"Vir erat in terra Hus, nomine Job: simplex et rectus, ac timens Deum: quem Satan petiit, ut tentaret: et data est ei potestas a Domino in facultates et in carnem ejus...
"Il y avait, au pays de Hus, un homme appelé Job, simple, droit et craignant Dieu. Satan demanda de le mettre à l'épreuve et reçut du Seigneur pouvoir sur ses biens et sur son corps..."
Job, 1 (offertoire du 21e dimanche après la Pentecôte)
Il était un homme, appelé Job...
Un homme simple et droit,
qui vénérait Dieu
et veillait à garder ses enfants en son amour.
~
Job était entouré d’estime
et comblé de biens.
~
Il n’est pas entouré d’estime
et comblé de biens
parce qu’il vénère Dieu.
Il ne vénère pas Dieu
parce qu’il est entouré d’estime
et comblé de biens.
Simplement Job est Job
et Dieu, Dieu.
~
Là,
ni « parce que », ni « pour que ».
Simplement Job est Job
et Dieu, Dieu.
C’est tout.
C’est Tout.
Il ne faut pas chercher plus loin.
~
Dieu garde l’homme en bienveillante main ;
il « ne dort ni ne somnole » :
il veille.
« Regardez les oiseaux du ciel...
Regardez les lis des champs... »
Dieu pourvoit à tout
et au-delà.
Job le sait : Job est Job
et Dieu, Dieu.
~
Il ne faut pas chercher plus loin.
Job est un homme simple et droit.
Job vénère Dieu :
Il est Job ; Dieu est Dieu.
~
Dieu pourvoit.
A tout.
Pour rien.
Dieu est Dieu.
~
« Il fait lever son soleil
sur les bons, et sur les méchants ;
et sa pluie, il la prodigue
aux justes et aux injustes.»
Dieu est Dieu.
Il donne à chacun
comme il lui plaît.
◊
Dieu donc comble Job ;
Job se tient simple sous le regard de Dieu.
Tout cela sans calcul.
Ainsi vont selon Dieu les choses.
En leur principe.
« In principio... »
~
Sous le regard de Dieu,
Job est auprès de Dieu.
A l’image du modèle...
mais de cela, il n’a point révélation
― bien plus tard viendra
la plénitude des temps ―
... à l’image du Verbe-modèle.
« Au principe, le Verbe était auprès de Dieu. »
~
La clé de l’Ecriture,
de toute l’Ecriture,
c’est le Verbe de Dieu.
Abraham, Isaac, Jacob, Joseph,
Job et les autres,
chacun à sa façon le préfigure.
Chaque trait de l’Ecriture
est touche de pinceau
où librement s’exprime
la liberté de l’homme.
Chaque trait, sa liberté ;
et le tableau pourtant,
les personnages,
les récits :
tout y aboutit au Verbe de Dieu.
~
Pleine vraiment est la liberté de l’homme.
Et voici : quelque usage qu’il en fasse,
jamais elle ne met en échec
le dessein de Dieu.
Par oui, par non,
c’est le dessein de Dieu qu’elle avantage,
toujours.
Moïse y concourt,
Pharaon y concourt.
La bourrasque se lève-t-elle contraire ?
vent debout cingle le vaisseau.
~
Avance donc, Satan, viens,
allez, viens
parmi les fils de Dieu,
toi qui te présentes devant le Seigneur
pour dénigrer son Juste.
◊
Un jour, comme les fils de Dieu
venaient se présenter devant le Seigneur,
Satan aussi s’avança
parmi eux.
« D’où viens-tu ?
― De parcourir la terre. »
~
« ... tel un lion rugissant
cherchant qui dévorer... »
précisera le bon saint Pierre.
Le Nouveau le dit
tout ainsi que l’Ancien.
C’est l’Ecriture.
Satan rôde, et jamais ne se lasse,
il rôde et il dévore.
~
Qui ne reçoit
humblement
l’avertissement
ne sait
ni le danger
ni le recours.
~
« D’où viens-tu ?
― De parcourir la terre.
― As-tu remarqué mon serviteur Job ?
Il n’a point son pareil sur la terre :
un homme intègre et droit.
― Est-ce pour rien que Job vénère Dieu... »
◊
Voilà le propos assassin !
C’est à bon droit qu’on te nomme le Menteur,
le Calomniateur,
toi qui ne vois que mal
là où il n’est que bien.
Parce que ton œil est ténèbres
tout ce que tu vois est ténèbres.
~
Et moi, hélas,
ne suis-je pas disciple complaisant
à ta détestable école,
qui tant de fois me prends
à prêter à autrui
un noir penser,
que tu m’instilles ?
« Que si une action pouvait avoir cent visages,
il la faut regarder
en celui qui est le plus beau. »
◊
C’est bien le Tentateur
qui réclame de nous passer au crible.
Il ne le peut toutefois
sans l’agrément de Dieu.
Dieu ne nous soumet pas à la tentation
Dieu ne nous fait nul mal.
Mais c’est de sa main,
de la main de Dieu,
de Dieu sans qui rien ne se peut,
que nous recevons
tentation et mal.
A la requête de l’Ennemi.
~
L’Ennemi frappe Job
encore, encore et encore.
Et Job dit :
« Le Seigneur a donné
le Seigneur a ôté :
comme il a plu au Seigneur
ainsi en a-t-il été fait :
que le nom du Seigneur soit béni ! »
L’Ennemi frappe Job
« peau pour peau »
encore, encore et encore.
Et Job dit :
« Si nous accueillons le bonheur
comme un don de Dieu,
comment
ne pas accueillir de même le malheur ? »
~
L’Ennemi frappe
mais Job ne s’y trompe pas.
C’est de la main du Seigneur
qu’il accueille le coup.
Et Job bénit le Seigneur.
◊
Dieu accède à la requête de Satan,
de Satan qui plus tard,
à nouveau,
réclamera les Apôtres cette fois,
pour les « cribler comme du froment. »
Satan s’acharne
et de la fournaise qu’il embrase
coule, or pur,
l’amour de l’homme pour Dieu.
L’amour désintéressé.
Simplement
Job est Job
et Dieu, Dieu.
C’est tout.
◊
L’amour désintéressé,
celui auquel aspire le cœur
vraiment épris,
celui qui fait fils de Dieu
à l’image du Verbe,
celui qui donne plénitude à l’homme,
par participation
au Sacrifice du Verbe fait homme
crucifié :
l’officine de Satan en est la forge,
la pierre de touche
et le creuset.
~
Satan met en œuvre la souffrance
et Dieu y produit son Saint.
En haute estime,
en grande confiance.
Il sait son cœur,
car il l’habite.
◊
Le Seigneur sait le cœur de Job.
Dieu est Dieu :
il sonde reins et cœurs.
Job ne sait pas les voies du Seigneur
Job est Job :
il ne peut comprendre Dieu.
Il n’a qu’un recours,
s’en remettre au Seigneur.
En pleine confiance,
plein de nuit.
~
Dieu est Dieu,
et Job, Job.
~
Immense est sa nuit.
Et Job maudit le jour qui l’a vu naître.
Immense est sa nuit.
Elle est immense comme Dieu la fait.
~
Il n’en peut plus.
« Mon Dieu, mon Dieu,
pourquoi
m’avoir abandonné ? »
Job est à présent
en le Verbe enlevé.
En le Verbe élevé.
~
Immense est sa nuit,
immense son « pourquoi ? »
Immense apparaît
la fidélité de son cœur,
la fidélité
en l’Unique Recours :
« Mon Dieu, mon Dieu. »
◊
Dieu est l’Unique.
« Seigneur, à qui irions nous ? »
Quelle que soit la détresse,
à lui le cri revient.
Il ne peut en être autrement :
Dieu est l’Unique,
il n’y a pas d’autrement.
La fidélité de Job
la voilà.
Elle n’est pas conditionnelle :
elle est.
Dieu est,
alors elle est.
A Dieu unique
réponse unique.
~
Pourquoi est-il dit
que les amis de Job
n’ont pas bien parlé de Dieu ?
― Leurs discours pourtant étaient sages ! ―
Pourquoi le courroux de Dieu
s’est-il enflammé
contre Eliphaz de Téman,
contre Bildad de Shuah,
contre Çophar de Naamat ?
Leurs discours n’étaient-ils point sages ?
Leurs discours
cherchaient à Dieu justification.
Folie.
Dieu est.
Jean-Baptiste Thibaux.
Extrait de "Vérité et Espérance-Pâque Nouvelle" n° 104, automne 2017.
Editeur: sursumcorda@skynet.be