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Liège: Solennité de la Fête du Saint-Sacrement 2008

Le samedi 24 mai 2008 à 17 heures:

Deux cents Liégeois ont fêté Dieu et sainte Julienne à l'église du Saint-Sacrement

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  sainte Julienne à l'église du Saint-Sacrement

 
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 Célébration à l'autel majeur: conversi ad Dominum

Le samedi 24 mai à 17h au Boulevard d'Avroy à Liège, l'église du Saint-Sacrement a réuni deux cents fidèles pour fêter la présence réelle de Dieu dans l'Eucharistie et le 750e anniversaire du "dies natalis", la naissance au Ciel, de sainte Julienne de Cornillon (+ en 1258), l'inspiratrice de cette fête du Corps et du Sang du Christ: la "Fête-Dieu".

La messe, conclue par une adoration et une bénédiction du Saint-Sacrement, a été célébrée, selon le missel de 1962, par Monseigneur Roger Gryson, doyen ém. de la faculté de théologie de l'université catholique de Louvain. Celui-ci était assisté par les abbés Claude Germeau (Foyer d'Accueil de Herstal) et Arnaud de Boisse (Chapelle Saint-Oremus de Herstal) qui officiaient respectivement comme diacre et sous-diacre.

La cérémonie s'est déroulée à l'autel majeur de l'église, face au tabernacle et à la reproduction du Christ en Croix de Reni (XVIIe s.) qui surplombe ce superbe autel. Cinq servants de messe, acolytes et thuriféraires conduits par le Fr. Jérémie-Marie de l'Eucharistie, entouraient les célébrants.

Les chants grégoriens de la fête ont été assurés par le Choeur "Una Cum" de Bruxelles dirigé par Paul-Augustin Deproost, professeur à l'U.C.L. et la Schola du Saint-Sacrement. Le plain-chant alternait avec des polyphonies de Zoltan Kodaly et Franz Liszt interprétées par l'Ensemble vocal "Praeludium" dirigé par Patrick Wilwerth, professeur au conservatoire de Verviers, titulaire de l'orgue du Saint-Sacrement, et compositeur lui -même d'une "Missa Brevis" dont un extrait a aussi été chanté.

Ce grand moment liturgique et musical fut aussi théologique et pastoral comme le montre le texte de l'homélie remarquable de Monseigneur Gryson, reproduit dans les lignes qui suivent.

 

 L'homélie de Monseigneur Roger Gryson

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   Monseigneur Gryson rappelle aux fidèles le sens de l'Eucharistie
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Célébrant aujourd'hui la solennité de la Fête-Dieu, nous accomplissons le voeu exprimé par Jésus à la Dernière Cène: Faites ceci en mémoire de moi. Mais qu'est-ce que "faire mémoire" ?

L'eucharistie n'est pas simplement une cérémonie qui sert à nous rappeler ce qu'un homme a accompli pour nous autrefois, comme celles qui se célèbrent devant les monuments aux morts, en souvenir de ceux qui ont donné leur vie pour que nous puissions vivre libres. Ce n'est pas simplement un signe qui nous invite à penser au sacrifice du Christ, comme le crucifix dans nos campagnes ou sur les murs de nos maisons, ou comme le signe de la croix que nous traçons sur nous-mêmes. Ce n'est pas seulement un rite qui nous communique la grâce du Christ, comme le baptême, dans lequel nous sommes associés spirituellement à sa mort et à sa résurrection. On ne s'agenouille pas devant l'eau du baptême, pas plus qu'on ne s'agenouille devant le saint chrême, dont l'onction signifie que nous participons au sacerdoce du Christ, en ce sens que nous sommes appelés à faire à Dieu l'offrande de notre vie, comme il a lui-même offert la sienne.

Le signe de l'eucharistie est d'un autre ordre que tous ceux-là, car c'est le seul qui contienne en lui-même la réalité qu'il signifie et qui passe en cette réalité même, comme nous l'avons chanté à l'instant: in carnem transit panis, et vinum in sanguinem. Par l'invocation de l'Esprit Saint sur les offrandes, par les paroles du Christ à la consécration, le pain et le vin sont transformés en corps et sang du Christ.

Chaque jour, disait saint François d'Assise à ses frères, le Fils de Dieu s'abaisse exactement comme à l'heure où, quittant sa demeure céleste, il s'est incarné dans le sein de la Vierge; chaque jour, il vient à nous, sous les dehors les plus humbles; chaque jour, il descend du sein du Père sur l'autel entre les mains du prêtre. Et de même qu'autrefois, ses apôtres pouvaient le voir, de même se montre-t-il à nos yeux maintenant dans le pain consacré.

Peut-être pensons-nous que ce signe de sa présence est bien peu transparent. Mais plus Dieu se rapproche de l'homme, plus il est contraint de se dissimuler, par égard pour la fragilité de sa créature. Comme il l'a dit à Moïse sur la montagne, un homme ne peut voir Dieu dans l'éclat de sa gloire divine sans mourir. C'est pourquoi il est demeuré caché sous le voile de la nature, qui nous le couvre jusqu'à l'incarnation. Et quand il est venu habiter parmi nous, il s'est encore plus caché en se couvrant d'une humanité semblable à la nôtre. Car il était plus facile de reconnaître Dieu dans la splendeur des cieux et dans les beautés multiples de la terre, que dans cet enfant couché dans la mangeoire d'une étable, puis dans cet homme qui avait faim, qui avait soif, qui était fatigué au bout d'un long chemin, qui a pleuré après avoir perdu un ami, qui a vécu dans l'angoisse la perspective de la mort, à Gethsémani, et qui, finalement, ne s'est remis entre les mains du Père qu'après avoir poussé un déchirant cri de désespoir. In propria venit, et sui eum non receperunt, dit le prologue de saint Jean. Il est venu dans ce monde qui était le sien, puisque tout a été fait par lui, et même ses compatriotes, dont il était venu accomplir l'espérance, ne l'ont, pour la plupart, pas reconnu.

Dans l'eucharistie, Dieu s'approche encore davantage de nous, puisqu'à l'instant de la communion, nous sommes plus proches encore de lui que ceux qui l'ont côtoyé pendant qu'il vivait sur la terre, que ceux qu'il a touchés pour les guérir, que la pécheresse qui s'est prosternée à ses pieds, que saint Jean qui a reposé sur son côté à la Cène. A l'instant de la communion, il s'unit à nous et nous unit à lui, physiquement, dans une intimité qui ne sera surpassée que dans l'autre monde, lorsque, selon le mot de saint Paul, Dieu sera tout en tous, et l'Esprit Saint aura pris totalement possession de nous pour nous rendre totalement semblables au Christ ressuscité. C'est pourquoi la dernière oraison de la messe d'aujourd'hui dit que la communion au corps et au sang du Christ préfigure le bonheur sans fin de l'éternité. Elle est un gage de la gloire future, dit l'antienne des vêpres, futurae gloriae pignus datur, et comme un avant-goût de ce que sera notre vie dans l'au-delà, praegustatio vitae aeternae.

Faire mémoire, ce n'est donc pas seulement se tourner vers le passé. Celui dont nous faisons mémoire est vivant. La messe est traversée par une tension spécifique entre le souvenir et l'espérance. La messe est un regard posé sur le passé, pour mieux vivre le jour présent et s'engager résolument dans l'avenir. Paradoxalement, on pourrait dire qu'à la messe, nous nous souvenons de ce qui sera. Le rassemblement eucharistique est une halte de nomades, c'est une étape d'exode; en la célébrant, on chante des chants de Pâques et l'on reçoit en viatique cette manne cachée dont parle saint Jean dans l'Apocalypse, et qui n'est autre que Dieu lui-même.

Il ne s'agit pas de regarder et d'attendre passivement. Car la participation à l'eucharistie implique un engagement à nous incorporer davantage au Christ. Qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi et moi en lui. Manger et boire le corps et le sang du Christ, c'est accepter de le suivre jusqu'au bout, jusqu'en sa passion et en sa mort, pour avoir part à sa résurrection, pour vivre de sa vie; c'est s'incorporer à lui jusqu'à l'extrême de son engagement, pour nous les hommes et pour notre salut. C'est faire nôtre son projet et son idéal de vie. C'est aussi s'incorporer à son corps qui est l'Eglise. Il n'y a pas d'eucharistie vraie en dehors de la communion de l'Eglise.

Deviens ce que tu reçois, disait saint Augustin, en expliquant à ses fidèles le sens de l'Eucharistie. Deviens corps du Christ, c'est à dire manifeste sa présence. Pour s'exprimer, aujourd'hui, le Christ a besoin de tes mains et de ta bouche. Imite ses gestes et redis ses paroles, mais surtout, veille à ce que tes actes soient en accord avec tes paroles, à ce que ta parole ne soit pas seulement un écho fidèle de la sienne, mais s'incarne de la même façon que lui-même a été la parole incarnée de Dieu, avant d'être parole exprimée de Dieu. Devenir ce que nous recevons, devenir, à notre façon et pour notre petite part, corps du Christ, c'est à dire un prolongement de sa présence à travers les siècles.

Aujourd'hui, nous rendons grâce à Dieu notre Père, qui a voulu que le sacrifice de son Fils, que sa mort et sa résurrection, soient mis en quelque sorte à notre portée, que son corps lui-même soit notre nourriture et nous transforme peu à peu en lui. L'Eglise n'a pas tort lorsqu'elle nous fait chanter, dans ce beau poème que nous avons entendu tout à l'heure: "Loue-le tant que tu peux, car il est plus grand que ta louange, et tu ne pourras jamais le louer assez".

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Laudate Dominum in tympano et choro
Laudate Eum in chordis et organo (psaume 150)

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