Le 11 mai dernier, deux cents personnes ont fêté avec près de cinquante choristes le dixième anniversaire de l’académie de chant grégorien à Liège, dont le siège se trouve à l’église du Saint-Sacrement, au Boulevard d’Avroy (photo ci-contre).
Pour la circonstance, l’excellent Ensemble «Psallentes ♀», dirigé par Hendrik Vanden Abeele, professeur aux Conservatoires de Leuven, Rotterdam et La Haye, s’était joint aux trente-cinq élèves liégeois du cycle de cours de chant grégorien 2012-2013, animé avec beaucoup d’allant et de compétence par Stéphan Junker, professeur au conservatoire de Verviers.
Lors d’un concert donné à 16 heures dans l’église des Bénédictines de Liège, les deux formations ont illustré devant une nombreuse assemblée les chants de pèlerinage au temps des cathédrales, en interprétant des mélodies grégoriennes, diaphoniques et polyphoniques du XII au XVe siècles.
Cette belle prestation fut suivie, à 18 heures, de la messe votive du Saint-Sacrement célébrée dans l’église du même nom, selon la forme traditionnelle du rite romain. Au cours de cette célébration, les choristes ont chanté, outre le propre de la messe et le kyriale « Pater Cuncta », des extraits de l’office liégeois primitif (Jean de Cornillon, 1246) de la Fête-Dieu, du Codex Callixtinus (Saint-Jacques de Compostelle, XIIe s.) et du Livre Vermeil de Montserrat ( XIVe s.).
Comme lors du concert à l’église des Bénédictines, c’est Patrick Wilwerth, professeur au conservatoire de Verviers, qui a tenu les parties d’orgue de cette prestation.
La messe fut célébrée par l’abbé Jean-Pierre Delville, professeur d’histoire ecclésiastique à l’U.C.L. et lui-même premier prix d’orgue du conservatoire de Liège (classe d’Hubert Schoonbroodt).
Voici le texte de l’homélie prononcée en cette circonstance jubilaire par celui qui est devenu, entre-temps, le 92eme évêque de Liège (nommé le 31 mai, il sera consacré le 14 juillet prochain) (1) Le futur pasteur du diocèse commente ci-dessous les témoignages fondamentaux de saint Paul (1 Cor 11, 23-30) et de saint Jean (Jn 6, 56-58) sur la signification du très saint sacrement de l’autel
« Chers Frères et Sœurs,
C’est avant tout la joie qui marque notre célébration !
Les chorales ont mis tout leur cœur à exécuter les chants du concert qui a précédé et ceux de la messe que nous célébrons. Nous y retrouvons en particulier les œuvres de Jean de Cornillon, le prêtre qui a aidé sainte Julienne de Cornillon au XIIIe siècle à composer un office complet pour la fête du Saint-Sacrement.
Si la joie est présente en nous, c’est aussi parce que nos chants célèbrent un mystère très profond, celui de l’amour de Dieu pour nous, qui se manifeste dans le don que Jésus nous a fait de son corps et de son sang, c'est-à-dire le don de toute sa vie. Nous découvrons que nous sommes des gens qui sont aimés, et non pas des gens lancés dans la vie par le hasard des choses. Chacun de nous est aimé par Dieu et nous sommes invités à répondre à cet amour en communiant avec lui et en recevant son corps du Christ Jésus.
Jésus nous a aimés le premier. Il est mort pour nous, c'est-à-dire qu’il est allé jusqu’au bout de sa vie d’amour, il n’a pas reculé au dernier cmoment. Mais il a voulu donner un signe qu’il offrait sa vie pour nous. Ce signe a tellement marqué les disciples qu’il a fait l’objet d’une transmission officielle. Déjà 15 ans à peine après la mort de Jésus, St. Paul écrit aux Corinthiens : « J’ai reçu du Seigneur ce que je vous ai transmis ensuite ». Et St Paul raconte alors la dernière Cène de Jésus et comment Jésus a pris du pain, la rompu et l’a donné à ses disciples en disant : ceci est mon corps, faites cela en mémoire de moi. Donc ce que nous célébrons aujourd’hui s’est transmis depuis le tout début du christianisme.
C’est un geste d’espérance pour tous les disciples, malgré la mort qui va frapper Jésus. Car Jésus dit : « Toutes les fois que vous mangerez ce pain et boirez ce calice, vous annoncerez la mort du Seigneur, jusqu’à ce qu’il vienne ». Jésus annonçait sa résurrection et son retour, son retour dans chacune de nos vies et son retour à la fin des temps. Il ne nous abandonne pas et non message n’est pas mis aux archives, classé dans un classeur sur une étagère. Jésus est présent et nous soutient par la nourriture qu’il nous donne.
C’est ainsi qu’il avait dit, d’après l’évangile de St Jean : « Celui qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi et moi en lui ». Jésus explique que la communion à son corps nous fait entrer dans sa vie et dans la vie de son Père. Il nous rappelle que notre vie ne vient pas de nous-mêmes, mais que nous la tenons d’un autre. Jésus lui-même dit bien qu’il vit « par le Père ». De même, nous, nous tenons notre vie de nos parents ; mais nous savons qu’il ne suffit pas d’être né physiquement pour grandir psychiquement dans la vie. Ce qui nous fait grandir et nous développer, c’est l’amour que nous avons reçu de nos parents et de tout notre entourage. Sans l’amour qu’on reçoit comme enfant, on ne se développerait pas psychiquement, on resterait même à l’état d’animal. Ce qui nous fait vraiment grandir, c’est l’amour que nous recevons. Mais d’où vient cet amour ? Ce mystère de l’amour qui donne vie ? Nous croyons qu’il vient de Dieu et se révèle spécialement en Jésus. La source de l’amour, celle qui tient en main toute l’humanité, c’est Dieu lui-même. Il nous a aimés le premier. Et Jésus nous montre que même face à l’échec, à la souffrance et à la mort, cet amour reste plus fort. Car si Jésus a été vu vivant après sa mort, c’est que sa vie d’amour était plus forte que la mort. Le signe qu’il nous a laissé de cela, c’est le pain rompu et le vin partagé, sur lesquels il a rendu grâce, il a remercié le Père. Remercier dans ces circonstances était un défi, c’était un signe d’espérance définitif. Le remerciement de Jésus, en grec eucharisteia, l’eucharistie, est resté pour les premiers disciples et pour chacun d’entre nous le signe vital de l’amour de Dieu pour nous et le signe de la vie qu’il nous donne en plénitude.
Ainsi, Frères et Sœurs, notre joie est-elle profonde aujourd’hui de pouvoir participer à cet acte d’amour de Jésus. Nous découvrons que, comme des enfants grandissent grâce à l’amour des parents, ainsi nous grandissons jour après jour grâce à l’amour que Jésus nous manifeste. Nous répondons à cet amour en communiant au pain de vie. Nous entrons donc en communion –en union- avec le Christ. Nous participons à son geste d’amour, alors que par nos seules forces nous n’en serions pas capables. Comme dit Jésus : « Celui qui me mange vivra par moi ». « Qui mange de ce pain, vivra éternellement ».
Jésus nourrit notre vie avec sa vie. Il nous nourrit de l’amour. C’est l’amour qui tient le monde. Mais il a besoin d’être nourri ! Puissions-nous recevoir cette nourriture de vie éternelle et la diffuser autour de nous ! »
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(1) à ce propos, voir aussi :
- Liège: Mgr Delville a célébré la solennité de la Fête-Dieu à l'église du Saint-Sacrement
- 1er juin 2013: Fête-Dieu à l'église du Saint-Sacrement à Liège
- Journée grégorienne à Liège le samedi 11 mai 2013
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