SAMEDI 21 MAI 2011
LE CHOEUR GREGORIEN DE LOUVAIN
Gregoriaans Koor Leuven
Direction Frans Mariman
professeur au Gregoriaans Centrum de Drongen
LES ELEVES DE L'ACADEMIE DE CHANT GREGORIEN A LIEGE
Direction Stephan Junker
professeur au conservatoire de Verviers
donneront un concert
A 16 HEURES, A L'EGLISE DES BENEDICTINES
Boulevard d'Avroy, 54 à Liège
"LES COULEURS DU PLAIN-CHANT MEDIEVAL"
grégorien, vieux romain, gallican, bénéventain, ambrosien, liégeois
A l'orgue Le Picard (XVIIe s.) des Bénédictines
PATRICK WILWERTH
professeur au conservatoire de Verviers
EXTRAITS DE L'OEUVRE D'HENRY DU MONT
ET DU LIVRE DES FRERES CROISIERS DE LIEGE
Ils interpréteront ensuite
A 18 HEURES, A L'EGLISE DU SAINT-SACREMENT
les chants de la
MESSE DU QUATRIEME DIMANCHE APRES PÂQUES
propre grégorien, kyriale ambrosien et bénéventain
organum, diaphonie et motets classiques
A l'orgue Thomas du Saint-Sacrement
PATRICK WILWERTH
professeur au conservatoire de Verviers
La messe sera célébrée (missel de 1962) par M. l'abbé Jean-Pierre HERMAN
chapelain aux sanctuaires de Beauraing
Entrée libre. Réception offerte à l'issue de la messe.
Renseignements: tél. (+32) (0)4.344.10.89
courriel: sursumcorda@skynet.be
Programme détaillé:
Concert (église des Bénédictines, 16h)
1. Ėlèves de l’Académie :
Antienne « Dominus dixit ad me » des matines de Noël (grégorien et chant vieux-romain)
Lectio (extraits) des matines de Noël en organum
Repons bref « Verbum caro factum est » des matines de Noël, en grégorien
Bénédiction conclusive des matines de Noël, en grégorien
Repons « Collegerunt » (extraits) de la procession des Rameaux, d’inspiration gallicane
Antienne « Media vita » (extraits) pour le temps de la Septuagésime et du Carême, d’origine gallicane
Introït de la Messe de Minuit de Noël « Dominus dixit ad me » : trois versions mélodiques (ambrosien, vieux romain, grégorien)
Kyrie grégorien « cunctipotens genitor Deus » tropé en déchant
Alleluia « Magnus Dominus » d’origine gallicane
Sanctus tropé en déchant d’origine hongroise
Agnus Dei bénéventain
Antienne ad magnificat « Magna Vox » des vêpres de l’office liégeois de saint Lambert
Hymne « conditor alme siderum » des vêpres grégoriennes du 1er dimanche de l’Avent
2. Patrick Wilwerth à l’orgue « Le Picard » :
Extraits de l’œuvre d’Henry Du Mont (Looz, 1610-Paris, 1684) et du Livre d’orgue des Frères Croisiers de Liège (1617).
3. Gregoriaans Koor Leuven
Antienne « vidi aquam » ad aspersionem aquae benedictae (in tempore paschali)
Introït « De ventre », Graduel « Priusquam te formarem » et Communion « Tu puer » de la messe de la fête de saint Jean-Baptiste (extraits du Graduale triplex de Solesmes, 1974)
Introït «Cibavit », Offertoire « Jubilate Deo », Communion « Qui manducat » de la messe de la Fête-Dieu (extraits du Graduale triplex de Solesmes, 1974)
Messe du Temps Pascal (église du Saint-Sacrement, 18h)
Introït grégorien « Cantate Domino » (Koor, Leuven)
Kyrie « Cunctipotens genitor Deus », tropé en déchant (Académie, Liège)
Gloria ambrosien (Académie Liège)
Alleluia grégorien « Dextera Dei » (Koor, Leuven)
Alleluia grégorien « Christus resurgens » (Koor Leuven)
Credo III (tous)
Offertoire grégorien « Jubilate Deo universa terra » (Koor, Leuven)
Sanctus tropé d’origine hongroise (Académie, Liège)
Agnus Dei bénéventain (Académie, Liège)
Communion grégorienne « ego sum vitis et vita » (Koor, Leuven)
Antienne ambrosienne «O salutaris hostia » (solistes)
À l’orgue Thomas du Saint-Sacrement : Patrick Wilwerth
Gloria (extraits) de la messe en si de J.S. Bach (soliste et orgue)
LES INTERPRÈTES
Le Choeur Grégorien de Louvain (Gregoriaans Koor Leuven)
fondé en 1980, travaille et se produit, depuis ses débuts, sous la direction de Frans Mariman. La presque totalité des membres de la Chorale, ont suivi les cours de grégorien à Drongen (Tronchiennes) où Frans Mariman enseigne notamment la sémiologie grégorienne. Lui-même, formé en musicologie à Leuven, s’est spécialisé comme grégorianiste à l’école des maîtres qui font autorité en la matière, tels que Cardine, Billecocq, Joppich, Goeschl, et Le Guennant à l’Institiut Catholique de Paris : il cherche à transmettre à sa chorale, avec le plus grand souci de perfection, le savoir et l’enthousiasme qu’il a hérité d’eux..
On découvrira dans le chant de la chorale de Louvain toute l’expressivité authentique du grégorien, inspirée par les textes sacrés, restée longtemps cachée pour n’être redécouverte qu’au 19e siècle. Le répertoire de la chorale s’oriente tout autant sur les exigences de la liturgie contemporaine, que sur des perles musicales que l’on n’y trouve plus: hymnes, liturgie des Quatre-Temps… Elle répond également à la demande d’organisateurs d’événements et concerts comme le Festival international de Watou, l’Eté mosane, la Nuit des chœurs à l’abbaye de Villers-la-Ville, l’Académie de Chant grégorien à Liège…
L'Académie de Chant grégorien
A été fondée à Bruxelles en mars 2000. Son objectif est de réunir des personnes qui aiment ou pratiquent le chant grégorien, désirent le promouvoit et assurer sa perennité sous tous ses aspects, en particulier dans sa fonction liturgique.
.A ce titre elle organise, tous les ans, à Bruxelles et à Liège (depuis 2003) un cycle de cours ouverts tant aux débutants qu’aux persévérants, un stage résidentiel chaque été ainsi que des week-ends consacrés à des formations thématiques de perfectionnement dont la direction est confiée aux meilleurs spécialistes belges et étrangers.
En Belgique francophone en tout cas, il n’existe plus aucune institution, religieuse ou scolaire, où ce chant, que le concile Vatican II encore qualifie de propre à la liturgie l’Eglise catholique , soit encore enseigné et pratiqué. C’est pour faire face à ce vide que l’Académie de chant grégorien a été fondée. Elle comble donc une lacune car cet immense répertoire monodique, à la base de toute la musique occidentale, mérite d’être reconnu, estimé, chanté et entendu C’est à cette immense tâche que l’Académie se consacre.
À Liège, depuis 8 ans, le cycle annuel des cours de l’Académie s’échelonne de novembre à mai, à raison de deux samedis après-midi par mois. Il est donné par Stéphan Junker, professeur au conservatoire de Verviers, et Gérald Messiaen, professeur de l’académie à Louvain la Neuve, dans les locaux de l’église du Saint-Sacrement (la seule qui ait conservé l’usage du plain-chant liturgique dans cette ville de Liège).Stéphan Junker est diplômé du conservatoire de Bruxelles où il fit partie de la classe de Jules Bastin. Il est aussi licencié en philologie classique de l’Université de Liège.
Patrick Wilwerth,
organiste, compositeur, professeur d’orgue au conservatoire de Verviers et dans plusieurs académies de la région liégeoise, est diplômé des Conservatoires royaux de Liège et de Bruxelles où il fut l’élève et le disciple d’Hubert Schoonbroodt.
Outre ses activités dans le domaine de l’orgue et de la composition, Patrick Wilwerth a fondé en 1994 le chœur de chambre " Praeludium " et a été nommé en 1993, directeur artistique et chef de chœur de la Chorale Universitairede Liège où il succède à Hubert Schoonbroodt. Son travail comme chef de chœur l’a amené à interpréter des œuvres parmi les plus belles du répertoire choral avec le Choeur Universitaire et l’Ensemble Instrumental « Tempus Musicale ». Organiste de concert autant que d’église, il maintient aussi la tradition du chant grégorien aux offices de l’église du Saint-Sacrement à Liège.
Quelques notes sur les répertoires du plain-chant
Certes, aujourd’hui, le chant grégorien est le chant propre de la liturgie latine, dans laquelle il doit (ou devrait) occuper la première place. Première mais non exclusive: pour paraphraser le langage un peu ambigu du concile Vatican II, « toutes choses égales » avec les autres genres de musique sacrée (cfr art. 116 de la constitution « sacrosanctum concilium »)
Depuis les siècles passés jusqu'à maintenant, ce chant liturgique est marqué par le nom de saint Grégoire (540-604) d'une façon décisive – le qualificatif de « grégorien » étant un acte de reconnaissance pour le rôle que ce pape a joué dans la mise en forme de la prière chantée officielle de l'Église latine. Mais, en fait, le chant « grégorien » est apparu dans la seconde moitié du VIIIe siècle dans le nord-est de la Gaule franque, vallée du Rhin comprise, En schématisant un peu, on dira qu'eut lieu alors un patient métissage, une sorte d'hybridation entre les textes liturgiques d'origine romaine et les mélodies qui se plièrent volontiers à un remodelage, épousant et intégrant l'ornementation gallican
Si, comme on l’a écrit, le chant vieux romain et le chant gallican sont à la source du chant grégorien, d’autres variantes du plain-chant monodique subsistèrent aussi parallèlement à lui, telles que le chant ambrosien, le chant bénéventain, le chant mozarabe sans parler de répertoires locaux, tels que le plain-chant liégeois, ni des premiers balbutiements de la polyphonie liturgique avec le déchant et l’organum.
Tant la messe que le concert organisés le 21 mai 2001 à Liège illustrent la diversité de ces répertoires .
Dans le syllabus destiné aux élèves de l'académie de chant grégorien à Liège, Gérald Messiaen y a consacré quelques considérations, dont nous reproduisons ici les principaux traits (on lira le texte complet en se procurant le Syllabus) :
1. Le vieux romain
On entend par chant romain le corps des chants qui s'est graduellement composé pour la liturgie pratiquée à Rome entre le IVe et VIIIe siècle. La source du "vieux Romain" est constituée des cinq manuscrits qui ont été écrits à Rome pendant les XIe, XIIe et XIIIe siècles.
Ces cinq sources du "vieux Romain" comprennent trois graduels (Chants de la Messe) et deux antiphonaires (Chants de l’Office) :
-le Graduel de Santa Caecilia in Trastevere, datant de 1071(disponible en fac-similé : Max Lütolf. Das Graduale von Santa Cecilia in Trastevere. Fondation Martin Bodmer, codex 74, 1987) ;
- le Graduel de la basilique du Latran (Roma,Vat. lat. 5319), qui date tout au plus du XIIe siècle(transcrit par STÄBLEIN, Bruno. Die Gesänge des altrömischen Graduale Vat.lat.5319Monumenta Monodica Medii Aevi ‐Band II. Bärenreiter, 1970) ;
-le Graduel de Saint-Pierre (S. Pietro F.22) datant du treizième siècle un antiphonaire de la basilique de Latran ou de Saint‐Pierre (Londres, B.L. Add.29988) datantdu milieu du XIIe siècle ;
- l'Antiphonaire de Saint-Pierre (Roma, Bliblioteca Apostolica Vaticana, Archivo S.Pietro, B.79)datant de la fin du XIIe siècle.(disponible en fac‐similé : Bonifacio Giacomo BAROFFFIO. Bliblioteca Apostolica Vaticana,Archivo S.Pietro B 79 Antifonario della Basilica di S.Pietro. Ed. Torre d'Orfeo, 1995).
Ce répertoire intriguait déjà Dom André Mocquereau en 1891 :
« … nous laissons en dehors … les pièces de la liturgie ambrosienne … Pour la même raison nous laisserons dans leur singulier isolement et leur indépendance bizarre de la tradition grégorienne trois manuscrits extrêmement curieux du XII° et du XIII° siècle (Vatican, n° 5319 et Archives de Saint-Pierre, n° F.22 et n° B.79), les seuls de ce genre que nous ayons rencontrés parmi les documents manuscrits de la liturgie romaine que nous avons réunis et consultés. La plupart des chants en usage dans ces codex ne se rapportent à la tradition ni par l’économie de la distribution de leurs neumes, ni par la suite des intervalles musicaux. Ce ne sont plus ici des variantes ou des 2altérations qui s’offrent à nous : c’est un chant réellement distinct, aussi loin de l’ambrosien que du grégorien … »
Nous pouvons examiner le chant romain sous trois angles :
Le chant romain qui était pratiqué vers 750 nous est inaccessible dans sa forme originale. Il a été transmis au royaume Franc après 754, où il a été modifié de façon significative par les Francs (conduisant à ce que nous appelons le chant grégorien) avant de retourner à Rome.
Au XIIIe siècle, le chant évolue encore (certains chants de cette époque se retrouvent dans les cinq sources du "vieux Romain"). Le chant romain, modifié par transmission orale durant plusieurs siècles, a été finalement noté dans les cinq vieux manuscrits du "vieux Romain".En comparant les manuscrits grégoriens et "vieux Romain", nous pouvons tirer un enseignement sur le chant romain du VIIIe siècle. L'identité des textes est évidente, ainsi que les différences dans les mélodies. Le grand nombre de textes identiques assignés aux fêtes spécifiques, à la fois dans les manuscrits du "vieux Romain" et grégoriens, est une indication claire que ces chants figuraient dans le répertoire romain du VIIIe siècle.
Les cinq manuscrits du"vieux Romain" ont été épinglés comme différents par rapport aux manuscrits grégoriens dès 1891, mais ce n’est qu’en 1950 que le sujet est devenu source de polémique. Pour certains musicologues, le "vieux Romain" et le grégorien représentent un développement ou une modification d’un même répertoire original, le chant Romain des environs de 750.Tandis que les chantres francs modifiaient les chants venant de Rome, le chant romain serait resté intact à Rome, toujours transmis par tradition orale. Il semble clair qu’au XIe siècle, quand les premiers Graduels romains ont commencé à être notés, le chant romain avait subi des changements.Lorsque les cinq Graduels mentionnés ci-dessus furent terminés, le chant grégorien avait remplacé le chant en usage à Rome. Nicolas III (pape de 1277 à 1280) imposera finalement le chant grégorien à Rome, sous l’influence des Franciscains.
2. L’ambrosien
Le chant milanais est considéré comme le plus vieux chant occidental. Les plus anciens manuscrits milanais complets de chant ne sont pas antérieurs au XIIe siècle(certaines sources partielles datent du siècle précédent).Les chants de la Messe et de l’Office sont reproduits à la suite, en séquences chronologiques,avec des livres distincts pour l’hiver et l’été. Le chant milanais est généralement dénommé « chant ambrosien ».
Saint Ambroise était évêque de Milan de 374 à 397, à l’époque où l'empereur romain y avait établi sa capitale. On lui attribue la composition d’hymnes, textes et mélodies. Saint Augustin fait mention de quatre hymnes qui nous sont parvenues : Aeterne rerum conditro ; Deus creator omnium ; Jam surgit hora tertia ; Veni redemptor gentium. Ces hymnes utilisent le même mètre. Des hymnes plus récentes du même mètre sont appelées ambrosiennes et sont parfois attribuées à saint Ambroise lui-même. Un grand nombre de ces hymnesont été longtemps utilisées dans les livres liturgiques grégoriens et milanais.
Charlemagne conquit la Lombardie et en devint le roi en 774. Les rois Carolingiens ont régné sur l'Italie jusqu'à 962, mais ils n’ont eu aucune influence sur la liturgie lombarde.Au Concile de Trente (XVIe siècle), les nombreuses variantes locales du rite romain furen tnormalisées, mais Milan (et la région de l'Italie du nord qui formait son archidiocèse) a été autorisée par ce concile à conserver son rite en raison de l’ancienneté de celui-ci.
3. Le gallican
Amplement recouvert par le grégorien, le chant gallican a laissé des traces assez nombreuses pour nous révéler sa richesse mélodique.
Le rite gallican et son chant tirent leur origine du culte pratiqué par le peuple gallo‐romain.
Clovis a été baptisé à Reims en 496. Les francs adoptèrent le rite gallican, laissant aux peuplades gallo-romaines une grande autonomie en matière civile et religieuse. L'église gallo-romaine possédait déjà des figures de proue : saint Hilaire de Poitiers, saint Martin de Tours, et plusieurs poètes tels Venance Fortunat.
Le rite gallican disparaît progressivement sous Pépin le Bref puis Charlemagne. Le nouveau rite est inspiré des sacramentaires romains et le chant est remplacé par ce que l’on dénommera le grégorien.
Plusieurs arguments permettent d’identifier un chant comme étant gallican :
1. Certains rites, tels que les Litanies mineures (trois jours avant la fête de l'Ascension) et la fête de saint Martin de Tours, n'étaient pas célébrés à Rome. On en conclut que les chants retrouvés en notation médiévale ont survécu au rite gallican.
2. Le second argument concerne le style littéraire : les prières romaines et les textes des chants romains étaient notablement concis. Les autres rites occidentaux affichent une déclamation dans un style plus oratoire, riche en image, et des chants agrémentés demélismes plus ornés. Ainsi en est-il de l’antienne O Crux benedicta (Antiphonale Monasticum, 1934, p. 1046) dont le mélisme sur la syllabe e de alle‐luia comporte 53 notes.
3. Un troisième argument est basé sur la ressemblance entre certains chants gallicans et des chants mozarabes et milanais. Kenneth Levy a récemment montré que certains Offertoires, dont les textes sont non psalmiques, ne figurent pas dans les sources du Vieux Romain, mais ont des similitudes avec des autres sources non-romaines. L'origine gallicane d'un certain nombre de ces chants est évidente du fait que les manuscrits francs les plus anciens, copiés directement des sources romaines, les omettent, tandis que desmanuscrits francs plus récents les incluent. Ces chants, absent des sources apportées de Rome, ont en fait été ajoutés plus tard, à partir de sources locales, dans le but de les conserver. Ces ajouts furent plus facilement réalisés dans les endroits éloignés de l'autorité centrale. Les manuscrits d'origine aquitaine du XIe siècle contiennent un grand nombre de chants gallicans. Les francs composèrent de nouveaux chants, et ceux-ci ont des traits à la fois romain et gallican.
En tout état de cause, la liturgie gallicane n'était pas unifiée, mais revêtait vraisemblablement des formes diversifiées dans l'ensemble de la région. Nous n'avons aucun ensemble de sources du chant gallican (comme pour le Bénéventain et d'autres chants).
Au XVIIe siècle, un mouvement de retour aux origines françaises a entraîné la composition d'une liturgie néo-gallicane avec son chant. Mais cela n'a aucune relation avec le sujet présenté ici.
4. Le Bénéventain
Le terme bénéventain désigne les manuscrits de chant grégorien provenant de la région de Benevento, au Nord de Naples, ainsi que l’écriture neumatique caractéristique de ces manuscrits.
Le chant et la liturgie bénéventaines ont connu leur apogée après 758, quand Charlemagne aconquis le royaume du nord à Pavie, et jusqu’à la fin du VIIIe siècle, quand les premières formes du chant grégorien ont été introduits à Bénévent.Depuis lors, les chants bénéventains de la Messe semblent avoir été utilisés comme alternativeaux chants grégoriens les jours de grande fête. Au XIe siècle, le répertoire bénéventain est tombé en désuétude.
L'autre centre liturgique important du duché était Monte Cassino, où saint Benoît fonda le premier monastère bénédictin. Ce monastère n'a pas été occupé sans interruption : il fut détruit par les Lombards, et réoccupé vers 717 après plus d’un siècle. Il fut encore détruit par les Sarazins en 883, avant d’être restauré un siècle plus tard.
Le chant bénéventain a fait l'objet du volume XIV de la Paléographie musicale (1934), mais la principale étude de ce chant est due à Thomas Forrest Kelly : The Beneventan Chant (Cambridge, 1989). Forrest a poursuivi son travail en publiant les fac-similés de chaque chant survivant (Paléographie musicale XXI, 1992) : cinq graduels, ou les livres des chants de la Messe, sont parvenus jusqu’à nous depuis les XI et XIIe siècles. Parmi ceux-ci, Bénévent 38 et 40 sont les plus importants et Bénévent 33 (missel avec la notation des chants datant des environs de l’an 1000)est le plus ancien. Tous ces graduels contiennent des chants grégoriens, les chants bénéventains étant ajoutés immédiatement après chaque fête ; comme si on avait voulu conserver et garder l’usage des chants traditionnels…
Les chants de la semaine sainte revêtent une importance particulière, car ils ne correspondent pas tous aux chants des livres grégoriens. Le plus intéressant de ces chants est celui de l'Exultet, la célébration du cierge pascal au début de la vigile pascale. Les belles enluminures sont à l'envers, de sorte que les fidèles peuvent les admirer tandis que le préchantre déroule son parchemin en chantant. Beaucoup de manuscrits ont survécu en raison de la valeur artistique des enluminures.
5. Le Mozarabe
Le terme "Mozarabe" fait référence aux chrétiens espagnols vivant sous la domination arabeaprès 711. Si l’apogée du rite espagnol se situe déjà au VIIe siècle, on en a peu de traces avant 711.On parle aussi de chant et d’écriture wisigothique, par référence à l’art développé du Vème siècle jusqu’au début du VIIIème siècle durant l'existence du royaume wisigoth, d’abord à Toulouse, puis à Narbonne, Barcelone, Séville, Mérida et finalement à Tolède. Parler d’écriture musicale wisigothique est un anachronisme car il n’y a pas d’écriture musicale datant des wisigoths.
La Verona Orationale est une collection de prières de l’Office qui a été emportée en Italie pour être préservée pendant l'invasion arabe. Elle doit dater des environs de 700. Elle témoigne non seulement du style littéraire du rite, mais elle contient également des indications quant auxtextes des chants.
Un exemple de manuscrit primitif de chants mozarabes est l’Antiphonaire de Léon, copie du Xe siècle d'un manuscrit du VIIe siècle. D’autres manuscrits ont été produits entre le IXe et le XIe siècle.
Les neumes, comme les neumes francs de la même période, ne peuvent être déchiffrés, puisqu'il n'y a aucun manuscrit contenant les mêmes chants en notation en lignes.Lors de la reconquête de l'Espagne musulmane, de nombreux moines et évêques français sontarrivés en Espagne. Et quand Tolède, l’ancienne capitale, a été reprise en 1085, le vieux riteespagnol fut supprimé en faveur du rite romain et de son chant grégorien. Seule la cathédrale de Tolède a pu conserver l’ancienne liturgie grâce à une dispense de l’autorité romaine.