reconnaissons donc, frères bien aimés, dans les mages adorateurs du Christ, les prémices de notre vocation et de notre foi. Célébrons, l’âme débordante de joie, les débuts de notre bienheureuse Espérance. Car, dès ce moment, nous commençons à entrer dans l’héritage éternel. Dès ce moment, les secrets des Écritures qui nous parlent du Christ se sont ouverts pour nous. La Vérité, que les Juifs dans leur aveuglement, n’ont pas acceptée, a étendu sa Lumière à toutes les nations. Honorons donc ce jour très saint où est apparu l’Auteur de notre salut. Celui que les mages ont vénéré enfant dans son berceau, nous, adorons-le tout-puissant dans le Ciel. Et tout comme ils ont offert au Seigneur, de leurs trésors, des dons à valeur symbolique, tirons, nous aussi, de nos cœurs, des présents dignes de Dieu » Ainsi soit-il.

     

     

  • Une parole, une prière pour la vie naissante

     

    A l'exception de Monseigneur Léonard

     

    LES EVÊQUES BELGES N'ONT PAS PRIE

    POUR LA VIE NAISSANTE

    en union avec le pape le 27 novembre 2010

     

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    Le 14 juin dernier, les cardinaux Canizares (préfet de la congrégation du culte divin et de la discipline des sacrements) et Antonelli (président du conseil pontifical pour la famille) avaient adressé une lettre aux présidents des conférences épiscopales pour leur annoncer que Benoît XVI présiderait à Saint-Pierre de Rome, le 27 novembre 2010, une veillée solennelle de prière pour la vie naissante, ajoutant que le Souverain Pontife désirait que les évêques du monde entier organisent au même moment des cérémonies analogues, en y faisant participer les paroisses, les communautés religieuses, les associations et mouvements catholiques.

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    A l'exception notable de Monseigneur André-Joseph Léonard, aucun évêque belge n'a déféré à la demande du Saint-Père, se dissociant parfois  même ouvertement de l'initiative.

    Des informations publiées fin novembre par l'agence Cathobel (émanation du service de presse interdiocésain) il résulte que:

    - seul l'archevêque de Malines-Bruxelles a organisé une cérémonie officielle, qu'il a présidée dans la cathédrale des Saints Michel-et-Gudule;

    - aucune célébration n'a été prévue en Flandre;

    - deux célébrations se sont signalées "motu proprio" en Wallonie : l'une à l'initiative de la Communauté de Tibériade, à la Chapelle du Coeur de Jésus à Namur; l'autre à l'initiative des jeunes du mouvement "Génération pour la Vie" , de l'Union des Etudiants Catholiques de Liège et de l'association "Sursum Corda", à l'église du Saint-Sacrement au Boulevard d'Avroy à Liège.

    A l'église du Saint-Sacrement, la cérémonie était présidée par l'abbé Claude Germeau, directeur du Foyer des Jeunes (Herstal). Elle fut précédée d'une conférence de Mme Anne-Marie Libert, professeur au Séminaire de Namur et collaboratrice de Mgr Michel Schooyans, consulteur du conseil pontifical pour la famille.

    Nous reproduisons ci-après le texte de cette conférence. L'exposé jette une lumière crue sur l'idéologie qui anime les services de santé reproductive et autres instances qui, sous l'égide des Nations-Unies, oeuvrent à la désertification morale et religieuse dans le monde entier. En conclusion, Mme Libert  a résumé comme suit les objectifs mortifères inclus dans les programmes de ces services : mort à la vie en ses sources, mort à l'enfant, mort à la famille, mort à l'amour. Mais sommes-nous encore capables de résister aux mystifications du terrorisme à visage humain qui s'impose, comme dans le "meilleur des mondes" prédit par Aldous Huxley (1931)?

     

    Conférence du samedi 27 novembre 2010

    à l’église du Saint-Sacrement à Liège:

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    L'ONU NUIT GRAVEMENT A LA VIE

     

    par Mme Anne-Marie LIBERT

    Professeur de philosophie au Séminaire de Namur

     

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              En 1798, Thomas Robert Malthus (1766-1834) publie un Essai sur le principe de population. Selon ce principe, la population augmente de manière géométrique, c'est-à-dire double tous les 25 ans, tandis que la nourriture ne s'accroît que de façon arithmétique, donc beaucoup plus lentement. Malthus voit donc le rapport entre population et nourriture de manière pessimiste. Selon lui, c'est Dieu qui a voulu qu'il n'y ait pas assez de nourriture pour tout le monde et qu'il y ait des pauvres et des riches. On ne peut rien y faire. Comme la population augmente plus vite que la nourriture, il ne faut surtout pas courir le risque de favoriser cet accroissement de la population en aidant les pauvres.

     

    Le pessimisme de Malthus est partagé par son contemporain Jeremy Bentham(1748-1832). Bentham est d'accord avec le principe de population formulé par Malthus, mais Bentham, qui est athée, remplace Dieu par la Nature. La Nature est violente et a voulu un accroissement différent de l'homme et de la nourriture. Dans ce monde violent, l'homme va rechercher ce qui lui fait plaisir et éviter ce qui lui amène de la douleur. Bentham recommande en termes voilés l'emploi de moyens contraceptifs.

     

    Il y a dans le cercle des amis de Jeremy Bentham des gens qui vont se lancer dans la publication et la distribution de brochures prônant la contraception. C'est la naissance du mouvement néo-malthusien. Les néo-malthusiens combinent la thèse malthusienne sur le rapport population-nourriture avec la thèse du droit au plaisir sexuel sans risque de procréation.

     

    La lecture de l'Essai de Malthus inspire à Charles Darwin l'idée de sélection naturelle des espèces. Seules les espèces vigoureuses, et dans ces espèces, les êtres forts, en bonne santé survivent et se multiplient. Les faibles sont condamnés à disparaître. Darwin parle de "struggle for life" (lutte pour la vie), expression qu'il a trouvée chez Malthus. C'est la Nature elle-même qui a décidé que tous ne pourraient pas survivre.

     

    Galton, cousin de Charles Darwin, applique cette théorie aux hommes. Il crée en 1883 le mot eugénique (art de bien engendrer). Le mouvement eugéniste va défendre l'idée selon laquelle une charité peu réfléchie encourage les faibles, les pauvres, les inadaptés à avoir des enfants. Elle aide ces enfants pauvres, sans instruction, à vivre, survivre et se reproduire. La fécondité des pauvres étant plus élevée que celle des classes sociales plus instruites, les pauvres risquent à terme d'être par leur nombre une menace pour les classes instruites. Galton estime que la sélection naturelle est insuffisante; il préconise la sélection artificielle afin d'empêcher la reproduction des déficients et de permettre aux forts de s'épanouir. Le discours tenu à propos des familles pauvres l'est aussi à propos des nations pauvres. La situation démographique de l'Inde préoccupe la Grande-Bretagne et y est étudiée.

     

    Aux États-Unis, une figure de poids du mouvement néo-malthusien apparaît: Margaret Sanger, née en 1879 et décédée en 1966. Se présentant comme un esprit éclairé désireux d'aider les pauvres, Margaret Sanger mêle dans ses écrits féminisme, néo-malthusianisme et eugénisme. Elle plaide pour l'accès à la contraception pour les femmes afin qu'elles puissent vivre librement leur sexualité. Elles doivent pouvoir jouir du plaisir sexuel comme les hommes, sans craindre la maternité. Son discours aux classes sociales pauvres décrit avec force détails leur condition misérable. Mrs Sanger déclare que seul le contrôle des naissances fera sortir les pauvres de la misère. Aux classes sociales favorisées, elle déclare que l'amélioration de la race passe par l'accès des individus les moins sains à la contraception et à la stérilisation. Margaret Sanger ne remet nullement en question les inégalités sociales.

     

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    Margaret Sanger a forgé l'expression Birth Control. Le terme est très clair: il faut contrôler les naissances. Au niveau international, les races autres que la race blanche, occidentale, anglo-saxonne, risquent d'envahir le monde. Dans un discours prononcé en 1920, Margaret Sanger dit clairement qu'on ne peut demander aux autres races de diminuer leur population alors que l'on encourage les naissances en Amérique. Margaret Sanger organise des conférences, fait campagne au niveau international: il est temps de prendre conscience du danger que représente l'accroissement de population face aux ressources de la terre. La solution viendra du contrôle conscient de la population mondiale par l'homme.

     

    Le discours adressé aux pauvres est clair: faites comme nous, les riches: contrôlez vos naissances, et vous deviendrez riches comme nous.

     

    Aux États-Unis, la population la plus visée par les organismes de planning familial mis en place par Margaret Sanger sera la population pauvre et surtout noire. Margaret Sanger a tenu des propos racistes et eugénistes sous couvert d’aide aux pauvres. Elle a par exemple prôné la stérilisation de ceux qui étaient jugés inaptes. Le mouvement de Margaret Sanger a eu beaucoup de succès parmi une bourgeoisie libertine qui se prend pour la race supérieure et veut éliminer les pauvres en leur imposant un contrôle des naissances.

     

    Margaret Sanger a fait campagne aux Etats-Unis mais aussi au niveau international. Grâce à la fortune de son mari, Margaret Sanger met sur pied la première conférence mondiale sur la population, qui a lieu à Genève en 1927. Dans ses mémoires, elle écrit que, selon elle, la Société des Nations doit inclure dans son programme le contrôle des naissances et déclarer officiellement que chaque nation a le devoir de limiter ses habitants au prorata de ses ressources afin que la paix internationale soit sauvegardée.

     

    Les Nations Unies sont fondées en 1945. En 1948, Margaret Sanger organise en Angleterre une conférence internationale sur la population et les ressources mondiales. Cette conférence a lieu sous les auspices de l'association britannique du planning familial, très eugéniste. D'autres conférences l'ont précédée et la suivront, mais cette conférence de 1948 est particulièrement intéressante car les grandes orientations des prochaines décennies s'y dessinent déjà.

     

    150 ans après la publication de l'Essai sur le principe de population, l'heure de Malthus a sonné (comme le dira Margaret Sanger): il est temps de prendre conscience du danger que représente l'accroissement de population face aux ressources de la terre. La solution viendra du contrôle conscient de la population mondiale par l'homme. Les méthodes contraceptives doivent être améliorées.

     

    Margaret Sanger a estimé qu’il était urgent de mettre au point des méthodes contraceptives efficaces et bon marché destinées aux masses. Dans les années 1950, Margaret Sanger rencontre le Dr Pincus et lui trouve des fonds pour ses recherches. Elles aboutiront à la mise au point de la pilule contraceptive. Dans ses écrits, Pincus dit clairement qu'il faut trouver un produit qui agira sur le contrôle des premiers stades du processus de la reproduction humaine: blocage de l'ovulation, modification du mucus cervical pour bloquer les spermatozoïdes, et s'il y a quand même eu fécondation, empêchement de la nidation. La pilule est née. Les textes médicaux de l’époque qui parlent de ces recherches ne font pas de différence entre contraception (blocage de l'ovulation) et empêchement de la nidation, c'est-à-dire un avortement précoce ! Pincus et d’autres chercheurs ne sont guère embarrassés par cette possibilité d’avortement précoce ! Pour le grand public, l’argument qui sera employé est que la pilule est un contraceptif destiné à diminuer le nombre d’avortements. La pilule contraceptive sera présentée dans les pays occidentaux comme le symbole de la libération de la femme.

     

                Margaret Sanger a œuvré à la fondation d’une organisation non gouvernementale internationale qui, parmi ses missions, « aiderait » l’ONU. L'IPPF (la Fédération internationale pour la planification familiale) sera fondée à Bombay en 1952. En 1954, la première Conférence mondiale sur la population a lieu à Rome sous l'égide des Nations Unies.

     

    La proposition de réunir cette conférence est venue de Julian Huxley, qui a été le premier directeur général de l'UNESCO de 1946 à 1948. Le but de Julian Huxley est très clair: éviter que la planète ne soit atteinte par le cancer! Et quel est le cancer de la planète? L'homme. Le temps presse. Futur fondateur du Fonds mondial pour la nature (WWF), Julian Huxley est préoccupé par les effets de l'explosion de la population sur l'environnement. Il faut réagir, éduquer les personnes aux dangers de la situation.

     

    Un point important est à retenir: la toute jeune organisation des Nations Unies est déjà aperçue comme pouvant jouer un rôle central dans le contrôle de la population.

     

    Une famille nord-américaine va jouer un rôle très important dans cette implication des Nations-Unies dans les campagnes de contrôle de la population. C'est la famille Rockefeller. Dès 1913, la Fondation Rockefeller a financé des recherches sur le contrôle des naissances, l'éducation sexuelle, les différents facteurs qui influencent le comportement sexuel de l'être humain. Dès les années 30, cette fondation se penche sur le fonctionnement hormonal de l'être humain afin de mettre au point des contraceptifs plus efficaces. Quand on analyse la liste des projets financés jusqu'à présent par la fondation Rockefeller, mais aussi par d’autres fondations comme le Population Council, la fondation Bill Gates ou la fondation Ted Turner, on retrouve, pêle-mêle, l'envoi de missions dans différents pays en voie de développement pour recenser la population, en étudier la structure et surtout aider les gouvernements à contrôler leur population, la formation de ressortissants des pays pauvres pour intervenir en matière de population, les recherches en matière de nouveaux contraceptifs et abortifs.

     

    Il faut que toute personne dans le monde puisse utiliser la contraception! Derrière tout ceci se cache l'idée selon laquelle il faut construire un ordre mondial qui garantisse la sécurité économique dans le monde, surtout pour les riches. Un pays s’estime fondé à s’octroyer une mission de leadership mondial : les Etats-Unis. A cette mission doivent être associées les nations riches et les classes riches du monde entier. Tout ce bloc constitué par les nations riches devra s'employer à contrôler le développement dans le monde en général. Or le grand risque, c'est la croissance démographique des pays pauvres. Il faut endiguer l'essor de la population pauvre.

     

    En décembre 1946, John D. Rockefeller Junior fait un don qui permet l'achat du terrain pour le siège permanent des Nations Unies à New York: ainsi cette organisation sera installée de manière permanente aux Etats-Unis.

     

    La pensée de Malthus se retrouve dans les textes de l’ONU. La croissance de la population –assure-t-on– est exponentielle. La production alimentaire ne suit pas; la terre ne peut alimenter tout le monde. Les pauvres du Tiers-Monde ont trop d'enfants et sont responsables de leur propre misère. La croissance de la population est cause de pauvreté et de chômage; elle fait obstacle au développement.

      

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    Sans contrôle de la population, pas de développement possible. A partir de la IIe Conférence internationale sur la Population (Belgrade, 1965), la planification des naissances est présentée comme une forme d'aide au développement. L'utilisation du stérilet, présenté comme une méthode d'avenir, est prônée. En effet, même l'utilisation de la pilule est encore trop dépendante de la motivation des femmes. Les pratiques contraceptives efficaces ne sont souvent adoptées que par des groupes très limités, occidentalisés et à haut niveau de vie et d'éducation. Il faut donc aussi envisager d'autoriser l'avortement.

     

    Dans les années 1960-1970, les expressions "explosion démographique", "contrôle des naissances" sont souvent employées. Dans les congrès internationaux du planning familial, de nombreux orateurs insistent sur le fait que le planning familial laissé à la discrétion des couples ne suffit pas. A lui seul, il ne saurait réduire la croissance démographique à un niveau acceptable, tant dans les pays industrialisés que dans les pays en développement. L'exemple des pays de l'Est ou du Japon est mis en avant: l'avortement y joue un rôle important dans le contrôle des naissances. Comme les pays riches doivent montrer l'exemple aux pays pauvres, la lutte contre l'augmentation de population doit avoir lieu à l'échelle mondiale. Frederick Jaffe, collaborateur du Président du Population Council Bernard Berelson, publie en 1969 un petit tableau reprenant des exemples de mesures proposées pour réduire la fécondité aux États-Unis. Une de ces mesures propose d'"améliorer les soins médicaux maternels, avec le planning familial comme élément central". Ce tableau est bien sûr destiné à servir de modèle pour les pays pauvres!

     

    Dans un ouvrage intitulé "Les Nations Unies dans la vie quotidienne", le FNUAP (Fonds des Nations Unies pour la population) est présenté de la manière suivante:

     

     Le FNUAP en quelques mots

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    Le FNUAP a commencé ses activités en 1969, avec les objectifs suivants:

     

    • Aider à mettre en place des programmes de santé en matière de reproduction, y compris la planification des naissances et l'hygiène sexuelle;
    • Appeler l'attention sur les problèmes liés à une croissance démographique rapide;
    • Aider les pays en développement, sur leur demande, à résoudre leurs problèmes de population;
    • Contribuer à améliorer la santé en matière de reproduction; et
    • Promouvoir l'égalité des hommes et des femmes, la responsabilisation des femmes et la stabilisation de la population mondiale.

     

    Le rapport du National Security Council, préparé en 1974 sous la direction d'Henry Kissinger, déclare très clairement qu'aucun pays n'a réduit la croissance de sa population sans passer par l'avortement.

     

    Le danger d'augmentation de la population réside surtout dans les pays pauvres, qui sont souvent des anciennes colonies des pays européens. Pour que ces pays acceptent une loi sur l'avortement, il faut leur donner l'exemple. En 1974, lors du débat à l'Assemblée Nationale française, Madame Veil affirmait que certaines personnes "présentent (…) l'avortement comme un moyen de contention de la natalité et/ou comme complément à la contraception."

     

    En effet, l'avortement est vu comme un moyen de limiter les naissances dans le Tiers-Monde. Des milieux nord-américains soucieux de la sécurité démographique de leur pays ne peuvent se dispenser du concours de l'Europe. Il faut encourager l'avortement. Il fallait que les USA permettent l'avortement pour être crédibles à l'étranger. Il fallait que l'Angleterre soit pionnière en matière de libéralisation de l'avortement (loi de 1967) pour que son exemple soit plus facilement suivi dans son ancien Empire, notamment en Inde (loi de 1971). Il fallait que la France lui emboîte le pays pour convaincre, à terme, les populations d'Afrique francophone, de suivre son exemple. La libéralisation de l'avortement est le prix que les pays développés payent pour contenir la poussée démographique du Tiers-Monde. En Europe, le discours sera un discours féministe: "Mon corps est à moi".

     

    La première conférence internationale explicitement consacrée aux femmes est organisée à Mexico en 1975, année internationale de la femme.

     

    Pourquoi s'intéresse-t-on tout à coup aux droits de la femme?

     

    Le succès des politiques de contrôle de population dépend du succès du contrôle de la fécondité de la femme. Pour y arriver, des mesures doivent être prises: non seulement il faut éduquer les femmes, leur donner une indépendance économique, mais surtout il faut un changement radical de la vision de la femme. Considérer la femme comme mère relève d'une conception stéréotypée dont il faut se débarrasser.

     

    Des voix s’élèvent pour dénoncer les politiques de stérilisation de masse, comme en Inde. Il faut donc changer de tactique. Dès la fin des années 1970, l’OMS commence à utiliser les mots « santé reproductive ». Le terme a une connotation positive qui remplace avantageusement le terme "contrôle des naissances". Des ressources énormes sont mises au service de la recherche en matière de contraception. Que ne ferait-on pour la santé des femmes!

                

                1984  Mexico Conférence sur la population

     

                Lors du discours d'ouverture, M. Salas, secrétaire général de la Conférence, indique clairement que l'objectif prédominant des politiques de population est la stabilisation rapide de la population globale, si possible avant la fin du siècle.

     

                Pour y parvenir, plusieurs recommandations sont formulées par la Conférence: accès de tous, y compris des adolescents, à la planification des naissances, implications des gouvernements et coopération avec des ONG comme l'IPPF.

     

    L'article 11 de la Déclaration finale souhaite que le statut des femmes soit amélioré. La taille des familles en sera modifiée.

     

                           1992: Rio Conférence sur l'environnement et le développement

     

    Le message de la Conférence de Rio est clair: la planète est en danger. Il faut la sauver. Comment ? Un des moyens est la stabilisation rapide de la population mondiale, et le meilleur moyen est d'agir sur la fécondité des femmes. 

     

               1994: Conférence du Caire: Population et développement

     

    Le terme "santé reproductive" est publiquement employé. On pourrait croire que l’expression signifie les soins préventifs et curatifs dont peut disposer la mère pendant sa grossesse, lors de son accouchement et du suivi de celui-ci, ainsi que des soins offerts en cas de stérilité ou de maladies sexuellement transmissibles. En réalité, l’expression "santé reproductive" a des significations multiples. Si elle peut renvoyer aux soins que nous venons de mentionner, elle renvoie aussi à la contraception, à l’avortement sûr, à une certaine éducation sexuelle des adolescents, au changement des lois, etc. La santé reproductive est une affaire d'individus, non de couples. La définition de la santé reproductive ne fait pas clairement mention de l'avortement mais parle de la "régulation des naissances". Pour l’OMPS, la régulation des naissances comprend l’interruption des grossesses non désirées, c’est-à-dire l’avortement légal.

     

    De son côté, l’IPPF milite pour l’avortement légal et sans limitation de date, le refus pour le personnel de santé d’utiliser la clause de conscience, l’obligation pour les services de santé de proposer toutes les méthodes de contraception et d’avortement, etc. Ils sont appuyés dans leurs campagnes par le mouvement des "Catholiques pour un libre choix".

      

      1995  Pékin Conférence sur les femmes

     

    Relevons que la conférence de Pékin insiste sur le fait que les femmes doivent sortir de la famille et trouver leur épanouissement dans le travail à l'extérieur. Le fait de s'occuper de ses enfants est un signe d'inégalité, d'infériorité. Pour que la femme devienne l'égale de l'homme, il faut qu'elle puisse occuper un emploi rémunéré et non se consacrer à sa famille. Elle y parviendra en passant par la planification familiale. Mention est également faite de la problématique de la croissance de la population mondiale.

      

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    A la conférence de Pékin, les féministes radicales emploient le mot « gender » « genre », entré depuis dans les mœurs. Derrière les mots "homme", « masculin » et "femme", « féminin » , se cache une vision du "mâle" et de la "femelle" qui est construite par la société. Le genre est une construction sociale qui crée la nature de chaque individu. C'est la société qui modèle le comportement masculin ou féminin. Selon les féministes radicales actuelles, il faut déconstruire le modèle que la société impose à la femme, mais aussi à l’homme; il faut abolir les genres, afin qu'il n'y ait plus ni hommes, ni femmes. Les hommes et les femmes n'existent pas, ce sont des catégories sociales oppressives.

     

    Comme Margaret Sanger, les féministes radicales veulent détruire la famille, déconstruire la société.

     

    -         Il faut dénoncer les rôles assignés à l’homme et à la femme dans toutes les sociétés. Nous devons comprendre que notre perception de la réalité repose sur des constructions sociales marquées par le patriarcat.  

    -         Il faut ouvrir les yeux et prendre conscience du contrôle permanent de l'homme sur la femme et les enfants, qui perpétue la position subordonnée de la femme.  

    -         Les hommes et les femmes ne ressentent pas d'attraction pour les personnes du sexe opposé par nature, mais plutôt à cause d'un conditionnement de la société. L'hétérosexualité n'est plus l'orientation sexuelle habituelle du comportement de l'être humain. Si les chromosomes X et Y sont une réalité, les orientations que se donnent les individus peuvent être tout autres: hétérosexuels, homosexuels, bisexuels, transsexuels, travestis, etc. Je peux à tout moment changer mon orientation sexuelle selon ma recherche de tel ou tel plaisir corporel, d'où l'importance des expériences érotiques. Par conséquent, le désir sexuel est orienté vers qui l'on désire à ce moment de notre existence. La dualité traditionnelle, masculin-féminin, vole en éclat.  

    -         Le droit à la liberté sexuelle des individus doit être proclamé; il ne doit être assorti d'aucune contrainte, d'aucune limitation. L'individu n'a à répondre de ses actes que devant lui-même, et surtout pas devant un dieu qui n’existe pas. Contraception et avortement doivent être accessibles à tous, sans exception. 

    -         Les mots comme "mère", "famille", "maternité", "fils/fille", "père", etc. sont vidés de toute pertinence et sont affublés de significations tout à fait déroutantes. Le monde naturel est nié au profit d'un monde imaginaire qui va remplacer le monde réel.  

    -         Les normes de la morale familiale traditionnelle doivent être enterrées. Le législateur est pressé d'entériner les comportements les plus bizarres. Les "modèles" les plus étonnants d’union ou de désunion bénéficient d’une couverture légale. Toute personne qui se présente comme hétérosexuelle est soupçonnée d'homophobie.  

    -         L'éducation est une stratégie importante pour changer les préjugés concernant les rôles de l'homme et de la femme dans la société. La destruction de la famille biologique permettra l'émergence d'hommes et de femmes nouveaux, libérés de toutes les formes d'oppression. 

     

    En résumé, il faut déconstruire la famille, le mariage, la maternité, la féminité même pour que le monde puisse être libre.

     

     

    Les nombreuses réunions qui ont eu lieu après la Conférence de Pékin continuent à insister sur la stabilisation de la population mondiale, l'accès de tous, y compris des adolescents, à la planification familiale, l'avortement sans risques, la sauvegarde de la planète (Gaïa a besoin que certains de ses enfants avortent), la lutte contre l'image stéréotypée de la femme réduite à son rôle traditionnel de mère (théorie du gender).

     

     

    Dans plusieurs textes récents publiés par l’OMS, nous trouvons l’idée selon laquelle l’OMS a résolu de développer une stratégie en vue de faire progresser la santé reproductive. Il faut par exemple fournir des services d’avortement dans les soins de santé de base. N’oublions pas que dans le rapport Kissinger par exemple, le contrôle de la croissance de la population des pays pauvres passe par l'avortement. Seul l'avortement risqué est indésirable. C'est la raison pour laquelle l'OMS finance depuis des années des recherches sur l'avortement, par exemple sur les "bons" dosages à employer en cas d'avortement médicamenteux. Des chercheurs effectuent également des recherches sur l'implantation de l'embryon dans l'utérus afin de mettre au point des abortifs précoces qui empêcheraient la nidation et le développement de l'embryon. Une étude est en cours afin d'étudier les effets de certaines hormones sur la fixation d'embryons. Pour effectuer cette recherche, les collaborateurs de l'OMS utilisent des embryons humains (embryons surnuméraires ou embryons congelés depuis 5 ans ou plus) et provoquent leur nidation sur des tissus d'endomètre reconstitués in vitro. Des dosages sont effectués afin de voir si les tissus utérins acceptent ou non les embryons, ceci bien sûr afin de mettre au point des agents anti-implantation! Présentées au grand public comme des contraceptifs, ces préparations provoqueront des avortements précoces. La femme qui aura ingurgité ces produits n'aura plus à se demander si elle est enceinte ou non: son corps rejettera automatiquement l'enfant. De plus, selon la définition de l'avortement donnée dans certains textes de l'OMS, avant la nidation, ce n'est pas un avortement.

     

    Dans tous les pays, spécialement là où la contraception n’est guère utilisée (ex. : certains pays d’Afrique), il faut renforcer les services de planning familial. Il faut revoir, et si nécessaire modifier, les lois et les politiques afin qu'elles facilitent l'accès à la santé reproductive et sexuelle. Il faut aussi, dans la mesure où la loi le permet, que l’on fournisse des services d’avortement dans les soins de santé de base.

      

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    Pour mener à bien cette stratégie, l’OMS continuera à renforcer son partenariat avec d’autres organisations au sein du système des Nations Unies (en particulier avec le FNUAP, l’UNICEF et l’UNAIDS), la Banque mondiale, les associations de professionnels de la santé, les ONG et d’autres partenaires. Si l’OMS met en exergue la santé reproductive, le FNUAP met l’accent sur le contrôle démographique; l’UNICEF sur l’éducation des adolescents ; l’UNAIDS sur le sida. La Banque mondiale aborde les mêmes problèmes du point de vue économique et financier.

     

    Bien entendu, ces documents et en particulier ceux publiés par l’OMS, comportent des recommandations tellement acceptables qu’on ne peut qu'y adhérer. Qui ne souscrirait, en effet, à des programmes visant à réduire la morbidité et la mortalité maternelles, la mortalité infantile, les maladies sexuellement transmissibles et, de façon plus générale, à rendre accessibles au plus grand nombre tous les soins de base en matière de santé?

     

    Mais en réalité, ces bonnes intentions déclarées ne suffisent pas à occulter la forte teneur idéologique de ces documents. Tout converge vers un point focal : la nécessité supposée de contrôler la croissance de la population des pays pauvres. Cette question centrale n’est jamais mentionnée, encore moins discutée, dans les rapports de l’OMS, ni dans ceux du FNUAP, ni d’ailleurs dans le Programme d’action du Caire. Le postulat malthusien est admis comme allant de soi, et par conséquent ne nécessitant pas de démonstration.

      

    Pour arriver à implanter partout dans le monde la santé reproductive telle que vue par l'OMS, le FNUAP ou la Banque Mondiale, il faut changer les lois. Un des principaux obstacles au changement des lois, ce sont les leaders religieux. C'est la raison pour laquelle l'OMS ou le FNUAP disent clairement qu'il faut impliquer des chefs religieux dans les changements culturels et législatifs.

     

    En 2004, le Fond des Nations Unies pour la Population a publié un document dans lequel il explique comment il a infiltré des leaders culturels et des milieux religieux afin de changer les mentalités, les valeurs auxquelles on fait traditionnellement référence. En clair : il s’agit de faire une nouvelle révolution culturelle. Il ne suffit pas de changer les structures ; il faut changer radicalement les mentalités. Il faut distiller le message non pas de l'extérieur, mais de l'intérieur. Pour ce faire, il s’agit de compromettre des leaders, en particulier religieux, en les entraînant dans un engrenage d’alliances dont ils ne pourront pas se dépêtrer.

     

    Dans les situations présentées par l’étude du FNUAP (Guatemala, Iran, Ouganda, Inde, Ghana, Yémen, Brésil, Cambodge, Malawi), on observe une grande diversité. Dans certains pays, la présence catholique est marquée ; ailleurs l’accent est mis sur la présence protestante ou anglicane. Dans d’autres pays l’islam ou le bouddhisme sont actifs. On est aussi frappé par la grande diversité des cultures. Ces situations contrastées font que le FNUAP peut s’employer à influencer des personnalités émanant des milieux les plus divers : prêtres, évêques, pasteurs, agents pastoraux, imams, bonzes, etc. A des degrés divers, tous sont ciblés par le FNUAP qui veut reprogrammer ces leaders culturels et religieux et en faire des agents de la santé reproductive. Au Brésil, la porte d'entrée fut, dans l'Église catholique, la pastorale de l'enfance.

     

     

    Nous avons vu l’importance de l'avortement comme moyen de limiter les naissances dans les pays pauvres. Il fallait que les USA permettent l'avortement pour être crédibles à l'étranger. Encore actuellement, il faut que les États-Unis donnent l'exemple aux autres nations. Ne nous étonnons donc pas que dès son accession à la Maison Blanche, Barack Obama ait nommé dans son staff des personnes pro-avortement. Aidé de Madame Hillary Clinton, le Président Obama apparaît comme un des principaux responsables des programmes de contrôle de la natalité présentés comme condition préalable au développement.

     

                Dans un discours prononcé lorsqu'elle a reçu le prix Margaret Sanger de la Fédération américaine du planning familial, Hillary Clinton a dit clairement qu'il y avait beaucoup à faire pour restaurer la réputation (standing) et le leadership des États-Unis. La santé reproductive fait partie intégrante des missions américaines en matière de développement. Les États-Unis doivent prendre le leadership du Global Health Initiative afin d'aider à la mise en place de services de santé, dans lesquels les services de santé reproductive auront une place de choix. La santé et la stabilité des pays dans le monde ont un impact direct sur la sécurité et la prospérité des Etats-Unis.

     

    L'administration Obama est en train de débloquer des millions de dollars pour de nombreux programmes de santé reproductive dans le monde. Or dès lors que le poids des États-Unis est celui qui pèse le plus dans les relations internationales, bi- et multilatérales, et spécialement dans le cadre de l’ONU, on peut prévoir que tôt ou tard, l’avortement sera présenté à l’ONU comme un « nouveau droit humain », un droit permettant d’exiger l’avortement. Quant aux Européens, ils n'auront plus rien à dire puisque leurs rangs auront été décimés par le vieillissement de leur population, vieillissement accéléré par la santé reproductive!

     

     

    En guise de conclusion:

     

    Il existe heureusement partout des hommes et des femmes de bonne volonté qui refusent cette culture de mort et veulent instaurer une culture de vie, comme l’a si bien dit le pape Jean-Paul II. C'est à nous qu'incombe la tâche urgentissime de mettre nos communautés nationales et toute la communauté humaine à l'abri des métamorphoses de la pensée de ce cher Malthus. C'est à nous de démystifier les "plans d'action" largement fondés sur un gigantesque bluff idéologique. Les "services de santé reproductive" sont des programmes de désertification morale et religieuse: mort à la vie en ses sources, mort à l'enfant, mort à la famille, mort à l'amour. Nous tardons trop à dénoncer cette culture de la mort. Si le mensonge fait bon ménage avec la violence, la justice ne peut se faire que dans la vérité. Il faut que nous nous engagions sans ambiguïté au service de la famille, qui est hétérosexuelle et monogamique. Il est notamment urgent d'instaurer des politiques reconnaissant l'apport décisif de la famille, et en particulier de la mère, à la formation du capital humain. Dans de nombreux pays développés, le remplacement des générations n'est plus assuré depuis de nombreuses années déjà. Après l’avortement, allons-nous nous engager dans la voie de l’euthanasie afin d’à nouveau montrer l’exemple aux pays pauvres ? Grâce à la fidélité à l’Evangile et à la prière, nous sommes capables de résister aux mystifications qu'on nous propose. Merci de votre attention.

     

    ________

    Nota bene: Les illustrations et les grasses sont de notre initiative

     

     

     

     

     

     

  • Eucharistie et mission:

    Un apostolat au cœur de la Cité Ardente 

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    P1010241.JPGL’abbé Claude Germeau et le frère Jérémie-Marie de l’Eucharistie font partie, avec l’abbé Jean Schoonbroodt, de ceux qui animent l’église du Saint-Sacrement à Liège : célébration des messes dominicales (1), des offices de la Semaine Sainte et des grandes solennités ; récollections catéchétiques et, chaque mardi de 17h à 19h, adoration du Saint-Sacrement (vêpres grégoriennes à 17h suivies d’une adoration silencieuse ; récitation du chapelet à 18h. suivie de celle des litanies du Sacré-Cœur ; bénédiction du Saint-Sacrement à 18h45 suivie de la récitation de l’Angélus ; confessions de 17h. à 19h).

     Mais le cœur de l’apostolat de l’abbé Germeau et du frère Jérémie est ce foyer image_202.jpgd’accueil matériel et spirituel fondé par l’abbé Germeau à Fragnée en 1968. Le siège de l’oeuvre est aujourd’hui situé à Herstal, dans la banlieue liégeoise.

     En nous présentant, ci-après, leurs vœux pour les fêtes de Noël 2010 et du Nouvel-An 2011, l’abbé Germeau et le frère Jérémie nous  rappellent l’esprit qui anime leur action dans une société dont les repères religieux se sont toujours davantage effondrés depuis le tournant des années mil neuf cent soixante. Comme l’église du Saint-Sacrement, le Foyer d’accueil vit uniquement de la charité des fidèles, sans aucune aide officielle, publique ou autre. L’occasion d’un geste de soutien s’offre à nous :

    "Madame, Monsieur, chers amis,

     

    Boutique-Chretienne_44_1.jpgDe tout cœur, nos meilleurs souhaits de sainte fête de Noël et de sainte et  heureuse année 2011. Merci pour votre fidèle sympathie, votre prière, votre générosité !

     

    Les évènements de septembre dernier nous ont rendus perplexes. Deux causes expliquent ces problèmes :

     

    Premièrement, le laxisme et l’abandon des exigences de notre Foi durant les années 1970 : prières avant et après la messe, salut, chapelet, adoration du Saint-Sacrement, confession, chemin de croix, 1ervendredi du mois etc. Notre ancien Evêque, feu Monseigneur van Zuylen, disait souvent : A force de vouloir rejoindre le monde, on a tourné le dos à la Croix de Jésus !

     

    Deuxièmement, on a oublié l’exemple de nos aînés tels que Dom Columba Marmion (qui par ses retraites Le Christ vie de l’âme, a fait des miracles dans les âmes), Frère Mutien-Marie (qui par son humilité et sa prière, a suscité l’admiration chez beaucoup d’étudiants), l’abbé Poppe (qui par ses catéchismes à entraîné beaucoup d’enfants à aimer Jésus), le Père Damien (qui a donné sa vie parmi les lépreux)… C’est d’abord par la prière, l’esprit de sacrifice et le don de soi qu’ils ont pu faire beaucoup de bien.

     

    Sainte Thérèse de Lisieux écrit : C’est la prière, c’est le sacrifice qui font toute ma force. Ce sont les armes invincibles que Jésus m’a données. Elles peuvent bien plus que les paroles toucher les âmes. J’en ai bien souvent fait l’expérience ! 

     

    Le Père Lebbe, mis à la porte de la Chine par ses confrères parce qu’il souhaitait des évêques chinois, fut reçu par le Pape Pie XI qui sacra évêques, le 28 octobre 1926 six prêtres chinois. Le Cardinal Van Rossum (2) dit alors au Père Lebbe : Oui, je vous remercie du fond du cœur de ce que vous avez fait, de ce que vous avez souffert et d’avoir si parfaitement obéi. C’est là ce que Dieu a béni !

     

    Le Bienheureux Charles de Foucauld écrit : 

     

     La première chose à faire pour être utile aux âmes,imagesCAR2C33J.jpg c’est de travailler de toutes nos forces et continuellement à notre conversion personnelle… On fait du bien, non dans la mesure de ce que l’on dit et de ce que l’on fait, mais dans la mesure de ce que l’on est, dans la mesure de la Grâce qui accompagne nos actes, dans la mesure en laquelle Jésus vit en nous, dans la mesure en laquelle nos actes sont les actes de Jésus agissant en nous et par nous. Le degré de notre sanctification personnelle sera celui du bien produit par nos prières, nos pénitences, nos exemples, nos actes de bonté, nos œuvres de zèle… L’âme fait du bien dans la mesure de sa sainteté : que cette vérité soit toujours devant nos yeux.

     

    Ce sont là des exemples magnifiques qui, au contraire des médias, suscitent notre admiration, notre enthousiasme. Oui, seuls les saints font l’Eglise !

     

    Voici quelques nouvelles du Foyer. 

     

     

     

    Pendant 5 ans, le Foyer a continué d’accueillir épisodiquement des jeunes. Ainsi, comme je le faisais toujours auparavant, je leur  ai donné un questionnaire pour leur apprendre à réfléchir sur leur vie et les éveiller sur le sens des valeurs. Depuis 2005, 47 questionnaires ont été remplis. Beaucoup soulignent les valeurs de l’accueil, du respect, du service. A la question : Quelle affiche au mur du Foyer t’interpelle ? Certains répondent : Dans le cœur de chacun, il y a une étoile qui brille. Ou encore : Tu veux changer les autres ? Commence par toi-même !

     

    Un vendredi vers 16h, une dame me téléphone : J’ai dans mon magasin un monsieur qui souhaiterait vous rencontrer. Je m’y rends et je rencontre effectivement un homme d’environ 38 ans. Ne le reconnaissant pas, il me donne son nom. Joie de se revoir ! Iranien, il a dû fuir son pays pour éviter d’aller en prison parce qu’il ne voulait pas faire la guerre, il y a 20 ans. Il est venu par la Turquie, caché dans un camion. Arrivé en Belgique, sans ressource ni logement, on m’a demandé de l’accueillir en juin 1987. Il est resté quelques mois au Foyer, le temps de lui trouver un garni et de le régulariser. Ainsi, il a pu en sortir. Maintenant, il vit aux USA où il est marchand de meubles, marié et père d’un magnifique enfant dont il me montre la photo. Je l’invite à venir au Foyer et lui montre les photos des jeunes de son temps. Dix minutes plus tard, on sonne à la porte : un ancien du Foyer à Fragnée, en 1976, qui vient dire bonjour. Tout heureux de me revoir, il parle des bons moments du Foyer de Fragnée. En me quittant, tous deux me font un don généreux pour le Foyer.

     

    Ce fut un bon moment d’amitié et de gratitude.

     

    Voici quelques nouvelles de l’apostolat dans les bars de Liège.

     

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    Grâce à votre générosité, Frère Jérémie Marie peut continuer ses études de théologie en vue du sacerdoce, en collaboration avec une abbaye française. En parallèle, Fr. Jérémie-Marie poursuit son apostolat dans les bars, environ trois après-midi par semaine. Au programme : écoute, débats, conseils, aumônes...

     

    Attablé au fond d’un bar, à la demande d’une jeune chrétienne, il a débattu avec le petit ami de cette dernière, sur la morale sexuelle de l’Eglise, essayant de faire tomber bien des préjugés et des caricatures pour expliquer le sens profond et la beauté de la sexualité, telle que le Christ et son Eglise l’ont exprimée. Un débat calme et posé qui suscita la joie de la jeune fille et les réserves du jeune homme…

     

    Récemment, à un comptoir, Fr Jérémie a fait la rencontre d’un homme d’une quarantaine d’années. Une longue conversation s’est vite engagée sur les problèmes de société et s’est poursuivie sur leurs parcours respectifs : son alcoolisme, son échec conjugal, la conversion du Frère, son espérance… Chaude poignée de mains et mots de gratitude et d’encouragement ont clôturé cette belle rencontre qui, espère Frère Jérémie-Marie, n’est que le début d’une longue série.

     

    Il est également amené à apporter, selon la demande et les nécessités, une aide plus matérielle. Ce fut le cas pour un jeune homme vivant de manière précaire à qui il a donné à plusieurs reprises des colis de nourriture, ou bien encore un autre à qui il a pu porter assistance, tant pour manger que dans ses démarches administratives.

     

    Mais il y a tant de bien à faire. Persévérance, audace et confiance en la Providence sont indispensables !

     

    Heureuse et sainte fête de Noël ! Meilleurs vœux pour 2011 ! Comme chaque année, depuis 1970, il y aura la nuit du Nouvel An à la chapelle du Foyer : 22h30 Sainte Messe suivie de l’adoration du Saint-Sacrement jusque 1h du matin.

     

    Plus que jamais, en ces temps difficiles, il est urgent de revenir à la prière parce qu’elle nous apprend que c’est le Christ qui sauve l’homme !

     

    Le Foyer ne vivant que de dons, nous vous remercions pour votre générosité !"

     

     

     

    Abbé Claude Germeau

    Petit Frère Jérémie-Marie de l’Eucharistie

    2 rue Bellenay  4040 Herstal

    www.foyer-herstal.com

    compte bancaire  du foyer : 240-0666386-97

    

         

      

     

    (1) Eglise du Saint-Sacrement, Boulevard d'Avroy, 132 à Liège: à 10h., messe dominicale en latin (missel de 1962) par l’abbé Jean Schoonbroodt et à 11h15, messe dominicale en français (missel de 1970) par l’abbé Claude Germeau. Chants grégoriens aux deux messes.

    (2) Rédemptoriste néérlandais, né en 1854 et mort en 1932, le cardinal Willem Van Rossum fut membre de la curie pontificale à partir de 1895 et nommé préfet de la congrégation romaine "de propaganda fide" (évangélisation des peuples) en 1918. 

     

     

     

     

     

    

  • La Belgique a perdu la tête

     A propos du lynchage médiatique (*) de Mgr Léonard, archevêque de Malines-Bruxelles, un « vent favorable» nous apporte le point de vue d'un psychopédagogue verviétois, que nous reproduisons ci-dessous :

     

    L'ECCLESIASTIQUE ET LES HYSTERIQUES

     

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    Allez, l'Observatoire du Récit Médiatique (UCL), au travail ! Après le colloque "Radio et narration : le réenchantement" que vous préparez pour les 19/20 novembre, il vaudra assurément la peine de dédier votre prochain événement ou livre au traitement médiatique réservé aux propos du primat de Belgique. 

     

     Je soumets d'ores et déjà une contribution pour ce colloque. Son titre: "confusionnisme, inculture et perte de sens: l'espace médiatique reflet et catalyseur des maladies sociales".

     

    ETAT D'AGITATION

    Que ce soit au sujet du sida, des homosexuels ou des prêtres pédophiles âgés, la psychiatrie du collectif fournit une clé de lecture aux réactions suscitées par les propos de l’archevêque. En matière de diagnostic, on ne se trompera pas en déclarant d’emblée avoir affaire à un état d'"agitation généralisée", tant au sud (« syndrome Gabriel Ringlet » **) qu'au nord (« syndrome Rik Torfs ») du pays.

    Du point de vue psychiatrique, cet état est généralement alimenté par une source conflictuelle claire ou par une cause bien localisable, à savoir ici l'archevêque. L'agitation s'exprime par des pulsions compatibles avec un état normal mais exagérées. Intenter un procès à un archevêque ou exiger sa démission pour quelques expressions d'un avis personnel et/ou d'un avis ecclésial relève assurément de cette tendance à l’exagération.

     HYSTERIE COLLECTIVE

     Si l'on pousse plus loin l'étiologie, plusieurs options s'offrent. Les états délirants, confusionnels, maniaques offriraient certes des pistes intéressantes pour expliquer ces tempêtes dans l'eau bénite. Mais nous privilégierons l'explication d'un état d'hystérie collective qui se caractérise par un comportement d'excessif enthousiasme ou d'excessive adulation de la part d'un groupe, observable par exemple dans certains concerts rock. Dans le cas qui nous occupe, cette hystérie collective est inversée et orientée vers la répulsion, Monseigneur Léonard n'étant ni John Lennon, Elvis Presley ou membre d’un Boys Band.

     PERTE DE NUANCE

     Les personnes souffrant d'hystérie deviennent incapables de nuances et l'on a assisté lors de la troisième déclaration à un cas d'école en la matière. Voici la phrase qui a crispé : « Je souhaite qu'on reste toujours humain avec tout le monde, d'abord avec les victimes en leur prêtant écoute et avec les abuseurs, les abuseurs sont aussi des êtres humains, ils doivent évidemment prendre conscience de ce qui s'est passé dans leur vie mais s'ils ne sont plus du tout en fonction, s'ils n'ont plus aucune responsabilité, je ne sais pas si exercer une sorte de vengeance qui n'a plus aucun résultat concret, est une solution humaine. Et je ne pense pas que la majorité des victimes, loin de là, souhaite cela ». Voici les nuances élémentaires passées aux pertes et profits :

    - l'intervention de Léonard est extrêmement circonstanciée : des prêtres âgés, sans responsabilités, admettant les faits;

    - l'intervention est à remettre dans un contexte plus large dans lequel l'archevêque a répété continûment que la justice devait faire son travail et que les victimes, parfois brisées à vie, devaient être entendues de toutes les manières;

    - l'intervention contient des marqueurs d'expression d'un avis personnel et d'une invitation à la réflexion ("je ne sais pas si...", "Je ne pense pas que...")

    - l'intervention est celle d'un homme d'Eglise et du représentant d'une religion "experte en humanité", qu'on soit ou non d'accord avec la vision de l'homme qu'elle propose. Pas étonnant donc que cet appel à l'humanité soit valable jusque dans le chef des abuseurs et qu'un archevêque se refuse à participer à ce qui serait un "vae victis";

     OBSESSION

     L'hystérie se teinte volontiers de motifs obsessionnels. En l'espèce, l'obsession ultime est que la hiérarchie de l’Eglise se taise une bonne fois pour toutes (étrange porte-parole de l'archevêque dont le conseil était de se taire jusque Noël) ou qu'elle ne s'exprime plus que pour bénir tout ce que pense (?) l'opinion. Sans un recours aux apports de la psychiatrie du collectif, il est tout bonnement impossible de répondre à cette question simple et essentielle : de quoi Monseigneur Léonard est-il coupable in fine ? En son temps, Ponce Pilate, un païen, avait posé exactement la même question au sujet du Christ, sans trouver de réponse.

     

    __________ 

    (*) accompagné de voies de faits sur sa personne, dans sa propre cathédrale, à Bruxelles.

    (**) sur le cas Ringlet voir aussi:

     http://pierre.piccinin-publications.over-blog.com/article-lettre-ouverte-a-monsieur-l-abbe-gabriel-ringlet-60327050.html

     

     
     

  • La Justice, l'Eglise et l'Etat en Belgique

     

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    AUTOPSIE

     D’UNE COMMISSION ECCLÉSIALE CONTROVERSÉE

     

    L’épidémie de révélations concernant les abus sexuels sur mineurs au sein de l’Église n’a pas épargné la Belgique. Elle a même pris cette année un tour spectaculaire après les aveux de l’évêque de Bruges, au mois d’avril 2010. Voici dix ans déjà, la conférence épiscopale avait mis sur pied une «commission pour le traitement des plaintes pour abus sexuels dans le cadre d’une relation pastorale » dont les membres ont démissionné en bloc le 28 juin dernier, quelques jours après la saisie judiciaire de tous leurs dossiers. Comment cette commission mieux connue sous le nom éponyme de son président, le professeur Peter Adriaenssens (1), se situait-elle par rapport au pouvoir judiciaire, à la méfiance duquel elle a finalement succombé ?

     

    La base juridique

     

    Les statuts de cette commission –aujourd’hui dissoute- relevaient du droit canonique, interne à l’Église. Aux yeux du droit belge, de tels statuts n’ont pas plus de valeur qu’une convention privée : celle-ci fait la loi des parties (2), sans pouvoir déroger aux dispositions légales impératives dont relève, entre autres, l’organisation judiciaire publique.

     

     

    Une commission contestée

     

    Dans un article publié (3) sur le site web « justice en ligne » (4), l’ancien bâtonnier Pierre Legros (5) a contesté la légitimité de cette commission ecclésiale. Selon lui, en la créant, les évêques se seraient immiscés dans un domaine que la loi réserve au pouvoir judiciaire.

     

    De plus, cette création était, à son sens, inutile car :

     

    -        il existe déjà des associations d’aide aux victimes d’abus sexuels qui, précise-t-il, n’interfèrent pas avec le processus judiciaire ;

    -        si les enquêtes de la commission ecclésiale détectaient une infraction possible, cette commission serait, écrit-il, « de toute façon » (6) tenue de saisir la justice.

     

    L’argumentation est un peu courte :

     

    -        pourquoi les organismes existants d’aide aux victimes d’abus sexuels disposeraient-ils d’un monopole ?

    -        en quoi le traitement de la dimension pénale par la justice publique empêcherait-il celui des aspects disciplinaires ou sociaux par les entreprises ou institutions privées sur base de leurs propres règlements intérieurs ?

    -        s’agissant de l’Église, ne serait-ce pas là, en outre, contrevenir à la liberté d’organisation qui lui est garantie par l’article 21 de la constitution (7), dans les limites du respect de la législation d’ordre public légitime ?

    -        last but not least,  en quoi les enquêtes de la commission Adriaenssens auraient elles concurrencé indûment l’action judiciaire publique ou entravé son déroulement, tels qu’ils sont organisés par la loi ?

     

    Poser les trois premières questions, c’est y répondre. En revanche, la quatrième mérite quelques commentaires et une conclusion.

     

    Le champ des compétences de la commission

     

    De la lecture des statuts, il résulte que :

     

    -        ratione materiae, l’objet de l’enquête ecclésiale porte sur les abus sexuels au sens des articles 372 à 378 bis du code pénal belge et le harcèlement sexuel sur les lieux de travail au sens des arrêtés -royaux des 18.09.1992 et 09.03.1995 (arts. 2 et 3 et annexe 2 des statuts).

    -        ratione personae, les auteurs des faits doivent être des prêtres, diacres, religieux ou agents pastoraux, ayant agi dans le cadre d’une relation pastorale au sens défini dans la note 1 annexée aux statuts.

    -        ratione loci, la mission concerne la province ecclésiastique belge (art.3 des statuts) (8)

     

    Son pouvoir et ses procédures

     

    Dévolus par les évêques et les supérieurs majeurs de Belgique, qui l’ont créée et en nomment les membres (arts. 3 et 6 des statuts), les pouvoirs de la commission relevaient uniquement de l’organisation interne de l’Église : nemo dat quod non habet.

     

    Ce qui n’empêchait pas ses statuts de faire appel à une terminologie judiciaire :

     

    Ceux-ci indiquent en effet que la commission est chargée du traitement des plaintes (arts. 1, 5, 11, 13…) déposées par des plaignants (arts.11, 12) ailleurs nommés requérants (art.13) et elle mène des enquêtes  (art. 3). Les dossiers lui sont transmis soit par les victimes présumées elles-mêmes ou leur représentant légal, soit par l’autorité ecclésiastique (évêques, supérieurs majeurs) ou les personnes de contact de la commission (art. 12). Ces personnes de contact accueillent les plaintes et orientent les requérants (art.13). Des équipes de référence instruisent les dossiers. Elles entendent les plaignants, les personnes que celles-ci accusent et les témoins. Elles recueillent les pièces relevantes  (art.17). L’évêque ou le supérieur majeur de celui contre lequel la plainte a été déposée sont tenus informés (art.15). Au cours de la procédure, les personnes de contact ou la commission elle-même peuvent prendre des  mesures  d’urgence (art.13) ou les recommander à l’évêque ou au supérieur majeur concerné (art.16).

     

    En toute hypothèse, les instructions devaient se terminer par des rapports conclus par des avis aux autorités ecclésiales sur la nature des mesures à prendre, « toutes autres dispositions canoniques restant sauves » (arts. 19, 20, 21).  

     

    Quelle peut être la nature des mesures énoncées dans le texte des articles ? Il s’agissait de mesures d’assistance au plaignant (information et orientation), sur le plan psychologique, pastoral, médical ou juridique (art.13) mais également, précise le préambule, « pour que justice soit faite au sein de l’Église » par les instances ecclésiales compétentes : donc, aussi des sanctions et des peines canoniques à infliger selon les règles du droit de l’Église.

                                              

    Ne pas interférer avec l’action judiciaire publique

     

    La justice de l’Église ne se substitue aucunement à celle de l’État. Sauf à ressusciter en droit belge le privilège du for ecclésiastique (9), faire justice au sein de l’Église n’est pas faire justice au sein de la société civile, dont les membres de l’Église font aussi partie : il s’agit de deux ordres distincts.

     

    Quoiqu’une enquête judiciaire publique et celle de la commission ecclésiale aient pu porter sur les mêmes faits, elles n’avaient pas le même objet.

     

    A cet égard, les statuts de la commission manifestent clairement le souci de ne pas interférer avec la justice séculière : dès le début de la cause, la possibilité de s’adresser à celle-ci est signalée au plaignant comme à la personne accusée (art. 17). La commission, précisent-ils en outre (art. 16), tient compte dans tout ce qu’elle fait de la mise en œuvre éventuelle d’une procédure judiciaire publique. Pour prévenir les confusions, le préambule des statuts ajoute (ce qui peut paraître illogique) que "si la personne en quête d’assistance s’adresse à la justice [séculière], l’enquête ecclésiastique interne ne sera pas entreprise. Et si elle l’était déjà, elle sera suspendue jusqu’à la fin de ladite procédure judiciaire". 

    S’agissant des informations susceptibles d’être transmises à la justice séculière, la commission pouvait proposer, à tout moment de la procédure, une mesure à prendre en ce sens par l’évêque ou le supérieur majeur de la personne accusée (art. 16 al. 2 des statuts) et, dans des circonstances exceptionnelles, informer elle-même cette justice (art. 16 al. 3 des statuts).

     

    Tenir compte des lois de l’État

     

    Les lois séculières d’ordre public s’imposent aux citoyens : les catholiques n’y font pas exception, nonobstant la liberté d’organisation que l’article 21 de la constitution garantit à l’Église (10).

     

    A cet égard, il convient notamment de prendre en compte la loi pénale belge qui érige en infractions le fait de :

     

    - ne pas dénoncer certains délits dont on serait le témoin (11) ;

    - ne pas assister une personne en danger grave, dans les conditions d’information et de risque que la loi précise (12) ;

    - révéler des secrets dont on est dépositaire par état ou par profession, hors les cas prévus par la loi : témoignage en justice ou devant une commission parlementaire, obligation légale, danger grave et imminent pour l’intégrité mentale ou physique d’un mineur dont on a reçu les confidences (13)

    Il est à remarquer que :

     

    - pas plus que l’obligation de porter assistance à une personne en danger, les exceptions à l’obligation de garder un secret professionnel ne créent ipso facto un devoir de dénoncer les faits à la justice ;

    - dans les deux cas, toute la question posée est celle du choix, en conscience, de la solution la plus appropriée considérant la gravité des faits, surtout lorsqu’il s’agit de la protection des mineurs ;

    - au regard de la loi belge, le secret ecclésiastique est un secret professionnel soumis aux mêmes règles que les autres : ni plus, ni moins (14).

     

    Coopérer avec la justice séculière

     

    Que la commission saisie d’une plainte entreprenne une enquête relevant de l’ordre interne à l’Église n’empêchait en aucun cas le pouvoir judiciaire d’enquêter sur la nature délictueuse éventuelle des mêmes faits, dans l’ordre et aux fins propres de la société civile. La commission était même tenue d’y coopérer dans la mesure exposée ci-dessus, conformément à la loi et à ses propres statuts.

     

    Suite à l’appel lancé par le nouvel archevêque de Malines-Bruxelles après la révélation des abus sur mineur dont l’évêque de Bruges s’était rendu coupable (15), les plaintes ont brusquement afflué (16) au guichet de la commission Adriaenssens.

    A tel point que des dispositions (17) furent prises le 10 juin 2010 avec le ministre de la Justice et le collège des procureurs généraux pour faciliter le traitement, par le parquet, des informations que la commission déciderait de lui transmettre : création d’un point de contact spécifique, pour la transmission éventuelle de dossiers par la commission au parquet fédéral ainsi que d’un groupe de travail au sein du collège des procureurs généraux, pour définir la politique des poursuites contre les abuseurs ecclésiastiques, en informer le ministre comme le parquet et répondre aux interrogations de la commission ecclésiale. Mais, ainsi que l’a justement déclaré le procureur général de Liège, Cédric Visart de Bocarmé, il n’était pas question de créer un filtre ou des enquêtes à double étage : « si la commission décide de ne pas transmettre certains dossiers à la justice, c’est sa responsabilité mais elle s’expose alors à ce qu’un juge d’instruction en ordonne la saisie » (Het Nieuwsblad, 27 juin 2010).

     

    Nonobstant ces précautions, une saisie spectaculaire de l’ensemble des dossiers a eu lieu le 24 juin, au cours d’une perquisition « tous azimuts » ordonnée par le magistrat instructeur Wim De Troy, paralysant du même coup les activités de la commission (18).

     

    Ces saisies ont-elles été régulières, au regard notamment des conditions de la perquisition chez des détenteurs de secrets professionnels ? À chacun ses secrets : le texte de l’arrêt d’annulation rendu à cet égard, le 13 août 2010, par la chambre des mises en accusation n’est, à ce jour, pas encore officiellement connu, en raison du secret de l’instruction invoqué par le magistrat instructeur. 

    Pour conclure

     

    1.      Les abus sexuels sont une triste réalité, sociologiquement très sensible. A fortiori s’ils sont perpétrés sur des mineurs par un nombre non négligeable de ministres d’un culte voué à la sanctification de ses fidèles.

     

    2.    Certes, les faits incriminés relèvent, dans son ordre propre, de la justice pénale séculière : l’objet de celle-ci consiste à défendre la société civile contre les comportements qu’elle juge anti-sociaux au terme de la loi et sanctionne à ce titre.

     

    3. Mais ces faits concernent aussi l’Église, dans l’ordre spirituel qui    est le sien : celui de la pénitence (sacramentelle et disciplinaire), de la guérison morale, de la compassion et de la charité. Si une commission ecclésiale s’inscrit dans cette perspective, son objet ne peut être confondu avec celui de la justice séculière.

     

    4      L’Église est une réalité distincte de l’État. Leurs compétences ne sont pas les mêmes mais ils ne sont pas séparés, si l’on entend par là qu’ils n’auraient rien à voir ensemble. La constitution belge favorise plutôt leur indépendance dans le respect mutuel. Les statuts de la commission Adriaenssens  comme le protocole du 10 juin 2010 convenu avec le ministre de la justice et le collège des procureurs généraux relèvent de cet esprit. 

     

      5 Mais, dans le climat créé par la révélation des nombreux scandales cléricaux, elle a pâti des soupçons alimentés par : 

      

    o       le fait que l’un des évêques initiateurs de cette commission spéciale s’est lui-même révélé justiciable de ses enquêtes ;

    o       la confusion, du moins apparente, créée par l’emploi, dans ses statuts, d’un vocabulaire de type judiciaire (19) qu’ils appliquent à l’action d’une instance sans juridiction (même canonique).

    o       La mentalité séculariste heurtée par l’ampleur des plaintes déposées devant la seule commission ecclésiale ; 

    o       La crainte des réflexes corporatistes de l’Église, sous le couvert du secret ecclésiastique. 

     

    La commission Adriaenssens était sans doute une « mauvaise bonne idée ». L’histoire montre que les commissions d’exception, spéciales ou « sui generis » suscitent toujours la méfiance et les tensions (20). A fortiori lorsqu’on leur fixe des objectifs ambitieux et quelque peu diffus. Mais si, en vertu de l’annulation possible de leur saisie, les dossiers devaient être rendus à ceux auxquels ils avaient été confiés, qu’en feraient-ils désormais ?

     

    Post scriptum

     

    Les lignes qui précèdent ont été écrites et publiées début septembre, dans le n° 3-2010 de nos modestes « Éphémérides de Saint-Lambert » (21). 

     

    Entre-temps, la controverse a poursuivi son chemin : un arrêt rendu le 9 septembre dernier par la chambre des mises en accusation de la cour d’appel de Bruxelles a invalidé les perquisitions menées le 24 juin 2010 à l’archevêché de Malines et au domicile du cardinal Danneels, comme l’arrêt du 13 août (dont le texte n’a pas été rendu public à la demande du magistrat instructeur) l’avait déjà fait pour celles qui eurent lieu, le même 24 juin, au siège de la commission Adriaenssens. Selon les informations officieuses, la cour a en effet jugé les perquisitions menées par le juge Wim De Troy (22) disproportionnées et les saisies opérées à la commission Adriaenssens  irrégulières au regard des dispositions s’appliquant aux détenteurs de secrets professionnels (23).

     

    Commentant l’arrêt du 9 septembre, le ministre Stefaan De Clerck a alors appelé l’Église et le Pouvoir judiciaire à contribuer, de commun accord, à l’œuvre de justice dans un esprit respectueux des compétences de chacun (24).

     

    Presqu’aussitôt, lors d’un rencontre avec la presse organisée le 13 septembre, la conférence épiscopale (représentée par son président, Mgr Léonard, et deux de ses membres, NN.SS. Harpigny et Bonny) a annoncé la mise sur pied, au plus tôt à la fin de cette année, d’un centre ecclésial destiné à prendre la suite de la commission Adriaenssens, après l’établissement d’une relation de confiance « sur une base plus solide » avec les autorités publiques : judiciaires, sociales et de la santé. Les évêques ont aussi précisé que si les dossiers de la commission Adriaenssens saisis par le juge De Troy étaient rendus aux autorités ecclésiastiques, ils seraient maintenus sous scellé jusqu’à la constitution du centre précité.

     

    Réagissant le 17 septembre à l’annonce faite par la conférence épiscopale, les procureurs généraux ont rappelé qu’ils excluaient toute forme de coopération avec un tel centre donnant à penser que celui-ci détiendrait une prérogative publique, par exemple en faisant lui-même le tri entre les affaires prescrites et les autres, a précisé le procureur général de Mons. Mais en a-t-il jamais été question ?

     

    Le 12 octobre, la cour de cassation a annulé les arrêts de la chambre des mises en accusation de la cour d’appel de Bruxelles des 13 août et 9 septembre invalidant les perquisitions du 24 juin, au motif que la chambre n’avait pas entendu les victimes qui s’étaient constituées parties civiles devant elle et, par conséquent, la cour de cassation a renvoyé l’affaire devant cette même chambre autrement constituée.

     

    Par une déclaration publiée le 20 octobre, la conférence épiscopale a renoncé à la création d’une nouvelle instance ecclésiale « sui generis » pour succéder à la commission Adriaenssens : plus sagement, à mon sens, l’Église exercera désormais les prérogatives pastorales et disciplinaires qui sont les siennes selon les voies ordinaires dont elle dispose dans son organisation interne.

     

    Toutefois, s’agissant des procédures en cours devant la justice étatique, l’épiscopat a introduit devant la cour d’appel de Bruxelles, indépendamment du sort final que la chambre des mises réservera à la demande d’invalidation des perquisitions du 24 juin, une demande de récusation de leur auteur, le juge d’instruction Wim De Troy, sans  en divulguer cependant le motif. La poursuite de l'enquête dont il reste actuellement saisi est donc suspendue au sort qui sera réservé par la cour d'appel du Bruxelles tant aux arrêts des 13 août et 9 septembre qu' à cette la demande de récusation du juge introduite auprès d'elle par les autorités ecclésiastiques.

     

    Par ailleurs, un des organes du pouvoir législatif s’invite aussi maintenant dans le dossier. Après que l’Église eut renoncé à la sienne, la Chambre des Représentants, dans sa séance du 28 octobre 2010, a institué à son tour une Commission spéciale relative, cette fois, « au traitement d’abus sexuels et de faits de pédophilie dans une relation d’autorité, en particulier au sein de l’Église ».

     La nature et l’objet des deux commissions diffèrent. Il s’agit ici d’une commission parlementaire, créée par un acte de la puissance publique et non d’une instance privée. A priori, elle ne se limite pas aux seuls abus commis au sein de l’Église. Par ailleurs, elle se défend d’être une commission d’enquête au sens strict mais elle n’exclut pas de le devenir, suite au rapport qu’elle déposera.

     Son objet est défini par l’article 1er de la résolution qui l’institue en vertu de l’article 21 al.2 du Règlement de la Chambre :

     « Il est institué une commission spéciale chargée :

    1° d’examiner la manière dont l’état, plus particulièrement l’appareil judiciaire et les services associés ont traité les faits d’abus sexuels ; à cet égard, la commission spéciale examine les modalités de la collaboration entre l’appareil judiciaire et l’église catholique lors de la découverte de faits d’abus sexuels commis au sein de cette dernière et notamment:

    a) - les raisons pour lesquelles après tant d’années les victimes ont aujourd’hui décidé de parler spécialement dans le cadre ecclésiastique et pourquoi, à l’époque, elles n’ont introduit aucune plainte

    - les facteurs qui ont pu justifier, le cas échéant, des retards dans le traitement de certains faits ou de certaines plaintes d’abus sexuels commis au sein d’une relation pastorale et/ou le non aboutissement de certaines procédures ;

    b) - les échanges entre l’église catholique et la Justice lors de la recherche et lors de la découverte de faits d’abus sexuels commis au sein de cette même église ;

    - les motifs ayant amené le ministère public et la commission pour le traitement des plaintes pour abus sexuels dans le cadre d'une relation pastorale instituée au sein de l’église catholique à conclure un protocole visant à réguler les flux d’information ;

    - les relations et les modalités effectives de coopération entre la Justice et les autorités de l’église catholique;

    - la conformité de ce protocole, de ces relations et de ces modalités de coopération, aux principes constitutionnels, dont les principes de l’égalité, de la non-discrimination et de l’indépendance du ministère public dans l’exercice des recherches et des poursuites individuelles ;

    2° d’examiner la prise en charge de la victime et rechercher comment les abus sexuels au sein d’une relation d’autorité et spécialement au sein d’une relation pastorale, peuvent être mieux prévenus, détectés et abordés;

    3° d’examiner les différents aspects de la relation entre les services d’aide et la justice et d’analyser de la problématique du secret professionnel ;

    4° d’examiner les solutions à apporter, y compris sur le plan législatif, aux difficultés qu’elle aura identifiées du point de vue de la prise en charge par l’appareil judiciaire et par les services associés des victimes d’abus sexuels commis dans une relation d’autorité ;

    5° de dégager des solutions propres à améliorer les rapports entre l’appareil judiciaire et les services associés »

     L’article 2 précise que « la commission spéciale entend les personnes et demande les documents qu’elle juge nécessaires. Elle pourra faire appel à des experts. Cette commission fixe toutes les règles de fonctionnement qui ne sont pas prévues dans le présent texte, sans porter atteinte au règlement de la Chambre des Représentants ».

     C’est donc bien la manière dont a fonctionné la défunte Commission de l’Eglise pour traiter les abus sexuels commis par des clercs dans le cadre d'une relation pastorale qui sera au centre des « examens » auxquels va procéder cette Commission spéciale de la Chambre des Représentants.

     Affaire à suivre…

     

    Liège, le 28 octobre 2010,

     

    Jean-Paul SCHYNS

    ancien assistant à la faculté de droit de l’université de Liège

     

    Notes:

     

    (1)               Pédopsychiatre, professeur à la faculté de médecine de la Katholieke Universiteit Leuven (K.U.L), chef du service de pédopsychiatrie à l’hôpital universitaire de Leuven.

    (2)             En l’occurrence, les personnes qui y souscrivent : les membres de la commission et de ses organes, ceux qui les nomment (évêques, supérieurs majeurs), les plaignants ; et non l’Église, ni les diocèses ou les ordres religieux qui, comme tels, qui sont dépourvus de la personnalité morale requise.

    (3)             « L’Église belge et le traitement judiciaire de la pédophilie », 14 juillet 2010.

    (4)             Site créé par l’asbl « institut d’étude sur la justice ».

    (5)             Pierre Legros est professeur de déontologie à la faculté de droit de l’Université Libre de Bruxelles (U.L.B.) et ancien bâtonnier de l’ordre français du barreau de Bruxelles, où il est inscrit comme avocat, associé à l’ancien sénateur et ministre d’État Roger Lallemand.

    (6)             De toute façon ? dans les limites et les conditions que la loi pénale spécifie cfr. infra

    (7)             L’article 21 de la constitution vise les activités religieuses au sens strict. La relation  pastorale définie par l’annexe 1 aux statuts (administration des sacrements, catéchèse, prédication de la foi, direction spirituelle etc.) entre dans ce cadre. 

    (8)             Depuis le concordat de 1801 entre l’empire français et le saint-siège, la « province ecclésiastique de Malines » inclut tous les diocèses de l’actuelle Belgique (y compris désormais les diocèse créés [Hasselt] ou recrées [Anvers] en 1961 par la bulle Christi Ecclesia du 8 décembre 1961.) 

    (9)             c'est-à-dire la compétence exclusive des tribunaux de l’Église pour juger les personnes ecclésiastiques et les matières spirituelles (comme les causes matrimoniales).

    (10)          le caractère impératif de la législation pénale ou d’autres dispositions d’ordre public ne peut évidemment pas être interprété comme autorisant pareille législation à s’appliquer si elle limite la liberté religieuse de manière incompatible avec l’article 19 de la constitution ou les dispositions du même ordre incluses dans les conventions internationales souscrites par la Belgique.

    (11)           Délits contre la sûreté publique, la vie ou la propriété des individus. Cette infraction n’est pas assortie d’une peine. Art. 30 du code d’instruction criminelle.

    (12)          Infraction assortie d’une peine d’amende et d’emprisonnement. Arts 422 bis et ter du code pénal.

    (13)          Infraction assortie d’une peine d’amende et d’emprisonnement, renforcées si le péril concerne un mineur. Arts 458 et 458 bis du code pénal.

    (14)          De lege lata, le secret ecclésiastique, au sens le plus large, ne peut pas fonctionner en droit belge comme un « privilège du for ».  Par ailleurs, selon le droit canonique lui-même, seul le secret de la confession est absolu. Cette exigence est, actuellement, conciliable avec la législation de l’État.

    (15)          La publication de l’aveu et de la démission de l’évêque est datée du 23 avril 2010.

    (16)          Selon le professeur Adriaenssens, 200 plaintes ont été enregistrées après la démission de l’évêque de Bruges, portant le nombre total à 475 (La Libre Belgique, 21-22.08.10). Naturellement, 475 plaintes ne signifient pas 475 accusés: nombre de plaintes peuvent concerner un même individu.

    (17)          sous forme de circulaire  (ministérielle ou administrative ?) selon Le Soir du 25.06.06. Dans La Libre Belgique des 21-22.08.10, le professeur Adriaenssens parle de protocole conclu avec les procureurs généraux.

    (18)          Cette perquisition n’est pas la conséquence d’un refus opposé au pouvoir judiciaire par la commission. Celle-ci avait, motu proprio, communiqué à la justice 14 dossiers (sur 475 affaires, la plupart prescrites aux yeux du droit pénal belge). Mais le magistrat a pris l’initiative d’investiguer plus outre ; ce qui est son droit, sous réserve de respecter les procédures requises.

    (19)          plainte, enquête, requérants, témoins, infractions se référant au code pénal (et non canonique) etc.

    (20)        sur l’expérience  des dispositifs canoniques spécifiques face aux cas de délits sexuels du clergé, on peut lire la synthèse publiée par le professeur Louis-Léon Christians, ancien vice-président de la commission Adriaenssens  in Jean-Pierre Schouppe (dir.), Vingt cinq ans après le code. Le droit canon en Belgique, Bruylant, Bruxelles 2008, pp. 239-255.

    (21)          bulletin trimestriel de la communauté catholique suivant le missel de 1962 à la chapelle Saint-Lambert de Verviers

    (22)         sous le nom de code, d’un goût douteux, « opération calice »

    (23)        La Libre Belgique du 10.09.10

    (24)        Le Ministre de la Justice a rappelé l’accord intervenu le 10 juin entre le ministère public et la commission Adriaenssens : « nous devons, a-t-il déclaré, retomber sur cet accord antérieur qui doit servir de base pour aller plus loin », insistant sur le fait que le dossier judiciaire ne pouvait être arrêté, en tenant néanmoins compte des circonstances spécifiques telles que, par exemple, le secret de la confession.

     

     

     

      

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     L'UNION, CERCLE ROYAL DES ETUDIANTS CATHOLIQUES DE LIEGE

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    qui a contribué à cette publication, met l'ouvrage en vente au prix de faveur de 18 euros (port compris)

    Pour recevoir le livre à votre adresse, il suffit de verser cette somme au compte IBAN BE15 2400 0748 1330  BIC GEBABEBB de l'Union, Cercle Royal des Etudiants Catholiques de Liège asbl, Rue Vinâve d'île, 20 bte 64 à 4000 Liège. avec la mention "A contretemps".

    moutonsdepanurge.jpg Un essai critique des moeurs contemporaines: familles recomposées, homoparentalité, mort dans la dignité, la parole est aujourd'hui au politiquement correct. Né en 1980, au pays de l'american way of life, le politiquement correct n'a pas tardé à franchir l'Atlantique. Son discours, qui se réclame de la démocratie, est -en réalité- l'arme principale d'une pensée dominante, voire unique. Arme redoutable, la parole, notait déjà Talleyrand, a été donnée à l'homme pour déguiser sa pensée. Sous prétexte de promouvoir le "vivre ensemble", la société, qui prône le libre arbitre individuel, devient en réalité liberticide. Pis encore, de contrainte sociétale, le politiquement correct se mue parfois, sournoisement, en contrainte légale: toute opinion politiquement incorrecte est alors bâillonnée par un pouvoir civil "démocratique".

    Avec un humour parfois corrosif, le présent essai dénonce, sans détour, quelques-uns des effets délétères d'une dictature qui s'avance sous le masque du dialogue et de la tolérance. Interdiction au citoyen-électeur de contester la moindre parcelle de la modernité, cette matrice évidente d'un prétendu progrès. Toute remise en question des "avancées" dans les domaines de la bioéthique, de la spiritualité, de l'intelligence artificielle est taxée de rétrograde, réactionnaire, totalitaire, voire néo-fasciste. Examinant ici à contretemps les arguties du "prêt à penser" politiquement correct, l'auteur montre comment, tels les moutons de Panurge ou les aveugles de Bruegel, bien des contemporains "progressent" sur la voie du précipice et de la décadence.

    Mutien-Omer HOUZIAUX, romaniste, a connu un parcours universitaire marqué par l'interdisciplinarité.3790036388.jpg Chercheur et enseignant en plusieurs Facultés. Pionnier dans les domaines de l'enseignement et de l'anamnèse assistés par ordinateur à Liège, en Belgique, ainsi qu'au Canada et en Argentine. Nombreuses publications, dont plusieurs essais touchant à la linguistique, à l'informatique appliquée, à la pédagogie et à la musicologie. L'auteur a été organiste titulaire de la cathédrale de Liège durant 25 ans. Il tient aujourd'hui les orgues à l'église du Saint-Sacrement (Bd d'Avroy, 132 à Liège) tous les dimanches, à la messe de 11h15.

    3528973970_2.jpgLe préfacier de l'ouvrage, Mgr Michel DANGOISSE (décédé au mois d'août de cette année) était doyen du Chapitre cathédral de Namur. Diplômé de l'Université de Louvain, professeur de langues anciennes, de français, d'histoire et de sciences religieuses, il dirigeait la revue Pâque Nouvelle (fondée par Mgr André-Joseph Léonard). Il est aussi l'auteur d'une étude critique, à paraître prochainement, sur la traduction française du missel romain de Paul VI (1970).

     

    Tous renseignements: courriel sursumcorda@skynet.be 

     

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  • Ecclesia Mater et Meretrix?

     

    UN RAPPORT QUI FAIT DU BRUIT

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    le pédopsychiatre Adriaenssens

     

    Tout comme la conférence de presse de l’épiscopat le 13 septembre, celle que le professeur Adriaenssens a cru devoir donner le 10 de ce même mois pour présenter le rapport conclusif de la défunte commission « pour le traitement des plaintes pour abus sexuel dans le cadre d’une relation pastorale » n’a eu d’autre effet, jusqu'ici, que de susciter un nouveau déferlement médiatique contre l’Église. Là où aurait du prévaloir une retenue propice à la guérison des cœurs et à la conversion des consciences, on a relancé le concert des imprécations contre l’institution ecclésiale et c’est la psychothérapie du bouc émissaire qui a prévalu. Une victime expiatoire fut vite trouvée : c’est le pape. Benoît XVI n'a-t-il pas eu le malheur de déclarer, le jour de la fête de la nativité de la sainte Vierge Marie le 8 septembre dernier, que face aux abus du clergé la pénitence était plus efficace que les changements de structures ? (1) Il s’est trouvé jusqu’au porte-parole du cardinal Danneels pour le lui reprocher publiquement (2) (3) !

     

    Sans vouloir ajouter du bruit au bruit, des catholiques belges ont adressé, en réplique, à l’un des premiers violons de l’orchestre, le journal La Libre Belgique, le texte que voici :

     

    "En 2002, Jean-Paul II déclarait : « il n’y a pas de place dans la prêtrise ni dans la vie religieuse pour ceux qui font ou feraient du mal aux jeunes gens. »

     Toujours en 2002, les évêques de France déclarent qu'ils ne peuvent rester passifs, ou couvrir des actes délictueux : « les prêtres qui se sont rendus coupables d'actes à caractère pédophile doivent répondre de ces actes devant la justice. »

     En février 2010, le pape convoque les évêques irlandais au Vatican. Benoît XVI déclare que  la pédophilie est un « crime atroce » et un « péché grave qui offense Dieu et blesse la dignité de la personne humaine » et il affirme aussi qu'une préoccupation déplacée pour la réputation de l'Eglise et pour éviter les scandales a eu pour résultat de ne pas appliquer les peines canoniques en vigueur et de ne pas protéger la dignité de chaque personne. Il faut agir avec urgence pour affronter ces facteurs, qui ont eu des conséquences si tragiques pour les vies des victimes et de leurs familles et qui ont assombri la lumière de l'Evangile disait encore le Saint Père.

     Nous, catholiques, avons tous en tête la parole de l’Evangile : «  celui qui scandalisera un seul de ces petits qui croient en moi, il vaudrait mieux pour lui qu'on lui pendît au cou une meule de moulin et qu'on le jetât au fond de la mer.»

     Nous sommes profondément bouleversés et attristés par ce que nous lisons dans le  rapport de la commission Adriaenssens.

    Dans un même temps, nous voulons aussi nous joindre à l’appel lancé à l’initiative de François Taillandier, Natalia Trouiller, Koz, François Milo, appel signé initialement par 70 intellectuels français, puis par trente mille autres personnes sur Internet : « … au-delà du droit à l’information, légitime et démocratique, nous ne pouvons que constater avec tristesse, … que de nombreux médias … traitent ces affaires avec partialité, méconnaissance ou délectation. De raccourcis en généralisations, le portrait de l’Église qui est fait dans la presse actuellement ne correspond pas à ce que vivent les chrétiens catholiques. »

    Dans cet ordre d’idées, aux USA, le journaliste Tom Hoopes a noté que, dans le premier semestre 2002, les 61 plus grands journaux californiens avaient consacré près de 2000 articles aux cas d'abus sexuels commis dans l'Eglise catholique, la plupart de ceux-ci s'étant produits dans un passé assez éloigné. Dans le même temps, ces journaux ont écrit 4 articles seulement sur les découvertes par le gouvernement fédéral de cas pourtant bien plus nombreux, et plus actuels, d'abus sexuels dans les Public schools.

     L’histoire de la photo trouvée sur le PC du cardinal Danneels est symptomatique de l’atmosphère ambiante.[

     En France, le cardinal André Vingt-Trois déclare en avril 2010 qu'une « trentaine de prêtres et de religieux purgent la peine à laquelle ils ont été condamnés, conformément à la loi ». Il demande que l'opprobre ne soit pas pour autant jeté sur « l'ensemble des vingt mille prêtres et religieux de France »

     Nous regrettons que cet opprobre généralisé touche aujourd’hui l’Eglise de Belgique.

    On oublie les contributions généreuses offertes à l'Eglise et à la société par des générations passées de prêtres dans notre pays. La vindicte populaire (qui abonde dans les forums des journaux) s’en prend à l’ensemble du clergé alors que l’immense majorité des prêtres remplit son sacerdoce avec enthousiasme et dévouement absolu.

     L’Eglise doit se remettre en question ; la société aussi.

     La publication du rapport de la Commission Adriaenssens est un cas d’école de ce que l’historien des religions américain Philip Jenkins appelle moral panic.

    Ce concept explique comment certains problèmes sociaux sont abordés de façon biaisée par des statistiques brutes. Philip Jenkins a mis en évidence le rôle, dans la création de paniques morales, d’entrepreneurs moraux dont l’objectif n’est pas déclaré. Les paniques morales faussent la perception des problèmes et compromettent l’efficacité des mesures qui devraient les résoudre. À une mauvaise analyse (le problème touche essentiellement l’Eglise catholique) on ne pourra apporter qu’une mauvaise solution.

    Jenkins a bien montré comment la question des prêtres pédophiles est peut-être l’exemple le plus typique d’une panique morale. Sont présents en effet les deux éléments caractéristiques : des données réelles au départ et une utilisation incorrecte de ces données par l’action d’ « entrepreneurs moraux » ambigus.

     Nous sommes en train de vivre un procès public à charge contre l’Eglise alors que c’est l’ensemble de la société qui devrait être interrogée.

     Les témoignages du rapport Adriaenssens devraient être étudiés de façon rigoureuse. Il s’agit de données brutes ; à la page 11 du communiqué de presse, le graphique ne correspond pas tout à fait aux chiffres ; dommage aussi que pour 245 cas, on ne connaisse pas l’âge des victimes et pour certaines pas même le sexe. Il faut aussi réfléchir à la valeur juridique de témoignages envoyés par e-mail avec des informations brutes. Quoi qu’il en soit ce rapport devra être le point de départ des travaux à venir.

    Il nous semble aujourd’hui impératif de savoir si le nombre de cas de pédophilie est plus nombreux parmi les prêtres et les religieux catholiques que dans les autres catégories de personnes.

    Pour Jenkins, aux USA, le nombre de pédophiles est plus élevé parmi les membres du clergé protestant que chez les prêtres catholiques. Le problème n’est donc pas le célibat : la majorité des pasteurs protestants sont mariés. Sur une même période où une centaine de prêtres américains étaient condamnés pour abus sexuel sur des enfants, le nombre de professeurs d’éducation physique et d’entraîneurs d’équipes sportives – eux aussi en grande majorité mariés – reconnus coupables du même crime par les tribunaux américains avoisinait les 6000.

    Notons enfin avec le sociologue Massimo Introvigne qu’il y a également eu aux USA de nombreux cas retentissants de prêtres accusés qui étaient innocents. Ces cas se sont en effet multipliés depuis 1990, alors que certains cabinets d’avocats ont compris qu’ils pouvaient arracher des millions sur la base de simples soupçons. La présomption d’innocence doit encore exister. Soyons prudents. 

    Le principal reproche que l’on fait à l’Eglise est d’avoir fait prévaloir la loi du silence. Cette loi du silence existait aussi dans la société.

    Que l’on fasse une commission d’enquête parlementaire sur la maltraitance des enfants au sein de l’Eglise mais aussi dans l’ensemble de la société puisque 90% des cas d’abus se passent au sein des familles. 

    L’Eglise a récemment, bon gré ou mal gré, pris conscience d’un mal qui la rongeait. Que la société en fasse autant. L'acharnement médiatique qui frappe si durement l'Eglise ne doit plus servir à cacher la triste réalité :  cette prise de conscience, elle doit maintenant devenir un exemple pour toute la société, que ce même mal touche tout autant et peut-être plus encore."

    Texte publié dans "La Libre Belgique" du 14.09.10, sous la signature de: Luc Balleux, avocat; Jean Baudry, avocat; Chantal Leroy; Anne-Michèle Perini; Jean-Paul Schyns, ancien assistant à la Faculté de Droit de l'université de Liège; Ludovic Werpin, conseiller pédagogique; Thibaut Werpin; Dimitri Wiame, catholiques belges.

     

    ________

    (1) Lors de l’audience générale du  mercredi 8 septembre, Benoît XVI a précisé, à travers la personnalité de sainte Hildegarde de Bingen (1098-1179), sa vision personnelle du renouvellement de l’Église :

    « De manière particulière, Hildegarde s’opposa au mouvement des cathares allemands. Ces derniers – à la lettre cathares signifie « purs » – prônaient une réforme radicale de l’Eglise, en particulier pour combattre les abus du clergé. Elle leur reprocha sévèrement de vouloir renverser la nature même de l’Église, en leur rappelant qu’un véritable renouvellement de la communauté ecclésiale ne s’obtient pas tant avec le changement des structures, qu’avec un esprit de pénitence sincère et un chemin actif de conversion. Il s’agit là d’un message que nous ne devrions jamais oublier. »

    Tout est dit :  " arrêtez la révolution permanente, retournez à la pénitence et au pardon " .

    (2) Trois évêques flamands, dont deux récemment nommés par Benoît XVI lui-même, NN.SS. De Kesel (Bruges), Bonny (Anvers) et Hoogmartens (Hasselt) ont saisi la balle au bond pour solliciter la réouverture du débat sur la règle du célibat sacerdotal obligatoire dans l'Eglise latine, suivis, à bonne distance il est vrai, par Mgr Jousten (Liège) et l'éphémère porte-parole de la conférence épiscopale, M. Jürgen Mettepeningen.

     Dans une interview à la radio flamande VRT, reprenant une antienne déjà bien connue, Mgr De Kesel a déclaré: "Je pense que l'Eglise doit se poser la question de savoir s'il convient de conserver le caractère obligatoire du célibat" et, poursuivant sur sa lancée: " on pourrait dire qu'il y a des prêtres célibataires mais que des personnes pour lesquelles le célibat est humainement impossible à respecter devraient aussi avoir la chance de devenir prêtre" pour conclure: " la discussion sur le célibat [des prêtres] pourrait avoir une suite bien plus rapide que celle sur l'accès des femmes à la prêtrise". 

    Cette réflexion en vaut une autre: 1°) l'accès au sacerdoce n'est pas un droit de l'homme (ou de la femme) qu'il conviendrait de reconnaître: c'est l'Eglise qui appelle à la lumière de la Parole évangélique; 2°) il n'est pas démontré qu'une corrélation puisse être établie entre la pédophilie et le célibat sacerdotal; 3°) il est un fait que trop fréquemment aujourd'hui (comme à d'autres époques de l'histoire: XIIe siècle ou XVIe siècle) la règle du célibat sacerdotal est mal vécue: est-ce une raison suffisante pour l'abandonner ou, au contraire, l'approfondir et la renforcer? C'est précisément pour lutter contre la dissolution des moeurs ecclésiastiques et protéger l'antique obligation de continence imposée au clergé qu'elle fut codifiée par le 1er concile de Latran (1123).

    (3) Cerise sur le gâteau: dans une interview publiée le 2 octobre par le journal "De Morgen", le professeur Adriaenssens estime que le pape Benoît XVI aurait du démissionner, comme l'avait fait le ministre belge de la Justice, Stefaan De Clerk, lors de l'évasion de Marc Dutroux en 1998. Etrange comparaison. Pour mémoire, l'actuel ministre de la Justice s'appelle...Stefaan De Clerk.

     

     

     

     

  • L'EGLISE ET L'ETAT: réflexion faite en marge de l'actualité belge

     

     

    INOPERANTES LAÏCITES

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    Une conférence avait été organisée le 24 janvier 2008 à Bruxelles, sous  le titre « Héritage chrétien » en République et Consociation. L’ouvrage collectif qui en est issu est maintenant publié[1]. Des historiens et des sociologues, la plupart issus de l’ULB et de la Sorbonne, y apportent surtout leurs lumières sur le développement du concept de la « laïcité » : sa place dans la vie publique belge et française, dans les législations respectives des deux pays et les conventions internationales ou supranationales qui s’imposent à elles. Il ressort de ces échanges que la notion même de laïcité (le mot dérive de laïc, non clerc, qui est d’origine ecclésiale) n’est pas univoque, ni en termes de sociologie, ni en termes de droit positif. La question se pose alors de savoir si une notion aussi imprécise, voire confuse, présente une vraie utilité opérationnelle pour les sciences humaines.

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    L’article 1er de la constitution française de 1958 proclame que la France est un Etat laïc, sans définir ce qu’il entend par là. A cet égard, il eût été intéressant de disposer d’une analyse jurisprudentielle, malheureusement absente des dissertations sociopolitiques de ce colloque. 

    Rien n’est simple. Ainsi, le concept de laïcité n’est pas forcément synonyme de séparation des Eglises et de l’Etat. De ce point de vue même, la célèbre loi de 1905 expulsant l’Eglise de la sphère publique française n’a pas empêché la République d’entretenir des liens avec elle : loi sur les édifices publics mis à la disposition du culte (1907), rétablissement des relations diplomatiques avec le Saint-Siège (1921), applicabilité du concordat de 1801 en Alsace-Moselle (1925), loi Debré sur les rapports entre l’Etat et les établissements scolaires privés (1959), accord avec le Saint-Siège sur la reconnaissance des diplômes délivrés par l’enseignement supérieur catholique (2008) etc.

    Ajoutant à la perplexité de l’observateur étranger, l’actuel président de la République française, lors de sa réception paradoxale (pour le Chef d’un Etat séparé de l’Eglise) comme chanoine honoraire de l’archi-basilique du Latran à Rome (2007), a appelé de ses vœux l’avènement d’une laïcité positive reconnaissant que les religions constituent un atout sociétal ![2]

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    Les choses sont-elles plus claires en Belgique ? L’Etat belge n’est pas laïc en ce sens qu’il serait porteur de valeurs publiques transcendant les religions privées, ni obligatoirement agnostique devant le phénomène religieux : la laïcité est assimilée, par la loi, aux cultes reconnus, en tant que philosophie du « libre examen ».  Parler de séparation de l’Eglise et de l’Etat serait aussi inapproprié, si l’on entend par là qu’ils n’ont rien à voir ensemble. 

    Les dispositions constitutionnelles et légales organisent plutôt une certaine indépendance dans le respect mutuel[3]. Et même un peu plus : à ce titre, on peut citer, la rémunération par l’Etat des ministres des cultes reconnus et divers privilèges ou contraintes connexes, la répression pénale propre aux désordres et outrages touchant à l’exercice ou aux objets du culte, à la personne de ses ministres ou à leur habit officiel ; l’organisation de préséances protocolaires ou diplomatiques; les honneurs civils et militaires rendus lors de certaines cérémonies religieuses officielles, comme le « Te Deum », mais aussi les poursuites pénales spécifiques contre les ministres du culte qui attaqueraient « directement » un acte de l’autorité publique ou célébreraient le mariage religieux des époux avant leur mariage civil.

    On comprend ainsi pourquoi la neutralité des pouvoirs publics n’est pas mentionnée, comme telle, dans la constitution même si certains la déduisent de l’interdiction des discriminations et du principe d’égalité qui y sont inscrits. Face à la pluralité des religions, cette neutralité est, pour le moins, toute relative puisque l’Etat (et à sa suite les autres pouvoirs publics) soutient le libre développement des activités religieuses et apporte son aide et sa protection aux sept cultes (laïcité comprise) qu’il reconnaît, parmi lesquels – primus inter pares – le catholicisme romain. Il faut donc, à tout le moins, parler d’une neutralité « positive ». 

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    Les traités internationaux ou supranationaux auxquels souscrivent la France et la Belgique n’imposent aucun modèle à leurs relations avec les cultes. En Europe, comme ailleurs, le statut de ceux-ci varie.

    L’article 17 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne précise que :

     

    - « L’Union respecte et ne préjuge pas du statut dont bénéficient, en vertu du droit national, les Eglises et les associations ou communautés religieuses dans les Etats membres » ;

    -« L’Union respecte également le statut dont bénéficient, en vertu du droit national, les organisations philosophiques et non confessionnelles » ;

    -« Reconnaissant leur identité et leur contribution spécifique, l’Union maintient un dialogue ouvert, transparent et régulier avec ces Eglises et organisations ».

     

    Il en résulte que :

    - de la laïcité de l’Etat (France) aux religions d’Etat (Danemark, Grèce, Norvège, Royaume-Uni), en passant par les régimes concordataires (du type espagnol, italien, polonais, portugais, allemand, alsacien-mosellan) ou sui generis (comme en Belgique ou en Irlande), l’Union européenne respecte et s’accommode des divers statuts conférés aux cultes par les droits nationaux de ses Etats membres ;

    - dans sa propre relation avec les cultes, l’Union est plus proche du modèle belge que de la laïcité républicaine à la française : celle-ci demeure une exception historiquement datée et sans doute appelée à évoluer. 

    Quoi qu’il en soit des gloses de cet ouvrage sur la portée du concept de « laïcité » (considérée comme un postulat), il n’aborde pas l’enjeu fondamental : l’Etat moderne doit-il demeurer sans religion, désormais agnostique, séparé, pluraliste ou neutre ? C’est la question du rapport de celui-ci à la Vérité. Quid est veritas ? demandait Pilate à Jésus.

    A cet égard, la philosophie des « Lumières », au XVIIIe siècle, posait déjà le problème de la conciliation de deux principes qu’elle énonçait : la souveraineté absolue de l’homme sur lui-même, dans ses pensées comme dans sa volonté (Kant) et la nécessité pour l’Etat que chaque citoyen ait une religion « qui lui fasse aimer ses devoirs » (Rousseau).

    Quels devoirs ? Eriger son jugement propre en loi universelle n’est possible que dans une société où nombre de valeurs sont partagées, sans quoi c’est l’anarchie. Il doit donc y avoir un « pacte moral », une profession de « foi » civile en quelque vérité inaltérable qui, en amont du droit positif, fonde le lien social sans lequel l’homme ne peut pas vivre. La question est alors de savoir comment et sur quelle base créer ce consensus éthique fondamental pour la vie en société.

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    Sur ce point, une controverse (au sens de la disputatio médiévale) fut organisée, au théâtre Quirino à Rome le 21 septembre 2000, entre le cardinal Ratzinger, futur Benoît XVI, et un professeur à l’Université romaine de la Sapienza, le philosophe Paolo Flores d’Arcais, pour explorer des voies de convergence possibles[4]. Au moment décisif du dialogue, le modérateur – Gad Lerner, journaliste à la  Repubblica – s’est demandé si des principes aussi fondamentaux que ceux du Décalogue ne pourraient pas être retenus comme base éthique commune, même par des athées (qui y souscriraient seulement « velut si [comme si] Deus daretur »). Mais cette proposition fut aussitôt rejetée par le philosophe laïc. 

    Ce dernier nia que certaines règles morales ou de droit naturel  puissent constituer des postulats, ou des acquis irréversibles, pour l’humanité : le contrat social est toujours relatif, contingent, renégociable. Ainsi, certains revendiquent-ils maintenant à l’ONU l’insertion de nouveaux « droits » (à l’avortement, à l’euthanasie, au choix du « genre » etc.) dans une Déclaration universelle des droits de l’homme vieille de 50 ans à peine (1948) ! Tout s’écoule, disait déjà le vieil Héraclite. Pareille impasse montre à quel point une définition véritablement universelle (« ubique, semper et ab omnibus ») des droits (et donc des devoirs) humains sans Dieu semble aléatoire.

    Et l’argument selon lequel une laïcité positive permettrait aux religions de contribuer à l’accession de la conscience collective de l’humanité au Souverain Bien paraît faible si tout socle transcendant (ou loi naturelle, comme vous voudrez) imprescriptible est a priori exclu de sa définition. En des temps pas si lointains n’avions nous pas déjà entendu parler d’une autre contribution « positive » : celle des religions à l’édification du socialisme marxiste . Qu’en reste-t-il aujourd’hui ? « Nisi Dominus aedificaverit domum, in vanum laboraverunt qui aedificant eam »[5] : ceci vaut pour les sociétés comme pour les individus. 

    Pie XII et Benoît XVI ont parlé, dans un tout autre sens, d’une « saine » laïcité. Selon Pie XII (allocution du 23 mars 1958), s’inspirant peut-être (sans le dire) de la théorie classique des « deux glaives »[6], il s’agit de maintenir les deux pouvoirs (spirituel et temporel) « distincts mais aussi toujours unis, selon de justes principes ».  

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    Quels principes ? Benoît XVI a déclaré dans une lettre au président du sénat italien (à l’occasion du congrès « liberté et laïcité » à Nursie, 14-16 octobre 2005) que « les droits fondamentaux représentent des valeurs antérieures à toute juridiction de l’Etat. Ils n’ont pas été créés par le législateur mais sont inscrits dans la nature même de la personne humaine et peuvent, par conséquent, renvoyer finalement au Créateur »[7].

    Bien que le pape ne précise pas davantage quels sont ces droits « fondamentaux », on peut raisonnablement penser qu’il se réfère ici aux principes du Décalogue, lequel énonce concrètement les devoirs et donc, corrélativement, les droits de l’homme révélés par le Seigneur Lui-même. 

    Somme toute, il en va de la laïcité comme des droits de l’homme sans Dieu : un concept dont le sens varie à ce point en est-il encore un ? Le poète Boileau (qui était aussi juriste de formation) disait déjà (art poétique, 1674) : « ce qui se conçoit bien s’énonce clairement et les mots pour le dire arrivent aisément ». Si ce n’est pas le cas, mieux vaudrait y renoncer.

     

    JEAN-PAUL SCHYNS

     


    [1]. François Foret (dir.), Politique et religion en France et en Belgique. L’héritage chrétien en question, Editions de l’Université de Bruxelles, 2009. François Foret est directeur de recherches politiques à l’Institut d’études européennes de l’ULB.

    [2] En ce sens, depuis le vote de la Déclaration « Dignitatis humanae » (1965) par le concile Vatican II, l’Eglise n’a eu de cesse de faire abolir les dispositions constitutionnelles ou concordataires qui, en Europe ou ailleurs, conféraient au catholicisme le statut de religion d’Etat. A l’ancienne doctrine, qui « tolérait » l’expression publique des autres cultes, elle substitua celle de l’Eglise libre dans l’Etat libre favorisant le concert pluraliste des religions.

    [3] Non sans courir le risque d' induire, à cet égard, certaines apparences d’ambiguïté : on se souvient par exemple que, dans l’affaire de mœurs à charge du curé (à l’époque : 1992) de Kinkempois, un arrangement avait été pris pour que le coupable purge sa peine de privation de liberté dans une abbaye. Semblablement, aujourd’hui, la commission interdiocésaine pour le traitement des plaintes pour abus sexuels commis dans l'exercice de relations pastorales  (sic) avait conclu avec le collège des procureurs généraux et le ministre de la justice (pouvoir exécutif) un agreement relatif à certaines modalités de traitement des informations que cette commission déciderait, sous sa propre responsabilité, de transmettre au parquet, restant sauve l'indépendance de ce dernier dans l’exercice des recherches et poursuites individuelles. Toutefois, comme le pouvoir judiciaire n’était pas lié par l’accord (dont le seul but était de faciliter les contacts entre la commission et le parquet, nullement de ressusciter une manière de privilège du for ecclésiastique), un magistrat instructeur n’a pas hésité à faire saisir brutalement tous les dossiers de la commission, dans les circonstances que l’on sait, humiliantes pour l’Eglise.

    [4]. Le texte du débat est publié dans l’ouvrage  Est-ce que Dieu existe ? Dialogue sur la vérité, la foi et l’athéisme, paru en français aux éditions Payot (2006).

    [5]. Psaume 127 : Si le Seigneur ne bâtit pas la maison, en vain travaillent ceux qui la bâtissent.

    [6]. Selon cette théorie, le pouvoir spirituel de l’Eglise, qui commande et ordonne le bien commun surnaturel, et le pouvoir temporel de la société civile, qui commande et ordonne le bien commun naturel, ne peuvent s’opposer : ils se complètent et doivent s’aider mutuellement, sachant que le pouvoir spirituel prime sur le pouvoir temporel (comme l’explique saint Thomas d’Aquin dans le De Regno). Les deux ont le même objet sous des modalités différentes : le bien des âmes.

    [7].Dans son testament spirituel « Mémoire et Identité » (Flammarion , 2005, p. 162) Jean-Paul II ne dit pas autre chose : « La loi établie par l’homme a des limites précises que l’on ne peut franchir. Ce sont les limites fixées par la loi naturelle, par laquelle c’est Dieu lui-même qui protège les biens fondamentaux de l’homme »

  • Monseigneur Léonard à Malines

     

     

    TE DEUM LAUDAMUS

     

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    La rumeur circulait depuis plusieurs jours mais c'est officiel maintenant: ce lundi 18 janvier 2010, le Saint-Père Benoît XVI a accepté le renoncement au gouvernement pastoral de l'archidiocèse de Malines-Bruxelles présenté par le Cardinal Godfried Danneels, conformément au can. 401 § 1 du Code de Droit Canonique et Benoît XVI a nommé Archevêque de Malines-Bruxelles (Belgique) Son Excellence Monseigneur André-Mutien Léonard, jusqu'à présent Évêque de Namur.

     

    logo.gifEndossant les fonctions de Primat de Belgique, le nouvel archevêque changera aussi de prénom: comme évêque de Namur il avait choisi de s'appeler André-Mutien,en l'honneur de l'humble Frère Mutien-Marie de Malonne. Comme archevêque-primat  il s'appelera André-Joseph, se référant au saint patron de la Belgique (qui est aussi celui du pape Benoît XVI) mais il conservera son blason où figurent le pont de Jambes (localité dont il est originaire) et le cor de chasse symbole de nos forêts de l'Ardenne.

    xembourgeoisesIl con. Il conserve

    Nous nous joignons à tous ceux qui accueillent avec joie la nomination qui fait de Monseigneur Léonard le "primus inter pares" au sein de l'épiscopat belge. De ce docteur et pasteur remarquable (un homme de foi, un esprit libre, loin des caricatures que font de lui les idéologues de tous bords) nombre d'entre nous ont déjà beaucoup reçu (vie sacramentelle, récollections, pèlerinages, sermons, conférences, publications) et nous sommes sûrs que le Seigneur va bénir son apostolat dans les nouvelles et hautes responsabilités dont il est investi.

     

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    Monseigneur Léonard: conférence de rentrée à l'église du Saint-Sacrement à Liège (septembre 2007) 

     

     

    L'élu aura 70 ans au mois de mai prochain. "Devenir archevêque m'impressionne, a-t-il déclaré, mais cela me donne un coup de jeune: je dois bien reconnaître que l'énormité de la tâche me fait peur mais qu'elle me stimule aussi".

     

    Sursum corda!

      

    Si vous souhaitez envoyer un courriel de félicitations au nouvel archevêque de Malines-Bruxelles et l'assurer de vos prières vous pouvez utiliser le site www.monseigneur-leonard.be en cliquant sur contact, en bas à droite ou écrire tout simplement à  mgr.leonard@skynet.be

    Ecrivez aussi au Nonce Apostolique, en lui demandant de remercier le Saint Père pour le choix de Mgr Léonard comme primat de Belgique.Voici son adresse: S.E.R. Mgr Giacinto Berloco, Avenue des Franciscains, 1150 Bruxelles.Fax nr 02.7622032. Courriel :nonciature.apostolique.be@skynet.be 

    Si vous voulez, il y a encore la pétition à souscrire ici : http://www.pro-leonard.be/index_fr.php

    et en cliquant ici: http://www.seletlumieretv.org/program_francais_temoin.html  vous découvrirez une belle interview de Mgr Léonard, réalisée au Québec, lors d'un congrès eucharistique.


     
    A QUOI JOUE-T-ON ?

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    Monsieur Mutien-Omer Houziaux (Esneux),  nous a transmis la lettre ouverte qu’il a adressée à  Jean-Paul Duchâteau, éditorialiste de « La Libre Belgique », un journal quotidien qui, avec « Le Soir », s’est largement investi dans l’agitation médiatique déployée autour de la nomination de Mgr Léonard comme archevêque et primat de Belgique. La première charge des deux consoeurs (Thérèse et Léopoldine, comme on disait jadis) a eu lieu le samedi 16 janvier. Pour faire bonne mesure elle était assaisonnée (sur une page entière dans « Le Soir » et dans une rubrique ouverte aux commentaires sur les sites web des deux  journaux) d’une attaque cathophobe grotesque contre « Les liaisons dangereuses d’Herman Van Rompuy », coupable d’avoir animé avec le vice-président de la chambre des députés d’Italie Rocco Buttiglione   (voici trois mois, à la salle académique de l’Université de Liège) une grande conférence sur l’encyclique sociale de Benoît XVI « Caritas in Veritate ». Quel rapport ? Amalgamez le tout et lisez le message subliminal : Benoît XVI, Buttiglione, Van Rompuy, Léonard -bref, la camorra des ultras- est infiltrée partout dans les sphères du pouvoir. Cqfd. Que de bêtise et de médiocrité!

     

    Le commentaire de M. Houziaux ne l'envoit pas dire. Il a été publié dans La Libre Belgique du 19 janvier dont l’éditorial invite tout à coup les catholiques belges à « cesser de s’excommunier » entre eux. Le journal pyromane du samedi se fait pompier le mardi. Mais à quoi joue-t-on ? 

     

    Voici le texte de la lettre de Monsieur Houziaux :

     

     

    Lettre ouverte à  Monsieur Jean-Paul Duchâteau,

    Rédacteur en chef de La Libre Belgique 

     

    Monsieur le Rédacteur en chef,

    La Libre Belgique, un journal  d’opinion : ainsi vos aînés se plaisaient-ils à présenter leur quotidien, par opposition, notamment, avec « le neutre de la capitale » (Le Soir). Il y a belle lurette que LLB a renié ses origines et qu’elle pratique des… « liaisons autrement dangereuses ».  Ainsi, de reniement en reniement, la Rédaction de LLB a négocié d’audacieux virages. Cela ne date pas d’hier, mais ledit quotidien est en train, sous votre « règne », d’exécuter un magistral  tête-à-queue. Votre édito assassin sur « Le choix du Pape » (16-01-10) est une véritable déclaration de guerre à l’Église de Belgique en tant qu'Institution. Étrange hommage rendu à vos prédécesseurs d’il y a quelques décennies ! Que cela vous plaise ou non, c’est bien le Pape qui nomme les évêques, archevêques, primats et cardinaux ; « la base » (selon la terminologie en usage chez les progressistes autoproclamés) serait bien avisée de prendre, en ces matières, un profil bas. Las ! l’arrogance du discours politiquement correct est amplifiée par votre (quasi) unique et « courageux » chroniqueur, l’incontournable chouchou de « la base », qui, dans sa rage de mauvais perdant, finit par en oublier l’évangélique « Tu es Petrus ».

    En lisant le point 2) de votre éditorial, on pense à ces pompiers pyromanes qui, profitant de leur statut, boutent le feu aux biens qu’ils feignent de protéger. Comme pour mieux vous assurer de l’ardeur d’un brasier qu’en fait vous appelez de vos vœux, vous prophétisez : l’arrivée de Mgr Léonard à l’archiépiscopat  « divisera la communauté des chrétiens en Belgique ». On peut difficilement imaginer plus exécrable  vilenie. Avec une odieuse délectation, vous jouez les cassandres, comme si votre qualité de journaliste vous octroyait tous les droits, y compris celui de torpiller toute entreprise qui n’a pas l’heur de recueillir votre assentiment, un assentiment qu’en l’occurrence, le Pape n’a pas à solliciter de « la base ». Si vous êtes thuriféraire de Mgr Danneels, c’est moins pour gratifier le Cardinal d’un encens qu’il mérite assurément que pour flétrir la figure de son successeur. Cela rappelle le scénario concocté lors de la nomination de l’abbé Léonard à la tête du diocèse de Namur : le journal Vers l’Avenir avait récolté des dizaines et des dizaines de signatures pour remercier les « sortants », histoire de promettre la vie dure au nouvel arrivant. Mal leur en prit, car Mgr Léonard, toujours facétieux, avait glissé sa signature parmi celle des rebelles.  À malin, malin et demi. Méfiez-vous !

    Pour votre gouverne, Mgr Danneels N’est PAS plus partisan de la libéralisation de l’avortement et de l’euthanasie que Mgr Léonard, et je doute fort que les manipulations effectuées à Leuven – Louvain-la-Neuve sur des embryons réifiés, honteusement qualifiés de « surnuméraires », soient davantage du goût de l’un que de l’autre. Vous voulez ratisser (encore) plus large ? Les actionnaires vous intiment de vendre davantage de papier ? Comme les cartes de Carmen annoncent « La Mort, toujours La Mort »,  votre « daimôn » vous serine-t-il  « La base , toujours la base  » ?  Alors, ne perdez pas de temps ! Pour les futurs éditos de LLB, engagez sans plus tergiverser une certaine Vice-Première socialiste : son anticléricalisme atavique fera merveille dans un boulot par ailleurs indigne de vous. Mais c’est une « liaison » qui pourrait se révéler dangereuse…

    Agréez, je vous prie, Monsieur le Rédacteur en chef, mes salutations attristées.    

    Mutien-Omer Houziaux,

    Ancien embryon, chrétien librement soumis à la Vox Romana.

    •  

    FRANCHEMENT HEUREUX  !

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    L'abbé Jean Schoonbroodt (église du Saint-Sacrement à Liège)

    au Journal La Meuse (19.01.2010):

     "Je suis confiant et franchement heureux de cette nomination" 

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    ON SE CALME !
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    Rappelant qu'en vertu du protocole de l'Etat, le primat de Belgique se situe par exemple avant le président de la Cour constitutionnelle, Mme Laurette Onkelinx, vice-premier ministre du gouvernement fédéral a expliqué sur les antennes de la RTBF que les positions jugées conservatrices de Mgr André Léonard pourraient remettre en cause le compromis belge qui se fonde sur le principe de neutralité. Monseigneur Léonard, a-t-elle déclaré sur la "Une" a "souvent remis en question des décisions prises par le parlement" et a "des positions éthiques qui posent problème, notamment son opposition à l'avortement et à l'euthanasie". Madame Onkelinx est juriste, paraît-il, et son mari constitutionaliste. Dans une carte blanche publiée le 20 janvier par le journal "Le Soir", Frédéric Amez, assistant aux facultés universitaires Notre-Dame de la Paix (Namur) lui donne cette petite leçon de droit public belge:
    QUI MENACE LE COMPROMIS BELGE ?
    La désignation de l'évêque de Namur à la tête de l'archevêché de Malines-Bruxelles suscite des réactions partagées. Ce n'est pas une surprise, s'agissant d'un homme dont, il faut le dire, le sens de la diplomatie n'est pas forcément la première qualité. Quelqu'un qui a en tout cas un avis tranché sur la question, c'est le vice-premier ministre et ministre des affaires sociales, Laurette Onkelinx. Selon elle, Monseigneur Léonard, par ses prises de positions s'opposant à certaines législations belges récentes (avortement, euthanasie, mariage homosexuel...) mettrait en péril le "compromis belge" en matière de rapports Eglise-Etat.
    Sans doute est-ce l'occasion de rappeler brièvement en quoi consiste ce "compromis belge". Il convient d'évoquer d'abord l'article 19 de la Constutution, qui dispose que: "la liberté des cultes, celle de leur exercice public, ainsi que la liberté de manifester ses opinions en toute matière, sont garanties". Le Constituant ne se contente pas de proclamer la liberté de culte: il en fait, par la formulation utilisée, l'exemple par excellence de la liberté plus générale d'expression. La seule disposition légale qui limite la liberté d'expression dans le cas spécifique des ministres des cultes est l'article 268 du Code pénal, qui punit ceux qui, dans le cadre de leur ministère, attaqueraient directement le gouvernement ou un acte de l'autorité publique.
    Par "attaque directe", il ne faut pas entendre la simple expression d'une opinion critique, mais une incitation à la désobéissance. A notre connaissance, jamais Monseigneur Léonard n'a appelé les fidèles catholiques à enfreindre les lois dont il a désapprouvé l'adoption. S'il est opposé à l'avortement et à l'euthanasie, il n'est pas le seul. En ce qui concerne le mariage de personnes de même sexe, il est bon de rappeler que le premier opposant à cette loi ne fut autre que le Conseil d'Etat. Si tous les Belges ont le droit d'exprimer une opinion critique à l'égard de la loi, on ne voit pas pourquoi les évêques seraient privés de cette liberté garantie par la Consitution autant que par la Convention européenne des droits de l'homme. Et on ne se souvient pas non plus avoir jamais entendu l'actuel archevêque, tant loué pour sa tolérance et son ouverture d'esprit, applaudir à l'adoption des législations désapprouvées par son successeur.
    Le fait que Benoît XVI ait désigné Monseigneur Léonard pour occuper la cathèdre de Saint-Rombaut change-t-il la donne ? Le primat de Belgique est-il soumis à un devoir de réserve particulier ? Certes non. Le régime belge des cultes, ce fameux "compromis belge", repose sur deux principes de base. Le premier est celui de la non-intervention de l'Etat dans la nomination et l'installation des ministres des cultes (article 21 de la Constitution). Le second est l'obligation pour l'Etat de rémunérer les ministres nommés par l'autorité religieuse compétente (article 181 § 1er de la Constitution): ce "compromis" est la confirmation par le Constituant de 1831 du concordat conclu entre Napoléon Bonaparte et le pape Pie VII en 1801 et n'a jamais été remis en cause depuis lors. Au contraire, étendu en 1831 aux cultes protestant et israélite, il bénéficie maintenant aussi aux cultes orthodoxe et islamique.
    Il en résulte que si les ministres des cultes sont effectivement rémunérés par l'Etat, ils ne sont ni fonctionnaires ni magistrats, et ne sont donc pas soumis au devoir de réserve qui est imposé à ces derniers. Il n'appartient pas au gouvernement d'interdire au Saint-Siège la nomination de tel ou tel évêque qui ne lui conviendrait pas, ni de prendre des mesures de rétorsion à l'égard de ce dernier. C'est au contraire en brandissant une telle menace qu'un ministre prend le risque de briser le subtil équilibre qui régit les rapports entre l'Etat et les institutions du culte qui est encore celui de la plus grande partie de ses citoyens".
    JEAN-MAURICE DEHOUSSE PLAIDE POUR ANDRE LEONARD
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    Que va dire Laurette ? Sous le titre "Présomption d'innocence", l'ancien bourgmestre socialiste de Liège, Jean-Maurice Dehousse défend Mgr Léonard dans le "courrier des lecteurs" du journal "Vers l'Avenir" du samedi 23 janvier, dans les termes que voici:
    "La nomination de l'évêque de Namur au rang d'archevêque de Malines-Bruxelles émeut curieusement certaines langues et certaines plumes. Que cette nomination énerve les catholiques de Belgique, ou certains d'entre eux, c'est bien leur droit. Gabriel Ringlet l'a expliqué. Mais que les autres, tous ces apôtres de la "libre pensée" qui, le prélat à peine changé de siège (...) , proclament des condamnations sans appel, c'est tout de même un peu fort.
    Le Pape a choisi de promouvoir quelqu'un de son camp. Divine surprise! De toutes les Excellences belges qui vomissent "l'heureux élu", qui n'en eût fait autant (et ne l'a pas déjà fait mille fois) en se préparant à recommencer?(...)
    N'a-t-on pas le droit -et même le devoir- de juger la nomination de Mgr Léonard sur ses actes, à savoir tous ceux qui sont encore à venir ?
    Pour ma part, j'ai -lors de débats- apprécié le sens dialectique de l'évêque, certes, mais aussi le fait qu'il ne craint pas d'afficher ses convictions (...). Quant à ce qu'il fait dans l'Eglise ou de l'Eglise, c'est l'affaire des croyants de cette Eglise, et non la mienne.
    Pour le reste, je suis assez satisfait, après tant de pelletées de nominations flamandes, de voir un francophone enfin promu. Quatre vingt quatre ans après le décès du cardinal de la Première Guerre, Mgr Mercier, ce n'est vraiment pas trop tôt. Une voix wallonne par siècle au Vatican, est-ce déjà devenu trop demander ? (...)"