A propos du lynchage médiatique (*) de Mgr Léonard, archevêque de Malines-Bruxelles, un « vent favorable» nous apporte le point de vue d'un psychopédagogue verviétois, que nous reproduisons ci-dessous :
L'ECCLESIASTIQUE ET LES HYSTERIQUES
Allez, l'Observatoire du Récit Médiatique (UCL), au travail ! Après le colloque "Radio et narration : le réenchantement" que vous préparez pour les 19/20 novembre, il vaudra assurément la peine de dédier votre prochain événement ou livre au traitement médiatique réservé aux propos du primat de Belgique. Je soumets d'ores et déjà une contribution pour ce colloque. Son titre: "confusionnisme, inculture et perte de sens: l'espace médiatique reflet et catalyseur des maladies sociales".
Que ce soit au sujet du sida, des homosexuels ou des prêtres pédophiles âgés, la psychiatrie du collectif fournit une clé de lecture aux réactions suscitées par les propos de l’archevêque. En matière de diagnostic, on ne se trompera pas en déclarant d’emblée avoir affaire à un état d'"agitation généralisée", tant au sud (« syndrome Gabriel Ringlet » **) qu'au nord (« syndrome Rik Torfs ») du pays.
Du point de vue psychiatrique, cet état est généralement alimenté par une source conflictuelle claire ou par une cause bien localisable, à savoir ici l'archevêque. L'agitation s'exprime par des pulsions compatibles avec un état normal mais exagérées. Intenter un procès à un archevêque ou exiger sa démission pour quelques expressions d'un avis personnel et/ou d'un avis ecclésial relève assurément de cette tendance à l’exagération.
HYSTERIE COLLECTIVE
Si l'on pousse plus loin l'étiologie, plusieurs options s'offrent. Les états délirants, confusionnels, maniaques offriraient certes des pistes intéressantes pour expliquer ces tempêtes dans l'eau bénite. Mais nous privilégierons l'explication d'un état d'hystérie collective qui se caractérise par un comportement d'excessif enthousiasme ou d'excessive adulation de la part d'un groupe, observable par exemple dans certains concerts rock. Dans le cas qui nous occupe, cette hystérie collective est inversée et orientée vers la répulsion, Monseigneur Léonard n'étant ni John Lennon, Elvis Presley ou membre d’un Boys Band.
PERTE DE NUANCE
Les personnes souffrant d'hystérie deviennent incapables de nuances et l'on a assisté lors de la troisième déclaration à un cas d'école en la matière. Voici la phrase qui a crispé : « Je souhaite qu'on reste toujours humain avec tout le monde, d'abord avec les victimes en leur prêtant écoute et avec les abuseurs, les abuseurs sont aussi des êtres humains, ils doivent évidemment prendre conscience de ce qui s'est passé dans leur vie mais s'ils ne sont plus du tout en fonction, s'ils n'ont plus aucune responsabilité, je ne sais pas si exercer une sorte de vengeance qui n'a plus aucun résultat concret, est une solution humaine. Et je ne pense pas que la majorité des victimes, loin de là, souhaite cela ». Voici les nuances élémentaires passées aux pertes et profits :
- l'intervention de Léonard est extrêmement circonstanciée : des prêtres âgés, sans responsabilités, admettant les faits;
- l'intervention est à remettre dans un contexte plus large dans lequel l'archevêque a répété continûment que la justice devait faire son travail et que les victimes, parfois brisées à vie, devaient être entendues de toutes les manières;
- l'intervention contient des marqueurs d'expression d'un avis personnel et d'une invitation à la réflexion ("je ne sais pas si...", "Je ne pense pas que...")
- l'intervention est celle d'un homme d'Eglise et du représentant d'une religion "experte en humanité", qu'on soit ou non d'accord avec la vision de l'homme qu'elle propose. Pas étonnant donc que cet appel à l'humanité soit valable jusque dans le chef des abuseurs et qu'un archevêque se refuse à participer à ce qui serait un "vae victis";
OBSESSION
L'hystérie se teinte volontiers de motifs obsessionnels. En l'espèce, l'obsession ultime est que la hiérarchie de l’Eglise se taise une bonne fois pour toutes (étrange porte-parole de l'archevêque dont le conseil était de se taire jusque Noël) ou qu'elle ne s'exprime plus que pour bénir tout ce que pense (?) l'opinion. Sans un recours aux apports de la psychiatrie du collectif, il est tout bonnement impossible de répondre à cette question simple et essentielle : de quoi Monseigneur Léonard est-il coupable in fine ? En son temps, Ponce Pilate, un païen, avait posé exactement la même question au sujet du Christ, sans trouver de réponse.
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(*) accompagné de voies de faits sur sa personne, dans sa propre cathédrale, à Bruxelles.
(**) sur le cas Ringlet voir aussi: